S’il n’en tenait qu’à la Coalition pour la promotion des professions en assurance de dommages, il ne serait plus possible d’accéder à la profession en détenant uniquement un secondaire V et trois ans d’expérience de travail. L’organisme compte ainsi aller chercher un consensus dans l’industrie pour faire disparaitre cette règle et ensuite demander aux régulateurs de l’abolir purement et simplement.

Le président et chef de la direction de la Coalition, Robert LaGarde, affirme que cette règle nuit à l’image de la profession. Pire encore, dit-il, les conseillers à l’emploi d’Emploi-Québec dirigent les candidats intéressés par une carrière en assurance de dommages vers cette voie rapide, plutôt que les inciter à suivre une formation collégiale dans le domaine. Cet état de fait vient d’une directive émise par Emploi-Québec, qui souhaite trouver rapidement un emploi aux personnes en recherchant un, a confié M. LaGarde en entrevue au Journal de l’assurance.

« Qu’un plongeur dans un restaurant qui a trois ans d’expérience et un secondaire V puisse aller passer ses examens à l’Autorité des marchés financiers est un frein à l’entrée en carrière, ajoute M. LaGarde. Ce n’est pas en faisant passer un examen à choix multiples qu’on forme des gens qualifiés et qu’ils peuvent acquérir des compétences. »

M. LaGarde fait d’ailleurs remarquer que lorsqu’il dirigeait Dale Parizeau, il n’embauchait que des candidats qui avaient une formation universitaire. « Il nous faut avoir des gens fiers de leur profession », dit-il.

Le président et chef de la direction ajoute que ce fast track a aussi un impact dans les programmes d’attestations d’études collégiales (AEC) et de diplôme d’études collégiales (DEC). « On voit des étudiants commencer leur formation, puis l’abandonner au bout de trois mois pour aller passer directement l’examen. Ils bloquent les gens qui sont en attente d’une place en faisant cela. C’est pourquoi on veut faire enlever cela », dit M. LaGarde.

La Coalition dit avoir l’appui des employeurs

Qu’en pensent les employeurs en assurance de dommages? M. LaGarde se dit convaincu que la Coalition aura leur appui. Il en tient pour preuve les résultats d’un sondage que la Coalition effectue aux deux ans et dans lequel elle demande ce qu’ils recherchent comme critères d’embauche. Ainsi 34 % d’entre eux exigent l’AEC, puis 31 % demandent un DEC. On retrouve 8 % des employeurs qui demandent une formation universitaire, contre 6 % qui n’exigent que le secondaire V.

Il rappelle aussi que les membres du conseil d’administration de la Coalition sont de hauts dirigeants, ce qui l’aidera dans sa recherche d’appuis. « Certains dirigeants de cabinets aiment aussi avoir une adéquation entre le nombre d’employés qui ont un AEC par rapport à un DEC. Ils me disent aussi qu’ils n’emploient pas de gens au secondaire », dit-il.

Fort de ses arguments, M. Lagarde a rencontré Eric Stevenson, surintendant de l’assistance aux clientèles et de l’encadrement de la distribution à l’Autorité des marchés financiers, pour lui demander d’exclure la possibilité de passer l’examen menant au permis, simplement avec un secondaire V et trois ans d’expérience sur le marché de l’emploi. Le président et chef de la direction de la Coalition affirme que M. Stevenson lui a demandé d’obtenir le consensus de l’industrie sur cette question et que cet accès serait enlevé.

La Coalition a préparé un plan de communication pour convaincre l’industrie d’arriver à ce consensus. Celui-ci a été finalisé en octobre et compte une trentaine de pages. M. LaGarde compte ainsi prendre le bâton de pèlerin pour rencontrer les différents organismes de l’industrie et les convaincre du bien-fondé de rehausser les critères d’admission à la profession.

M. LaGarde prévoit notamment rencontrer les dirigeants du Regroupement des cabinets de courtage d’assurance du Québec (RCCAQ), du Bureau d’assurance du Canada (BAC), de l’Institut d’assurance de dommages du Québec (IADQ), de la Corporation des assureurs de dommages directs du Québec (CADD), et de l’Association des experts en sinistre indépendants du Québec (AESIQ).

Revaloriser le profession

Enlever cet accès permettrait aussi de revaloriser la profession, croit M. LaGarde. « Le plongeur avec trois ans d’expérience laissera rapidement la profession s’il ne l’aime pas. Mais s’il a fait son DEC ou son AEC, il va y penser à deux fois », croit-il.

À la place, la Coalition rappelle qu’il existe un programme de reconnaissance des acquis et des compétences (RAC). « Plusieurs personnes œuvrant dans l’industrie ont les connaissances, mais n’ont pas les qualifications pour devenir des représentants certifiés. Des maisons d’enseignement ont développé un programme de reconnaissance de dix compétences pour aider ces gens à obtenir leur permis, grâce à des cours à distance et du mentorat. On leur donne un AEC à la suite de cela. Ces personnes n’ont pas besoin d’arrêter de travailler pour suivre leur formation. C’est une réalité que les cabinets ne connaissent pas », dit M. Lagarde.

Efforts des collèges

M. Lagarde souligne aussi que les établissements collégiaux font des efforts pour faire connaitre la profession. Il donne en exemple le Cégep de Sainte-Foy, qui avec sept commissions scolaires, fait découvrir les professions en assurance de dommages à des jeunes de secondaire III et IV. Leurs efforts portent des fruits. Le Cégep de Sainte-Foy accueille habituellement 30 étudiants dans son programme de DEC. En septembre, elle en a accueilli 100, révèle M. LaGarde.

Outre le Cégep de Sainte-Foy, certains DEC ont aussi connu de fortes hausses d’inscription. Le DEC du Cégep de Lanaudière, offert à L’Assomption, était en difficultés. Il a toutefois eu 40 inscriptions au final. Au Cégep Montmorency, à Laval, on parle de 65 inscriptions. Au total, au 1er mars 2015, les programmes de DEC au Québec ont enregistré une hausse des inscriptions de 264 % par rapport au 1er mars 2014, a révélé la Coalition au Journal de l’assurance.

« On doit pourvoir 1 812 postes dans l’industrie l’an prochain. Or l’industrie bon an mal an 1 400 certifiés par année. On parle d’une inadéquation de 400 personnes pour l’an prochain. Quand la Coalition a vu le jour en 2002, il y avait 11 collèges qui offraient une formation en assurance de dommages. Aujourd’hui, il y en a 30, dont 7 qui offrent le DEC. On croit donc qu’on peut contribuer à pourvoir ces postes avec des gens formés », dit M. LaGarde.