Après avoir conclu une entente d’acquisition avec Fiducie M.R.S. et une autre de distribution avec Fonds AGF, B2B Trust espère maintenir son rythme de croissance accéléré. Par ces transactions, la filiale de la Banque Laurentienne intensifie sa présence dans le secteur des comptes autogérés et élargit sa clientèle potentielle : les conseillers indépendants.

B2B Trust s’est récemment entendu avec la Corporation Financière Mackenzie pour acquérir Fiducie M.R.S. Si tout va bien, la filiale bancaire s’offrira celle de Mackenzie en novembre, pour 165 millions de dollars (M$) et le remboursement d’une débenture subordonnée de 20 M$. Au terme de la transaction, B2B Trust possèdera 100 % des actions de M.R.S. Une fois combinées, les deux firmes rejoindront plus de 22 000 conseillers financiers, dont 14 000 grâce au réseau de M.R.S.

Le spécialiste des produits bancaires destinés aux conseillers financiers mettra ainsi le grappin sur un marché où il était peu présent : les comptes autogérés. B2B Trust offre aux conseillers des produits bancaires tels des certificats de placement garanti, des produits de dépôts, des hypothèques, des prêts REER et à l’investissement. Les portefeuilles de prêts et dépôts de B2B Trust atteignaient respectivement 5 milliards de dollars (G$) et 9 G$ en septembre. Avec l’acquisition de M.R.S. elle gagnera un actif supplémentaire de 21,5 G$ et 280 000 comptes d’investisseurs établis par des conseillers financiers indépendants.

L’achat imminent de M.R.S. ne vise pas à accaparer des parts de marché. Pour François Desjardins, PDG de B2B Trust, il s’agit de maintenir la croissance annuelle et la rentabilité. « J’ai choisi cette stratégie plutôt que me fier simplement sur la croissance organique. De toute façon, les parts de marché sont très difficiles à déterminer dans ce secteur d’activité », a-t-il affirmé en entrevue au Journal de l’assurance.

Il ajoute que les banques ne distingueront pas dans leurs activités de crédit les prêts qui sont consentis directement à leurs clients et ceux qui le sont par l’entremise de conseillers. « Nous sommes les seuls à offrir des prêts uniquement par l’entremise des conseillers. Sans cette distinction, notre part des prêts leviers serait minime par rapport à celle des banques, un peu moins de 5 % », dit-il.

Par cette acquisition, B2B Trust recherche une meilleure synergie. « Il s’agit de joindre sous une même bannière deux compagnies qui se sont développées avec des stratégies opposées. La fiducie de Mackenzie distribue les mêmes produits que nous, mais a mis l’accent sur le marché des comptes autogérés, alors que nous avons plutôt poussé les produits de dépôts et de prêts », précise le PDG de B2B Trust.

Par exemple, Fiducie M.R.S. administre actuellement 600 M$ de dépôt contre 9 G$ chez B2B Trust, a révélé M. Desjardins. La filiale bancaire détient un volume de prêts de 5,5 G$ alors que celui de sa future acquisition oscille entre 300 M$ et 400 M$, ajoute-t-il. En revanche, M.R.S. gère un actif en comptes autogérés de 21,6 G$, alors que B2B en a pour 3,9 G$.

Près de 70 ententes

Peu après s’être mis d’accord avec Mackenzie pour acquérir sa fiducie, B2B Trust signait une 68e entente de distribution, cette fois avec Fonds AGF. La compagnie de fonds joint des joueurs comme Fidelity Investments, Mackenzie, Financière Sun Life et Transamerica Vie Canada, déjà signataires de telles ententes.

« Aucun de nos concurrents n’a autant d’ententes de distribution. Nous avons signé 40 d’entre elles ces cinq dernières années, dit M. Desjardins. Ces ententes ont permis de doubler le volume de nos dépôts et de nos prêts depuis 2006. »

Les concurrents sont nombreux : toutes les grandes banques, les fiducies, et des assureurs par le truchement d’entités bancaires, comme la Banque Manuvie. B2B Trust dit ne pas chercher à les coiffer au chapitre des ventes. « Nous espérons des ventes supplémentaires, mais ce n’est pas notre objectif premier. Nous voulons élargir l’offre de produits aux conseillers », explique M. Desjardins.

B2B Trust offre aux conseillers de tous ses alliés des ententes de prêts leviers à un taux préférentiel inférieur de 0,5 % à ses taux standards. « Nous signons ces ententes pour accéder à des conseillers avec qui nous ne faisons pas déjà affaire, quitte à faire moins de profit sur chaque prêt individuellement. Pour les prêts REER, les taux sont différents, car il s’agit d’un produit secondaire, un produit de commodité : 99 % de ces prêts sont consentis dans les deux dernières semaines de février », observe M. Desjardins.

La mission de B2B Trust et de ses alliés se rejoint, ajoute-t-il. La filiale de la Banque Laurentienne veut en effet favoriser l’indépendance des conseillers face aux produits bancaires qu’ils recommandent à leurs clients. Parallèlement, les joueurs qui signent des ententes avec B2B Trust veulent permettre à leurs conseillers d’offrir autre chose que leurs propres prêts à l’investissement. Par exemple, AGF exploite toujours une entité qui fournit des prêts à ses conseillers, soit Fiducie AGF.

Si B2B Trust ne cherchent pas les ventes à tout prix, celles-ci n’en connaissent pas moins une croissance remarquable. Son PDG l’estime à 20 % par an. « Les prêts à l’investissement ont connu une croissance importante depuis 2006. Il y a une recrudescence chez les conseillers qui vendent des fonds distincts depuis que les assureurs consentent beaucoup d’efforts au marché de la gestion de patrimoine », fait remarquer M. Desjardins.

Cette croissance a varié au gré de la confiance des clients envers les marchés et de leurs revenus d’emploi, mais elle a toujours été positive, assure-t-il. « De plus en plus de Canadiens veulent utiliser leur pouvoir de crédit de façon réfléchie pour faire croitre leur portefeuille d’investissements. »

B2B consent la majorité de ses prêts à l’investissement sans exiger d’appel de marge. « Nous ne regardons pas la valeur de l’actif du client, mais plutôt sa capacité de payer. Nous laissons aux conseillers le soin de faire de bonnes recommandations », explique M. Desjardins.

Un durcissement bienvenu

Le PDG de B2B Trust remarque par ailleurs que la règlementation s’est resserrée dans le marché des prêts à l’investissement. « On a vu des joueurs se retirer du marché ou retirer des produits. D’autres ont changé leur politique. Depuis 2008, nous n’avons rien fait de cela. Le vrai test sur un marché, c’est quand il y a une période de crise », dit-il.

Il voit d’un bon œil le durcissement du régulateur à l’égard des prêts à l’investissement. « L’Autorité des marchés financiers a par exemple émis des dépliants sur la question. C’est une très bonne initiative. Des milliers de Canadiens ignoraient qu’ils pouvaient utiliser leur pouvoir de crédit pour bonifier leurs investissements. Ils sont désormais au courant », dit M. Desjardins.