Les polices d’assurance maladies graves permanentes ont connu une forte croissance en 2009 par rapport à 2008. Elles ont surpassé la croissance des polices temporaires, pressenties l’an dernier comme la future avenue de croissance du marché. Les Canadiens semblent ainsi reconnaitre de plus en plus l’utilité du produit, ce qui constitue un bon signe pour ce marché, croient plusieurs intervenants interrogés par le Journal de l’assurance.Des agents généraux notent une forte croissance des ventes dans leurs produits de prestations du vivant. La croissance est aussi soutenue pour le produit d'assurance maladies graves, disent-ils. Les ventes stagnantes qui ont suivi le resserrement de la tarification opéré par les réassureurs en 2004 semblent bel et bien appartenir au passé.

Le dernier sondage de LIMRA International le confirme. Les ventes de primes annualisées en assurance maladies graves ont crû de 9 % au Canada en 2009 par rapport à 2008. Le nombre de polices vendues a quant à lui augmenté de 2 % durant cette même période. C'est ce qu'indique le rapport Canadian Individual Critical Illness Insurance, Annual 2009.* Toujours selon ce rapport, les ventes d'assurance maladies graves ont atteint une somme de 90,6 millions de dollars (M$) en primes annualisées. Près de 90 000 polices ont ainsi été vendues en 2009 au Canada.

Selon LIMRA, quatre des cinq principaux fournisseurs d'assurance maladies graves ont connu une croissance de leurs primes annualisées de maladies graves en 2009. De plus, la moitié des fournisseurs recensés par LIMRA ont connu une telle croissance.

Le rapport de LIMRA indique aussi que ce sont les produits d'assurance maladies graves permanents qui ont connu la plus forte croissance de leurs primes entre 2008 et 2009, soit 19 %. Il s'est aussi vendu 11 % de plus de ces polices en 2009 qu'en 2008.

Le produit permanent a aussi été le seul à accroitre sa part des nouvelles ventes totales en termes de primes annualisées. En 2008, les ventes du produit permanent représentaient 32 % des nouvelles primes vendues. En 2009, cette part de marché est passée à 37 %. Cette augmentation s'est faite au détriment des produits temporaires, dont la part de nouvelles primes vendues est passée de 26 % en 2008 à 21 % en 2009.

La part du lion des ventes revient au produit à prime nivelée et à période de couverture limitée à 65 ans ou à 75 ans. Il a accaparé 42 % des ventes de nouvelles primes d'assurance maladies graves en 2009.

L'an passé, la majorité des intervenants interrogés par le Journal de l'assurance prédisaient que le produit temporaire serait la future avenue de croissance de ce marché. De toute évidence, le produit permanent lui a damé le pion.

L'assurance maladies graves compte pour 15 % des ventes totales en assurance de personnes que réalise Desjardins Sécurité financière (DSF) par l'entremise de ses réseaux indépendants : SFL, partenaires de Desjardins Sécurité financière et Desjardins Financial Security Independent Network. Plus de la moitié de ces ventes est constituée de produits de maladies graves permanents, révèle Nathalie Tremblay, chef d'équipe, prestations du vivant et assurance vie, chez DSF. « Le besoin que couvre l'assurance maladies graves est plus permanent que celui que couvre l'assurance vie », explique Mme Tremblay.

Même avec ses moyens limités, la jeune famille tendra vers le produit permanent si elle en a les moyens, croit-elle. À ses débuts, une famille type souscrira souvent un minimum d'assurance vie permanente et complètera ses besoins de couverture avec de l'assurance temporaire moins couteuse. En maladies graves, la perception est tout autre, ajoute Mme Tremblay.

Choix par compromis

« On ne souscrira pas 100 000$ d'assurance maladies graves en pensant n'en avoir besoin que dans les dix prochaines années. En cas de maladie grave, qui peut prédire avoir plus besoin d'argent à 35 ans qu'à 65 ans? », dit-elle.

Le client du marché à revenu moyen choisira souvent une police temporaire par compromis budgétaire, croit Mme Tremblay. Dans ce cas, il transformera sa protection en couverture permanente aussitôt qu'il en aura les moyens.

Great-West et Canada-Vie ont aussi connu une croissance importante de leurs ventes de produits permanents en assurance maladies graves en 2009 et la tendance se poursuit au premier trimestre de 2010. « Le produit permanent est plus couteux que le temporaire, mais plusieurs conseillers et clients ont opté pour le premier, car les gens vivent de plus en plus longtemps. Le risque de maladies augmente lorsque l'on dépasse la durée des polices traditionnelles, limitée à 65 ou 75 ans », soulève Darlene Baschuk, vice-présidente, marketing en prestations du vivant.

Pour sa part, la Financière Manuvie s'attendait à une plus forte croissance du côté des produits temporaires ou de durée limitée, surtout en 2009. En cette période de crise, le revenu disponible des Canadiens a été plus que jamais restreint. Les produits permanents ont malgré tout connu une plus forte croissance de leurs primes annualisées que leur contrepartie temporaire, dit John Parker, vice-président adjoint aux produits et au marketing, prestations du vivant en assurance individuelle.

Il attribue cette croissance au fait que la prime du produit permanent est beaucoup plus élevée. « L'assurance temporaire poursuit aussi sa croissance. Le prix demeure une barrière pour plusieurs clients potentiels en maladies graves. La temporaire dix ans (T10) est extrêmement abordable et recueille toujours le plus grand nombre de nos polices en maladies graves. L'an passé, nous avons vendu plus de polices temporaires que de polices permanentes et de durée limitée réunies en termes de nombre de polices. »

M. Parker affirme qu'il est difficile de comparer deux produits à partir des primes vendues. Le produit permanent fait meilleure figure que les autres en termes de primes annualisées parce qu'il coute en moyenne de trois à quatre fois plus cher que la T10, souligne M. Parker.

Une autre raison pour cette croissance, poursuit-il, est l'intégration de la garantie de soins de longue durée SoinsVie à tous les produits de maladies graves de Manuvie à l'automne 2008. Le succès de cette approche ne s'est pas démenti en 2009. « Cela incite davantage les assurés à garder leur police maladies graves pour la vie plutôt que jusqu'à la retraite », observe-t-il.

Dernier recours

Chez Great-West et Canada-Vie, Darlene Baschuk souligne la vigueur du produit temporaire malgré la supériorité que confèrent les données de LIMRA au produit permanent. « Les polices temporaires et de durée limitée continuent de mener la croissance de nos produits de maladies graves. Les jeunes familles sont souvent déjà couvertes en assurance vie et invalidité, ainsi que pour les dépenses d'études des enfants. Les produits temporaires et limitée de maladies graves procurent à ces clients à revenus moyens, et sensibles aux couts, un revenu clé dans le cas de l'apparition hâtive d'une maladie grave », estime Mme Baschuk.

Pour sa part, La Capitale assurances et gestion du patrimoine fait une large place aux produits temporaire et à durée limitée dans ses activités de maladies graves. La mutuelle vise le marché de masse, à qui ces produits conviennent souvent mieux. « Un client pourra souscrire 115 000$ d'assurance à 75 ans au même prix qu'une assurance permanente de 100 000$ », affirme Kim Oliphant, directrice des ventes, Ouest du Québec et provinces atlantiques, réseau des agents généraux. Elle tient à faire une distinction entre le permanent et les polices limitées à 75 ans. « Pour le même prix, avec l'avenant de remboursement des primes, j'aurai par exemple un capital assuré de 115 000$ pour le produit à 75 ans, contre 100 000$ pour le produit permanent », dit-elle.

Son exemple porte sur un produit pour lequel l'assuré a souscrit à l'option de remboursement des primes à l'échéance. Par la voix de ses conseillers, Mme Oliphant a appris que les assurés, en vertu d'un produit permanent avec remboursement des primes, ne conservent habituellement pas leur assurance au-delà de 75 ans. Ils choisissent d'annuler la police pour toucher le remboursement. « À cet âge, le remboursement des primes atteint facilement 80 % à 85 % du capital assuré », mentionne Mme Oliphant.

Pour sa part, Stéphane Beaumier croit que le produit temporaire sera avantageux ou non selon l'âge de l'assuré. « Nous positionnons le temporaire comme un produit de moindre cout. Le produit demeure tout de même cher pour des assurés de 65-70 ans », signale le vice-président pour l'Ouest du Québec de la Financière Sun Life.

Or, plusieurs clients sont prêts à payer le prix pour s'offrir une couverture contre le risque de maladies graves, dit-il. Il en veut pour preuve les résultats positifs de la compagnie malgré les surprimes qui sont fréquentes dans ce marché.

« Il y a peu de refus en assurance maladies graves parce qu'avec les années, les conseillers ont appris à faire une meilleure présélection des risques. Dans notre cas, nous observons peu de refus, mais de 18% à 19% de nos clients doivent payer une surprime. Nous réussissons à placer une grande proportion de ces contrats surprimés parce que les clients ne s'arrêtent pas au prix, mais au besoin », précise M. Beaumier.

Sun Life a réalisé 19 % de ses ventes d'assurance totale en maladies graves en 2009. Cette proportion est en croissance par rapport à 2008, dit M. Beaumier, et frise les 20 % depuis le début de 2010. Les produits d'assurance maladies graves permanents destinés aux entreprises comptent pour beaucoup dans cette croissance, laisse-t-il entendre.

Plusieurs autres compagnies ont connu du succès en 2009 dans le marché de l'assurance maladies graves. Parmi les principaux, l'Industrielle Alliance, Assurances et services financiers, révèle dans son rapport annuel 2009 avoir connu une croissance de 17 % en assurance maladie et invalidité.

Cette hausse s'explique principalement par la forte progression des ventes de sa filiale L'Excellence, Compagnie d'assurance vie, une société spécialisée en assurance maladie et invalidité, de même que par la popularité du produit d'assurance en cas de maladie grave, écrit l'assureur dans son rapport de gestion. En 2009, l'Industrielle Alliance a réalisé 15 % de ses ventes totales d'assurance de personnes individuelle dans la catégorie maladie et invalidité.

*Les résultats sur la croissance des ventes d'assurance maladies graves fournis par LIMRA excluent les ventes directes : celles-ci n'étaient pas compilées avant 2009.