Président d'un consolidateur pancanadien qui traite avec plus de 20 fournisseurs, John Hamilton n'en peut plus de manipuler du papier. Le président du Groupe Financier Horizons a exprimé son ras-le-bol lors d'une présentation au Canadian Life Insurance Electronic Data Interchange Standards (CLIEDIS). Son message aux assureurs est clair : « Nous sommes vraiment en colère et nous ne voulons plus de paperasse. »Malgré tous les progrès technologiques qui ont été réalisés depuis les trente dernières années, M. Hamilton, dont l'entreprise est établie à Kitchener, en Ontario, ne peut croire que l'industrie de l'assurance vie a si peu changé, s'est-il indigné lors de l'événement qui s'est déroulé à Toronto le 1er mai.

À ses débuts dans l'industrie, agents et conseillers indépendants remplissaient des propositions en version papier. « Ce qui est insensé, c'est que nous le faisons encore, dit-il. Vous ne pouviez pas comprendre mon écriture dans ce temps-là, et vous ne le pouvez toujours pas aujourd'hui. »

L'utilisation continue de documents en version papier, le manque d'uniformité et l'incapacité des assureurs de partager leurs données électroniques compliquent inutilement le travail des agents généraux, explique M. Hamilton.

Entrée de données à la main

Les agents généraux offrent un large éventail de produits et traitent avec de nombreux fournisseurs. Un client peut à lui seul facilement compter quatre ou cinq dossiers, souligne M. Hamilton. Un dossier pour un certificat de placement garanti, un pour un compte de fonds distincts, un autre pour une police d'assurance contre les maladies graves et encore un pour un contrat d'assurance-vie.

Groupe Financier Horizons détient plus de 70 000 dossiers clients. Si on ajoute la totalité des différentes transactions pour chaque client, son cabinet gère actuellement plus d'un million de dossiers. « Pour le moment, nous devons entrer manuellement tout ce qui ne se trouve pas sur FundSERV, dit-il. Mon bureau de Kitchener compte deux employés et demi dont le travail consiste uniquement à entrer les commissions chaque jour. »

Il ajoute que ces employés vont sur le site Web des assureurs pour rechercher de l'information sur les commissions, qu'ils doivent même parfois l'imprimer et qu'ils doivent ensuite entrer ces informations dans le système. « Imaginez comme c'est ridicule, » dit-il, en s'adressant aux représentants des compagnies d'assurance présents dans la salle. « Vous possédez les renseignements dans vos ordinateurs, mais vous ne nous les donnez pas. »

M. Hamilton est également frustré par l'absence de partage de renseignements en ce qui a trait aux contrats de courtage. Si un conseiller quitte un agent général pour se joindre à Horizons, par exemple, le cabinet doit remplir un formulaire pour l'assureur. Or, l'assureur possède déjà un dossier sur ce conseiller, déplore M. Hamilton. « Que pouvons-nous bien vous dire de plus? Vous avez fait affaire avec cette personne plus longtemps que nous. »

Données informatisées

Les agents généraux pourraient aussi retourner des données informatisées à l'assureur s'il était équipé pour les recevoir. L'agent général a une grande quantité de renseignements dans le dossier client pour un assureur donné : nom, âge, adresse... Mais si ce client achète quelque chose d'un autre assureur, aucun mécanisme ne permet alors aux agents généraux de remplir automatiquement une proposition électronique avec les données dont ils disposent déjà dans le dossier. Tous ces renseignements doivent être à nouveau inscrits dans un autre formulaire pour chaque nouveau fournisseur.

« Nous vous les donnerions, mais vous ne nous laisseriez pas le faire », continue-t-il. M. Hamilton se plaint du fait que certains assureurs obligent l'agent général à imprimer ces données à part de la proposition et à leur soumettre par télécopieur ou en version papier. « Nous possédons tous les données; pourquoi ne pas les partager? »

M. Hamilton s'est montré surpris des résultats de sondages présentés à la même réunion du groupe CLIEDIS. Ces résultats ont révélé que certains assureurs ne considèrent pas le partage de données comme une priorité. « D'une certaine manière, le message ne s'est pas rendu jusqu'à vous puisque vous ne savez pas en quoi consiste notre travail, » dit-il.

Économies potentielles

Combien coûte toute cette paperasse? En supposant qu'une centaine d'agents généraux paient chacun 2,5 employés au salaire de 30 000 $ pour traiter la paperasse, le réseau pourrait économiser 7,5 M$ en traitant plus efficacement les données, calcule M. Hamilton.

Outre les économies, les agents généraux pourraient réaffecter le personnel ainsi libéré afin qu'ils aident les conseillers à travailler plus efficacement. Les assureurs verraient pour leur part leurs ventes augmenter considérablement. M. Hamilton propose également que les ressources dégagées servent plutôt à recruter et à former de nouveaux conseillers. « Nous savons tous que nous avons un problème de relève, commente-t-il. C'est ce que nous commencerons par régler. Mais vous devez nous aider. »

Terrain d'entente

Les gens des compagnies d'assurance disent parfois que les agents généraux ne s'entendent pas et ne s'aiment pas entre eux. M. Hamilton estime que c'est faux. « On peut compter dix-sept agents généraux aujourd'hui dans cette salle, dit-il. Nous sommes ici parce que nous croyons que c'est le moment d'agir. Bien sûr, nous sommes en compétition, mais nous voyons à plus grande échelle. »

Il estime qu'une partie du problème réside dans le fait qu'il y a plus de trois cents agents généraux au Canada. Selon les sondages présentés lors la rencontre, bon nombre de ces petits cabinets se disent non intéressés intéressés aux propositions électroniques et au partage des données, simplement parce qu'ils n'ont pas les ressources nécessaires pour le faire.

Mais M. Hamilton propose que les assureurs se concentrent malgré tout sur les besoins des plus grands agents généraux qui produisent la plus grande part de leurs affaires. « Il est temps que vous arrêtiez de les écouter et que vous commenciez à nous écouter, conclut-il. Nous représentons le futur. Nous sommes ceux qui seront là à long terme. »