À la Journée de l’assurance de dommages 2018, Réal Jacob a insisté sur la nécessité pour l’industrie de collaborer. Elle le fait sur un chantier depuis 15 ans : l’attraction de la main d’œuvre.

Lors de sa conférence, le professeur titulaire au département d’entrepreneuriat & innovation à HEC Montréal avait recommandé à l’industrie de coopétitionner. Pour lui, l’industrie a tout avantage à regrouper ses forces dans certains domaines où ils n’ont pas les ressources pour développer chacun de leur côté certains outils.

Le Journal de l’assurance a rencontré des administrateurs de la Coalition pour la promotion des professions en assurance de dommages pour discuter de recrutement, mais aussi de leur collaboration au sein de cet organisme. À de nombreuses reprises lors de l’entretien, les administrateurs ont louangé le travail de la Coalition. Au-delà de vanter les mérites de l’organisme, ils ont aussi tenté d’imaginer comment ils attireraient de la main-d’œuvre dans leurs entreprises sans les efforts de la Coalition, étant donné que 3 500 postes seront à combler d’ici deux ans dans l’industrie.

Un courtier a confié au Journal de l’assurance, sous le couvert de l’anonymat, que recruter n’était pas une panacée. « C’est l’enfer ! » dit-il. Il ajoute qu’il lui faut parfois de trois à cinq mois pour pourvoir un poste vacant. Bien souvent, il doit « voler » une ressource chez un concurrent pour trouver la perle rare.

Cette réalité se vit dans toute l’industrie. Carl Dubé, vice-président, ressources humaines, de Desjardins Assurances, souligne que le recrutement en assurance de dommages a ses enjeux, même s’il dit bien se tirer d’affaire comparativement à d’autres industries, considérant aussi que le Québec est en situation de plein emploi. « C’est plus aisé de recruter dans les autres provinces », dit-il.

Patrice Jean, chef de la direction de Lussier Dale Parizeau, souligne que le recrutement est un défi constant. « On réussit néanmoins à pourvoir nos postes. Avec la Coalition, on a créé un pôle d’attraction. C’est important, considérant le changement démographique qui a cours, mais aussi du fait que l’immigration prendra plus de place pour pourvoir nos postes. »

Pour Jean-François Desautels, vice-président principal au Québec, d’Intact Assurance, la qualité des emplois qu’offre l’industrie de l’assurance de dommages demeure méconnue, voire sous-estimée. Ce serait encore pire si ce n’était des efforts de la Coalition, dit-il. « Les occasions de développements sont incroyables dans notre industrie. »

Michel Lacelle, vice-président, services organisationnels pour l’Est du Canada, de l’expert en sinistre IndemniPro, souligne que le recrutement est un travail à temps plein pour son organisation. « On doit démontrer qu’on peut contribuer au développement professionnel des gens. Il faut montrer que notre domaine va bien. La Coalition est un incontournable en ce sens. »

Une meilleure perception des Québécois

Pour les administrateurs réunis lors de notre entretien, le principal fait d’armes de la Coalition est d’avoir amélioré la perception des Québécois face à la profession. En 2006, 40 % des Québécois interrogés lors d’un sondage disaient avoir une impression défavorable face à l’industrie de l’assurance de dommages. Cette proportion a diminué à 23 % en 2017.

« L’industrie a une valeur qu’elle doit faire connaitre dans la société. Elle a une offre de carrière très variée. C’est un volet très important par rapport à ce que chaque société d’assurance peut faire individuellement », dit Jean-François Desautels.

C’est là que la notion de collaboration prend sa force, ajoute Patrice Jean. « La Coalition est une coalition d’industrie. À la base, nous sommes tous des concurrents, particulièrement en ce qui a trait au recrutement », dit-il.

Ce qui n’empêche pas une société d’assurance d’avoir ses stratégies individuelles, dit Carl Dubé. Il souligne toutefois qu’avoir plus d’établissements collégiaux qui offrent des programmes en assurance de dommages aide énormément. « Il y a une décennie, il y en avait 11. Ça a triplé depuis, alors qu’il y en a plus de 30. C’est quelque chose que nous n’aurions pas pu faire individuellement. Aussi, comme les métiers évoluent, on peut faire modifier les programmes en conséquence grâce à cette collaboration. »

Se doter d’une crédibilité

Ce à quoi Jean-François Desautels ajoute que la collaboration de l’industrie au travers de la Coalition a aussi permis à l’industrie de se doter d’une crédibilité auprès du ministère de l’Éducation et des maisons d’enseignements. « Ce n’est pas quelque chose qu’on aurait pu faire chacun de notre côté. On a accès à une voie commune pour faire connaitre nos métiers. On arrive avec un message bien coordonné. Ce n’est pas juste de dire que l’on cherche du monde. Nous avons des statistiques pour appuyer nos dires », dit-il.

M. Desautels se dit convaincu que l’industrie a dorénavant une meilleure perception des métiers que propose l’industrie. « Les gens ont confiance envers notre industrie. Nous avons dépassé le stade de la perception défavorable. Mettre de l’avant une vision d’industrie est beaucoup plus puissant que plusieurs petites actions individuelles. »