À ce jour, la Financière Manuvie a développé plutôt discrètement son réseau des conseillers indépendants au Québec. Ce ne sera plus le cas en 2014, alors que l’assureur s’efforcera de sortir ce réseau de l’ombre, sous l’égide de sa nouvelle Division Services Conseils. Il tentera aussi d’augmenter la proportion de ses conseillers indépendants actifs à la fois en vie et en placements.Les conseillers du réseau indépendant sont généralement de gros producteurs demeurés fidèles à Manuvie depuis des lustres. La plupart y concentrent l’essentiel de leurs affaires. L’assureur continuera de les traiter aux petits ognons et de faciliter leur relève, mais il souhaite aussi attirer de nouveaux conseillers, surtout au Québec. André Vaillancourt vient d’être nommé directeur général, Québec de la Division Services Conseils créée en mai dernier, pour aider à déployer cette stratégie.

Manuvie a créé cette division pour chapeauter ses efforts sur deux réseaux : celui des conseillers indépendants et celui de Placements Manuvie, sa filiale de distribution de fonds communs. Ces réseaux constitueront le cœur de Division Services Conseils et les conseillers de chacun d’entre eux seront appelés à travailler plus étroitement avec leur vis-à-vis.

De plus, les conseillers indépendants seront intégrés à l’agent général de Manuvie, Manulife Securities Insurance. Les conseillers auront accès à tous les fournisseurs par l’entremise de cet agent général, et pas seulement à Manuvie. « Nous en sommes à voir comment intégrer les conseillers indépendants dans cette entité, laquelle changera de nom », a révélé M. Vaillancourt en entrevue au Journal de l’assurance.

Dans cette foulée, le nom Réseau des conseillers indépendants disparaitra pour faire place à celui de la nouvelle division, a-t-il ajouté. « Nous le remplacerons par un nom qui reflète mieux le rôle de soutien et de services de Division Services Conseils, mais aucune décision ne sera prise avant que nous complétions l’intégration à notre agent général. »

Le Québec est dans la mire de Manuvie en raison d’un potentiel inexploité. « Nous avons commencé à recentrer les activités du réseau indépendant sous le nom de Division Services Conseils, mais nous n’avons pas fait beaucoup de tapage, jusqu’à maintenant, a déclaré M. Vaillancourt. Le réseau indépendant de Manuvie est sous-représenté au Québec. Nous voulons dorénavant faire voir le logo de la Financière Manuvie plus souvent. Il est plus visible ailleurs au Canada, surtout en Ontario. Nous négocions avec des cabinets pour qu’ils le mettent davantage de l’avant. »

Peu après son arrivée à la barre du réseau indépendant, il y a trois ans et demi, M. Vaillancourt a contribué à départager les conseillers à qui convient l’offre de services du réseau de ceux qui seraient mieux servis par un agent général. Après ce « ménage », le Québec est apparu comme une région à fort potentiel.

« Nous avons accentué le recrutement à partir de 2012 et, cette année-là, nous avons recruté quatre fois moins que l’Ontario, mais chacun a produit en moyenne deux fois le volume de primes en assurance de personnes que les conseillers ontariens. » Le Québec compte un peu plus de 400 de ces conseillers indépendants.

Si le Québec fait l’objet d’une attention particulière, la stratégie derrière Division Services Conseils revêt un important aspect pancanadien : celui d’amener les conseillers en assurance à faire plus de placements, et vice-versa, a confié M. Vaillancourt. « Il faut voir les conseillers de nos deux réseaux comme deux ensembles. Pour le moment, environ le quart de nos conseillers indépendants sont actifs à la fois dans l’un et l’autre. Nous voulons agrandir cette intersection », dit-il.

Concurrence aux MGA?

Le réseau indépendant représente un groupe d’élite pour Manuvie. Ses privilèges portent-ils ombrage aux MGA? M. Vaillancourt reconnait que des agents généraux ont été quelque peu dérangés au début par les efforts consacrés par Manuvie à son réseau indépendant.

« C’est sûr que si Manulife Securities Insurance était un agent général indépendant, il serait le plus gros de Manuvie. Mais la stratégie derrière Division Services Conseils n’enlève rien à la valeur d’un MGA. Nous voulons avant tout faire savoir aux conseillers que nous leur offrons un choix en matière de soutien. Plusieurs conseillers seront toujours mieux servis auprès d’un agent général. Nous recherchons de notre côté des indépendants qui ont déjà tous leurs services administratifs. »

L’équipe que dirige M. Vaillancourt se consacre d’ailleurs à aider non seulement les conseillers du réseau indépendant, mais aussi leur personnel. « Certains ont jusqu’à dix employés. Les adjointes administratives se sentent parfois isolées. Nous leur permettons de se regrouper et de se rencontrer régulièrement. »

Les conseillers du réseau indépendant produisent 30 % de toutes les affaires d’assurance de personnes de la Financière Manuvie, mais ne comptent que pour 5 % de ses conseillers, dit M. Vaillancourt. « Recrutement ou non, nous n’augmenterons pas cette proportion à 10 % ou 15 % », a-t-il ajouté.

Les avantages des conseillers indépendants demeurent indéniables. Ils peuvent accéder directement au service de réclamation, à celui des nouvelles affaires et à la tarification. Ils bénéficient de conseils et de soutien en matière de technologie et de conformité des affaires. « Le conseiller pourra profiter d’inspections préventives et de modèles de conformité pour s’assurer d’avoir tous les outils en main s’il devait faire face à l’Autorité des marchés financiers. »

Division Services Conseils aidera aussi les conseillers à se servir des réseaux sociaux « de la bonne façon, pour promouvoir leur cabinet et les services qu’ils offrent », a mentionné M. Vaillancourt. Le conseiller pourra accéder à une plateforme qui lui permet de créer un site Internet sur lequel il est exclusivement identifié (avec photo et raison sociale) et de retracer le passage des clients. Depuis fin octobre, le réseau est en mesure d’approuver la conformité de tout texte publié sur le site dans un délai de 48 heures.

Programmes incitatifs réservés

Des programmes incitatifs sont réservés aux conseillers de cette division. Les conseillers pourront notamment recevoir des dollars markéting en fonction de leur volume, et ceux-ci pourront servir entre autres à organiser des évènements. S’ils y invitent Manuvie, ils recevront le double des dollars. La division offre aussi à ses conseillers des blocs d’affaires en suspens. « Nous avons une immense banque de clients orphelins et nous aiderons les conseillers à servir cette clientèle existante », a souligné M. Vaillancourt.

Le réseau n’accepte pas de « vertes recrues », sauf les enfants des conseillers existants. Il offre d’ailleurs un programme d’aide à la relève. Le réseau entend aussi faciliter l’acquisition de blocs d’affaires grâce à du financement, notamment de la Banque Manuvie, explique M. Vaillancourt.

La plupart des services offerts sont payants, mais le réseau les offrira souvent à prix réduit, selon le volume du conseiller ou parce qu’il obtient lui-même un rabais auprès du fournisseur en raison d’un achat regroupé. Par exemple, un cours de gestion importé des États-Unis et qui coute là-bas environ 25 000 $ leur est offert à 2 500 $, a confié M. Vaillancourt.

N’a pas tous les services qui veut. M. Vaillancourt a précisé que le soutien offert par Division Services Conseils s’articulera autour de trois volets : appui total, appui intermédiaire et appui équivalent à celui qu’obtiendrait le même conseiller auprès d’un MGA. Tout est question de volume.

Manuvie se montre toutefois flexible. Si le conseiller en assurance vie doit officiellement placer un minimum de 30 000 $ par an en assurance vie, sous forme de commissions de première année, M. Vaillancourt évaluera au cas par cas le potentiel de celui qui ne satisfait pas ce critère. « Nous douterons qu’un conseiller qui a généré 30 000 $ de commissions de première année l’an dernier avec deux ou trois fournisseurs puisse atteindre ce seuil cette année pour nous. S’il en a plutôt généré 100 000 $, nous avons de bonnes chances qu’il en fasse 30 000 $ avec nous. »

Un conseiller pourra ne vendre que des produits d’assurance de personnes de Financière Manuvie ou que des produits de placement d’Investissements Manuvie. Pour ceux qui ne font que du placement, Manuvie exige un bloc d’affaires de 15 millions de dollars et plus. Il arrive que des conseillers ne remplissent ni le critère vie ni le critère placements, mais auront du potentiel, car Manuvie peut les regrouper et les aider à développer un volume suffisant, a ajouté M. Vaillancourt.