Dans la foulée des démarches d'Ottawa pour instaurer une commission unique en valeurs mobilières, le PDG de la Chambre de la sécurité financière, Luc Labelle, exhorte la profession à se mobiliser : avec la commission unique, le réseau au Québec risque de perdre le droit d'influencer sa propre profession, dit-il. « Ultimement, c'est l'auto-règlementation qui est en danger. »Ottawa a décidé d'instaurer seul une commission unique au Canada, rappelle Luc Labelle. « Seulement, on ne sait juste pas quand le train arrivera », a-t-il ajouté en allusion au Bureau de transition qu'Ottawa a mis sur les rails le 22 juin dernier.

Or, non seulement ce train aboutira à un régulateur unique mais celui-ci sera situé hors du Québec. « Ce projet du ministre Flaherty fait fi de la pratique et des particularités régionales du pays. Nous le décrions sans réserve et continuons de soutenir l'idée de passeport en valeurs mobilières. Par contre, l'éventualité de cette commission vient rappeler aux professionnels de l'industrie d'embrasser pleinement l'autorèglementation. »

M. Labelle souhaite en effet que la profession et le public comprennent l'importance d'avoir un organisme d'autoréglementation situé au Québec et qu'ils se l'approprient. L'existence d'un tel organisme qui régit à la fois les professionnels en assurance de personnes individuelle et collective, en épargne collective et en bourses d'études est unique au pays, souligne-t-il.

« Saisissons-nous vraiment cette chance que nous avons d'avoir une organisation proche de la pratique des gens [de la profession] et contrôlée par eux? Cet organisme donne au praticien le pouvoir d'orienter sa pratique. Autrement, c'est un régulateur distant qui le fera à sa place », prévient-il.

Alors que plusieurs membres se disent conscients de l'importance de la Chambre, Luc Labelle veut passer le message aux autres membres qui se demandent encore pourquoi soutenir un organisme comme la Chambre. Le projet de commission unique ne menace pas l'existence de la Chambre, convient M. Labelle. Il menace toutefois la capacité d'avoir voix au chapitre, tant chez les représentants que chez les cabinets, croit-il.

La Chambre est un outil local sous le contrôle direct de la profession, rappelle-t-il, et cette proximité est un avantage pour faire bouger les choses. Les membres d'un organisme réglementé à distance sont en revanche rarement convoqués lors des prises de décisions et n'ont ainsi aucune capacité d'influencer les règles qui s'appliqueront à leur pratique.

« La Chambre n'est pas juste un organisme de plus. Nous édictons des règles qui orientent les ajustements réglementaires et déontologiques de la profession d'ici et nous parlons directement à des consommateurs d'ici. Le ministre de la Justice a augmenté le plafond des amendes (Projet de loi 74, automne 2009, qui augmentait le plafond de 12 500 $ à 50 000 $ par chef). Or, nous en avions fait la demande auprès du ministère dès 2007, au nom de la profession. »

Luc Labelle croit que la profession arrive à un rendez-vous historique. Les conseillers et les cabinets sont-ils prêts? Participent-ils suffisamment au débat? Les leaders d'opinions le font. Plusieurs l'ont fait au Québec, dit-il. Par contre, les firmes pancanadiennes ne veulent pas se mettre le futur régulateur à dos et restent timides dans ce débat, observe le PDG de la Chambre.

Luc Labelle observe cependant une prise de conscience croissante dans l'industrie et le public. Bien qu'il ait fait quelques représentations hors Québec et participé à certaines consultations, Luc Labelle n'entend pas rencontrer le ministre Flaherty sur le sujet. « Je laisserai le ministre des Finances du Québec travailler à son niveau », a-t-il conclu.