C’est pour mieux connaitre les comportements d’achat en assurance qu’Aviva Canada se déploiera en distribution directe au cours des trois prochains mois, à travers le pays. L’assureur veut ainsi gagner une connaissance du marché qu’il n’a pas, étant présent uniquement dans le courtage.Martin-Éric TremblayMartin-Éric Tremblay, vice-président principal pour le Québec et l’Atlantique chez Aviva Canada, se dit conscient que son entreprise prend le risque de choquer les courtiers avec cette décision. Il affirme toutefois que les courtiers bénéficieront de cette décision à plus long terme, puisqu’Aviva aura acquis une meilleure connaissance du marché et qu’il pourra en faire bénéficier les courtiers. Il ajoute que sa compagnie n’a pas l’intention d’échanger son volume de quatre milliards de dollars (G$) au Canada dans le courtage pour le même volume en distribution directe.

« Nous faisons ce geste parce que nous avons confiance en notre réseau de courtage. On le fait pour les faire avancer autant que nous faire avancer comme entreprise. Nous avons aussi l’objectif de devancer la cassure du marché qui surviendra », a expliqué M. Tremblay, en entrevue au Journal de l’assurance.

C’est par Internet qu’Aviva se positionnera en distribution directe. « Les gens font leurs transactions bancaires en ligne et font des achats via le Web. On doit donc mieux comprendre ce qui se passe dans le digital. Nous avons 4 G$ de primes dans le courtage, mais il est clair qu’il nous manque de l’info, considérant que la moitié du marché au Québec en assurance des particuliers transige via la distribution directe. Pourquoi ces gens y vont-ils? Il y a probablement une question de facilité de transiger », dit-il.

M. Tremblay ajoute que l’info qu’il obtient en ce moment est fragmentée. Une partie se trouve entre ses mains, alors que le reste est entre les mains des courtiers avec qui il transige. « Nous ne jouons pas avec les mêmes connaissances que les assureurs directs, qui font du digital », dit-il.


Autre lacune : la technologie qu’utilise Aviva est désuète. Ses systèmes datent des années 1980.

« Il faut que l’on fasse un saut de grenouille. On doit avoir des systèmes qui vont nous permettre d’avoir une meilleure compréhension des comportements du client pour faciliter la transaction avec lui, et ce, autant du côté direct que pour le courtage », dit M. Tremblay.

Aviva a ainsi pris la décision de changer de système. Il fait appel à GuideWire, dont la plateforme est utilisée par plusieurs assureurs.

« Ça nous permettra d’être en évolution constante. Si on ne fait pas évoluer nos systèmes dès maintenant, il y a des risques qu’il nous en manque des bouts plus tard pour être concurrentiel. En embarquant dans GuideWire, on va développer un système qui recueille le plus d’info possible. On doit commencer à se nourrir de l’info qu’on ne retrouve pas dans le réseau de courtage pour la ramener et l’utiliser au profit du courtage. La prochaine vague de clients aura des besoins plus intégrés. On ne sait même pas de quel type d’assurance on parlera », dit M. Tremblay.

À petits pas

Il ajoute qu’Aviva préfère y aller à petits pas plutôt que de s’isoler pendant 24 mois pour développer un projet sans savoir si celui-ci tiendra la route au bout du compte. Ainsi, pour débuter, Aviva mettra à la disposition des Canadiens un outil de cotation en ligne permettant au client d’acheter une protection en ligne. Un représentant certifié sera impliqué dans la transaction. Aviva débutera avec ses agents qui gèrent son volume d’assurance groupe. Le client aura aussi le choix de parler à un courtier s’il le préfère. Le tout sera déployé cet été.

M. Tremblay précise toutefois que ce n’est pas cette solution qu’Aviva retiendra à long terme pour percer le marché direct. « Nous n’avons pas idée du volume que nous ferons avec cette initiative. Ça importe peu. On veut avant tout comprendre ce marché et faire évoluer nos solutions dans le temps. On apprend à marcher pour avoir une intelligence du marché », dit-il.

Pourquoi garder la même image de marque dans le courtage que dans la distribution directe? « Nous croyons qu’à moyen ou à long terme, le consommateur ne fera pas la distinction entre les réseaux de distribution. Toutefois, la marque de commerce sera là comme garant de service impeccable. La marque Aviva est internationale et aussi bien connue dans le monde digital. On ne veut pas perdre cette valeur », dit-il.

M. Tremblay compare le tout à l’achat d’un iPad d’Apple. « Tu as le choix de l’acheter sur le Web ou chez un fournisseur. En fin de compte, tu as toutefois acheté un produit Apple », dit-il.