Son engagement envers les prestations du vivant rapporte gros à La Survivance. En choisissant ce créneau et en y restant fidèle depuis quatre ans, la mutuelle de Saint-Hyacinthe a presque doublé ses ventes. Son PDG Richard Gagnon veut creuser davantage la niche et lorgne maintenant l’Ontario pour maintenir sa croissance.Pour Richard Gagnon, la croissance de La Survivance est la récompense d’avoir gardé le cap sur un plan de match précis adopté lors de son arrivée à la présidence il y a quatre ans. Durant cette période, le président de la mutuelle a tout fait pour positionner La Survivance comme un spécialiste en prestations du vivant. Pour y parvenir, lui et son équipe ont appliqué trois principes: se spécialiser, investir en technologie et miser sur les avantages d’être petit.

Trouver sa niche. Plusieurs le disent, peu y parviennent, soutient Richard Gagnon. Pour réussir, dit-il, il faut avoir de la rigueur et de la discipline, car la tentation est forte de se laisser distraire de son créneau et de réagir à la tendance du jour. Or, il n’y a pas d’avenir à faire la même chose que les gros. « Ce sera toujours la même chose… en plus petit », croit-il.

« Nous avons décidé de nous spécialiser en prestations du vivant. Cela voulait toutefois dire que l’on doit battre le marché chaque fois que nous lançons un produit », lance d’emblée
M. Gagnon. Une vérité qui ne se dément jamais, peu importe le créneau, croit le président de la mutuelle. Pour un petit, battre le marché se jouera sur l’originalité du produit, de ses caractéristiques, et la spécificité de la cible visée.

Par exemple, M. Gagnon soutient avoir été le premier à viser explicitement le marché des enfants avec son produit de protection contre les maladies graves Prodige, lancé il y a quelques années. La Survivance innovera encore le 21 avril, dit-il, avec P.A.G.E., pour Protection d’Assurance Globale Économique. M. Gagnon précise qu’il s’agit d’un nouveau produit d’assurance invalidité à ne pas confondre avec l’actuelle PAGE, dont l’acronyme ne réfère pas aux mêmes caractéristiques.

Virage

Pour maintenir la barre de la spécialisation, La Survivance n’a pas hésité à abandonner les produits hors de son champ de compétence. « Nous avions de la vie universelle, de la T100, de la T10!!!  J’ai fait le ménage à mon arrivée. Ce qui reste, c’est une petite vie entière que nous laissons aller tranquillement. »

Le choix d’être niché est toutefois exigeant, signale Richard Gagnon. Pour pouvoir devancer le marché, la période de test est plus longue, et les coûts de développement plus élevés. « Nous prévoyons une période de 18 mois pour développer un produit. »

Les conseillers allaient-ils reconnaître la qualité d’un produit niché ou choisir celui qui paie le plus de commissions? La Survivance s’est posé la question. « Ultimement, le conseiller reconnaît la qualité, répond Richard Gagnon. Les ventes de notre récent produit P.A.I.R.E. n’ont pas fléchi, même si la concurrence s’est rajustée depuis son lancement [en 2006]. »

Les chiffres donnent raison à la mutuelle. La Survivance a vu son volume de primes bondir de 95,3  % durant cette période de quatre ans terminée à la fin de 2007.

Aujourd’hui, l’assureur tire 70  % de ses primes totales en assurance individuelle du créneau des prestations du vivant qui couvrent l’invalidité, les maladies graves et l’accident. Entre 2006 et 2007, ses ventes ont augmenté de 45 % en termes de nouvelles primes en assurance individuelle.

En assurance collective, la croissance a atteint 10 % durant la même période. L’assurance collective représente près de la moitié du volume de primes à La Survivance, qui cible les entreprises d’au plus 500 employés et les associations.

Dans l’ensemble, le rendement de l’avoir des mutualistes a maintenu une moyenne de 14,3 % les cinq dernières années se terminant en 2007. En regard du plan mis en œuvre, l’avoir des mutualistes a augmenté de 68 % dans les quatre années se terminant en 2007. Entre 2006 et 2007, la croissance de cet avoir a atteint 19 %.

Le succès de La Survivance a magnifié son pouvoir d’attraction. En effet, à chacune des trois dernières années, 400 nouveaux représentants en moyenne ont acheminé leurs affaires à la mutuelle. En 2007, ils ont été 470 à le faire. La Survivance est vraiment devenue une compagnie par courtage, dit M. Gagnon. Elle avait quitté le modèle d’agence exclusive voilà 10 ans.

Le choix d’être spécialisé s’est accompagné de l’obligation d’investir en technologie, dit M. Gagnon. « La technologie donne aux petits assureurs les moyens des grands », dit-il.

Une bonne façon de gagner en efficacité au stade du développement d’un produit, estime M. Gagnon, c’était de disposer d’une plateforme technologique à jour. Depuis un an, La Survivance a investi pour rajeunir son système actuel CAP-SIL, l’ancêtre de la plateforme Ingénium. Elle prévoit un investissement de 3,5M$ en un peu plus de trois ans.

Pour La Survivance, ce n’est pas un luxe car une plateforme pour les prestations du vivant a une nature totalement différente de ce qui est habituellement requis en assurance vie.

Ce nouvel outil technologique prévoit d’automatiser certaines opérations, telles la gestion des polices, les réclamations et les vérifications pour rappel de primes. La Survivance prévoit aussi aller plus loin dans la numérisation de documents et le développement de son portail électronique dédiés aux relations avec ses partenaires.

Autre pan important du programme, l’intelligence d’affaires. « Nous voulons extraire encore plus d’information de nos données, pour l’analyse et la simulation, entre autres. »

Petit et fier de l’être

Dans une industrie où trois joueurs dominent l’assurance de personnes au Canada, et où les grandes banques arrachent une part croissante du marché de masse, être petit est souvent perçu comme une tare si ce n’est un signe d’une mort annoncée.

Une perception qui fait bien rire Richard Gagnon. « Capitalisez sur les atouts que vous confère votre petite taille. Vous réagissez plus rapidement; vous êtes plus souples, énumère-t-il. Quand il y a une décision à prendre, je n’ai pas à passer par 52 échelons avant le gros call. Je m’assoie avec mes vice-présidents et mes directeurs. C’est mon comité de gestion. En deux heures, c’est réglé. »

Être petit, c’est moins de coûts, moins de temps. C’est aussi un meilleur service. La satisfaction des conseillers est d’ailleurs la clé pour un petit joueur, estime M. Gagnon. « Les conseillers sont très sensibles à la rapidité du service et à la proximité de l’assureur et de son équipe. Quand il y a des zones grises et des différends, on ne règle pas ça avec le livre des règlements, on y va cas par cas. Si tu te prends pour le gros vice-président important et que tu ne veux pas parler aux conseillers, ça ne marchera pas. »

M. Gagnon n’en démord pas, se rapprocher du réseau rapporte dans une industrie peuplée de concurrents agressifs. La Survivance sonde d’ailleurs régulièrement la satisfaction de ses conseillers. Ce qu’elle entend? « Les conseillers indépendants craignent de devenir captifs de quatre ou cinq grosses compagnies pour lesquelles ils ne seront plus la priorité. Ils sont contents de nous avoir dans le marché et ils veulent qu’on y reste », observe M. Gagnon.