L’entrepreneur Jonathan Boucher, de Domely Technologies, a remporté le grand prix de 10 000 $ lors du concours de pitch présenté à InsurTech Québec, le 7 avril dernier. 

Lors de sa présentation faite en matinée devant un parterre de sept membres du jury, M. Boucher a rappelé que les dommages causés aux toitures coûtent des milliards de dollars (G$) chaque année aux assureurs en raison du poids de la neige, de la glace ou de la pluie.

Seulement en 2020, ce sont plus de 21 G$ qui auraient été payés en raison des dommages aux immeubles à la suite des sinistres climatiques, selon M. Boucher, actuaire de formation. La facture reliée à ce type de sinistres liés au climat double tous les cinq ans depuis les années 1980, ajoute-t-il. 

L’alerte du printemps 2019 

Au printemps 2019, tous les assureurs ont été débordés par les réclamations pour des effondrements causés par le poids de la neige. Tous les immeubles sont dotés d’un système de protection contre les incendies, rappelle l’entrepreneur. Après ce désastreux printemps, il a estimé qu’il était temps de créer un système de surveillance des toitures et d’améliorer la prévention concernant ce type de dommages. 

L’équipe de Domely est composée d’experts en assurance, en intelligence artificielle et en mécanique de bâtiments. Le développement a été fait dans le cadre d’un projet de maîtrise à l’université et le produit est en instance d’être breveté. 

Son produit sert à détecter le volume de précipitations accumulé sur le toit. Le système est monté sur un pilier qu’il suffit de déposer sur la toiture. Il n’est pas nécessaire de percer des trous pour le fixer grâce au poids de la base autoportante. Le dôme n’a pas non plus besoin d’une connexion WiFi ni d’une alimentation électrique. 

Les capteurs du dôme servent à déterminer le volume de neige. Le système envoie des alertes au propriétaire immobilier. La vision à 360° de la toiture fait partie de l’ensemble. On peut s’en servir aussi pour détecter les bris à la toiture ou autres pièces qui peuvent entraîner un dégât d’eau. 

Le matériel physique est loué, tandis que le volet alerte est offert par abonnement mensuel. L’entreprise veut offrir aux assureurs une analyse détaillée des risques, lequel inclut le volet Deep Snow, qui assure une veille stratégique des précipitations prévues par les données météorologiques.

L’assureur peut ainsi suggérer le déneigement préventif lorsque la situation le requiert. « Ça permet à la fois de limiter les dégâts et donne à l’assureur l’occasion d’interagir de manière bienveillante et préventive auprès de son client », explique-t-il. 

Le système Domely Connect cible d’abord les assureurs, mais aussi les gestionnaires individuels et commerciaux de parcs immobiliers. La pénurie de main-d’œuvre est un argument de vente supplémentaire, car les clients peuvent utiliser leurs ressources humaines à d’autres tâches que de grimper sur des toitures pour en faire l’inspection. 

« De l’autre côté, nous sommes aussi confrontés à la même pénurie de personnel, alors le défi est là pour nous aussi », dit-il. La bourse lui permettrait d’accélérer la production, car le coût des pièces électroniques ne cesse d’augmenter en raison de la forte demande. 

M. Boucher veut aussi améliorer l’interface entre le système de détection et les technologies utilisées tant chez les courtiers que les assureurs. Il souhaite établir un partenariat avec un facilitateur comme la firme conseil GFT pour l’aider à intégrer son système sur une plateforme comme Guidewire

Chez Domely, on pense que la technologie de capteurs développée par Domely pourrait être installée dans tous les systèmes de caméras de surveillance. 

Jonathan Boucher vise à installer 1 000 systèmes de détection d’ici trois ans. Une firme spécialisée en inspection de bâtiments est déjà partenaire de l’entreprise et s’occupe de distribuer son matériel par l’entremise de son propre réseau qui compte une centaine de points de service.

Interrogé sur la confidentialité des données, il souligne que son système ne fait que transmettre alerte reliée à l’adresse sur la façade de l’immeuble où le problème est détecté. « Nous conservons la propriété des données, lesquelles sont accessibles aux assureurs et aux clients, qui donnent leur consentement. Mais à moins de mener des activités louches sur le toit, il n’y a rien de confidentiel dans le fait de prendre une image de la toiture », explique-t-il. 

En plus du 1er prix de 10 000 $, M. Boucher reçoit aussi un accompagnement de six mois, d’une valeur de 1 500 $, avec l’incubateur d’entreprises LE CAMP. 

Autres récompenses 

D’autres prix ont été remis dans le cadre du concours de pitch. Le deuxième prix, d’une valeur de 2 000 $, a été remis à Michel Bourque, président de Cyberdefense.AI. Selon cet entrepreneur, les systèmes actuels ne sont pas conçus pour les PME.

La cybercriminalité est devenue le risque le plus important en 2022, ajoute-t-il. Le système de la startup permet de remonter le niveau de sécurité des entreprises, ce qui réduit le risque pour les assureurs. La technologie développée par l’entreprise s’installe aisément en quelques minutes. 

M. Bourque rappelle que de nombreux sites du gouvernement du Québec ont été paralysés par une panne informatique à la fin de 2021. Depuis, le ministère des Finances utilise son système de détection et de pare-feu. 

Le prix coup de cœur d’une valeur de 1 500 $, décerné grâce à un vote auquel pouvaient participer les personnes inscrites à InsurTech Québec, a été accordé à Martin Lavoie, président d’InsurLoop. Ce dernier se mérite aussi un accompagnement d’un an par l’entremise du Réseau Mentorat, dont la valeur est estimée à 750 $. 

La plateforme développée par M. Lavoie veut aider les courtiers en assurance de personnes et les représentants autonomes à offrir des produits d’assurance sans l’aide d’un conseiller en sécurité financière, tout en étant conformes aux règles implantées par l’Autorité des marchés financiers en 2019 sur les modes alternatifs de distribution. 

La plateforme d’InsurLoop permet au consommateur de se procurer une police entièrement en mode numérique, en fournissant les données requises par l’analyse des besoins financiers. « Nous voulons démocratiser l’offre au Québec », dit-il.

M. Lavoie, qui compte plus de 20 ans d’expérience comme conseiller et planificateur financier, affirme qu’une telle solution accessible aux cabinets indépendants et aux représentants autonomes n’existe pas ailleurs dans le marché.

Il espère commercialiser son produit d’ici la fin de l’année, sinon au premier trimestre de 2023. La plateforme permet de comparer les produits de différents assureurs, mais elle pourrait aussi être utilisée par l’assureur qui possède sa propre force de vente. 

Chacune des quatre jeunes pousses qui a fait sa présentation au concours de pitch a reçu un prix de participation de 1 000 $. Le quatrième participant était Jean Richard Nkounga Zukam, vice-président de Truvok, entreprise implantée au Cameroun. Son promoteur a fait sa présentation à distance.