Devant les changements à la conformité qui se multiplient, des agents généraux proposent des outils pour s’y retrouver. Parmi les récentes initiatives, un agent général propose une trousse de conformité de 1 300 pages sur clé USB.

La nouvelle trousse de conformité lancée en mai dernier par Pro Vie assurances comporte, entre autres, un manuel de référence, des listes, registres et autres modèles d’application et des documents sur l’ensemble de la règlementation en vigueur dans l’industrie. Pro Vie offre la clé à tous les conseillers, qu’ils transigent ou non avec elle.

Lors du lancement, l’agent général a voulu inciter ses conseillers à utiliser la conformité comme levier dans le développement de leurs affaires, plutôt que de la craindre. Pro Vie estime que sa trousse facilitera la gestion des risques d’affaires du conseiller et améliorera l’efficacité de ses activités de vente. Cela aura pour effet ultime d’augmenter la valeur du bloc d’affaires d’un conseiller, croit le vice-président du développement des affaires de l’agent général, Yves J. Leroux.

Pour M. Leroux, une des façons pour le conseiller d’augmenter la valeur de son bloc d’affaires consiste à se doter d’un plan de continuité des affaires. « L’Autorité des marchés financiers le demande, tant en assurance vie qu’en assurance de dommages, a-t-il dit en entrevue avec le Journal de l’assurance. Le conseiller doit identifier les risques et mettre en place un plan qui assure la continuité en cas d’un évènement majeur qui interromprait le service au client, comme une invalidité, un décès, un incendie, l’inondation des bureaux, un bris informatique ou une perte d’informations, etc. Nous suggérons un modèle de plan avec le guide de l’Autorité sur la clé USB. »

Le conseiller ajoutera de la valeur à son bloc si ce plan est fait correctement, croit M. Leroux. Il en ajoutera aussi s’il améliore sa structure organisationnelle, en se dotant par exemple d’un système informatisé conforme.

« Il est aussi important de mettre ses politiques et procédures par écrit, d’avoir un dossier client écrit, complet et à jour, incluant l’analyse de besoins financiers et son profil d’investisseur », ajoute M. Leroux. Parmi d’autres éléments de valeur ajoutée, il souligne l’importance de segmenter sa clientèle et de maintenir un bon taux de conservation des affaires.

La conformité sera aussi un défi posé par les changements règlementaires en cours, a-t-il rappelé. M. Leroux a fait écho au renforcement des législations en matière de crimes économiques, prévu en 2014, à la lutte à l’évasion fiscale récemment accentuée par Ottawa et à la réforme de la Loi sur la distribution des produits et services financiers, envisagée par le ministre des Finances du Québec.

IFRS des contrats d’assurance


Enfin, les nouvelles normes comptables internationales IFRS 4 sur les contrats d’assurance viendront compliquer le tout, rappelle M. Leroux. Fin juin, l’International Accounting Standards Board a accouché du document final attendu depuis plusieurs années, et qui vient préciser ces normes. Elles pourraient entrer en vigueur dès 2015.

 

PDG de l’agent général Multi Courtage, Guy Duhaime estime pour sa part que la conversion aux nouvelles normes de présentation de l’information financière lui coutera chaque année de 12 000 $ à 13 000 $ en dépenses. En cette première année de présentation des résultats en format IFRS, il lui en coute 25 000 $.

« Il n’y a rien à faire, l’Autorité exige que nous présentions nos résultats de cette façon. On nous demande les mêmes normes de présentation que celles des grandes entreprises. Les comptables perdent leur temps à regarder des choses qui ne sont pas vraiment importantes dans le cours de nos activités », a commenté M. Duhaime.

Le défi de l’utilisation


Malgré le bienfondé d’une trousse de conformité, le défi est de voir la trousse utilisée, plutôt que de finir à l’ombre d’un tiroir. Chez Groupe Financier Horizons – Force financière Excel, la trousse papier lancée il y a quelques années, en collaboration avec Michel Mailloux, fondateur de Mayhew & Associates, n’a pas connu le succès escompté, reconnait le PDG d’Horizons Québec, James McMahon.

 

« Même si nous avons modifié cette trousse en cours de route, nous avons constaté que les conseillers l’utilisaient plus ou moins. Elle n’a pas connu un grand succès auprès d’eux, car ils font plutôt leur conformité avec d’autres outils qu’ils ont sur le marché, comme le profil de l’investisseur, dit-il. Par exemple, les propositions des assureurs intègrent des questions qui touchent le blanchiment d’argent et les comptes étrangers (offshore). »

Pour l’instant, M. Leroux attend de voir. « On peut amener un cheval à la rivière, mais on ne peut pas le forcer à boire. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour faciliter l’utilisation de la trousse. Le conseiller est un travailleur autonome qui doit prendre ses responsabilités et nous lui donnons les outils pour le faire », a-t-il dit en entrevue. Pro Vie offre du coaching et un soutien continu pour l’utilisation de la trousse, a ajouté M. Leroux.

Préparer le conseiller en cas d’inspection demeure une bonne avenue, croit de son côté le vice-président et directeur général du Groupe Cloutier, Michel Kirouac. « Nous aidons nos conseillers en leur fournissant, entre autres, des outils de gestion des plaintes, et pour déterminer ce qui doit ou non être dans leurs dossiers, selon la protection des renseignements confidentiels », dit-il.

Le Groupe Cloutier invite par ailleurs ses conseillers à consulter Info-déonto, un outil de conformité qu’offre à ses membres la Chambre de la sécurité financière, sur son site Internet. « Il y a tout là-dedans », dit M. Kirouac.

Il dit ne pas être chaud à l’idée de trop en faire pour les conseillers en matière de conformité. Il sait que les assureurs aimeraient que les agents généraux surveillent et supervisent les conseillers en matière de conformité, observe-t-il.

« Mais nous ne sommes pas prêts à prendre l’entière responsabilité. Si nous donnons tous les outils possibles à nos conseillers, est-ce que nous endossons des responsabilités qui reviendraient plutôt aux assureurs, alors que nous-mêmes (les agents généraux du Québec) ne sommes pas enchâssés dans la loi? Qui suis-je pour imposer des éléments de conformité à mes conseillers? » M. Kirouac croit que le conseiller pourra bénéficier d’outils utiles, mais devra assurer lui-même sa conformité. À l’origine du projet de Pro Vie, son vice-président, Christian Laroche, croit que la trousse amènera le conseiller à vivre la conformité comme s’il était lui-même un agent général. « C’est un outil d’auto-inspection et de suivi qui lui permettra de se préparer en cas d’inspection », a ajouté M. Laroche. Pro Vie tient à s’assurer de la conformité de toutes les affaires qui transiteront par son bureau. M. Laroche a expliqué que son cabinet souhaite prendre de l’avance sur la règlementation à venir, qui visera les agents généraux.