Les maladies rares toucheraient 500 000 personnes au Québec et 3 millions dans tout le Canada. Les deux tiers des victimes sont des enfants. De nombreuses maladies rares sont chroniques, progressives et mortelles. Environ 80 % de ces maladies sont d’origine génétique et dans bien des cas, leur étiologie est inconnue.
Elles sont aussi impressionnantes par leur nombre : le nombre de maladies rares connu à travers le monde est évalué à environ 7000 et moins de 10 % d’entre elles ont un traitement connu. Les médicaments peuvent être extrêmement coûteux. Cet automne, le ministre Christian Dubé a accepté de rembourser le Zolgensma, une thérapie génique pour le traitement de l’amyotrophie spinale qui coûte 2,8 M la dose. Au moins 10 enfants devraient en bénéficier.
Mais pour beaucoup d’autres, être atteint d’une maladie rare, c’est vivre un véritable chemin de Damas. Le premier gros défi qui attend les patients et leurs familles, c’est de savoir exactement de quelle maladie on souffre. Aux États-Unis et au Royaume-Uni, le délai moyen pour le savoir se situe entre 5 et 7 ans et les gens reçoivent habituellement deux à trois mauvais diagnostics avant d’obtenir le bon.
« Il faut diagnostiquer et avoir le bon diagnostic en amont, avant les traitements », a insisté Gail Ouellette, présidente du Regroupement québécois des maladies orphelines (RQMO), lors d’une conférence présentée à Québec lors du 15e Forum de l’industrie de la santé. Elle a aussi relevé qu’au Québec, le réseau de la santé n’était pas adapté à la rareté. L’attitude de certains médecins serait par ailleurs déplorable. Ils finissent par voir des problèmes psychologiques là où il y a des pathologies rares qu’ils ne comprennent pas.
Les craintes du Ier janvier 2022
Une autre menace pèse sur les patients. En principe, c’est le Ier janvier 2022 que devrait entrer en vigueur une nouvelle politique sur des médicaments de pointe du Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB). Après avoir comparé les prix payés au Canada à ceux d’autres pays de l’OCDE, cet organisme voudrait réduire leur coût de façon significative au pays. À ce jour, l’application de cette politique a été repoussée à deux reprises.
Elle a été fixée au Ier janvier prochain, à moins que le nouveau ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, décide de la reporter une troisième fois, espère le président de Synergyx, Sébastien Dao. C’est ce que souhaitent ardemment les représentants des maladies rares, car des tarifs trop bas pourraient amener des fabricants étrangers à cesser de commercialiser leurs médicaments de pointe au Canada. Ce serait alors la clientèle canadienne qui en souffrirait.
Une stratégie nationale qui se fait attendre
Le Canada ne dispose toujours pas d’une stratégie nationale de maladies rares. Elle se fait attendre depuis des années. Au printemps 2021, le gouvernement canadien a tenu une consultation sur la question. Le Canada, déplore le RQMO, est l’un des seuls pays industrialisés qui ne s’est toujours pas doté d’un tel plan. La France en possède un depuis 2004 et presque tous les pays de l’Union européenne ont emboîté le pas suite à une recommandation datant de 2009. Les États-Unis ont leur « Orphan Drug Act » depuis 1983 et ont établi un « Office of Rare Diseases » en l’an 2000.
« Aucun gouvernement ni aucun intervenant ne peut résoudre à lui seul les problèmes d’accès aux médicaments pour les maladies rares », a commenté Rutes Fernandes, directrice générale au Canada de la pharmaceutique japonaise de spécialités Takeda, lors du même Forum. « Il n’est pas acceptable qu’un patient diagnostiqué n’ait pas un accès immédiat au traitement quand il existe ».
Madame Fernandes a soumis un rapport qui décrit les stratégies en matière de maladies rares d’une vingtaine de pays pour « aider » Santé Canada dans sa réflexion sur une stratégie nationale canadienne. On y souligne notamment que plusieurs pays utilisent la prolongation de l’exclusivité de marché pour donner un incitatif et récompenser le développement des médicaments pour les maladies rares. Cette exclusivité est de 11 ans aux États-Unis et de 12 ans en Corée du Sud. On y souligne aussi que plusieurs États, incluant le Royaume-Uni et l’Autriche, financent des programmes de dépistage des nouveau-nés qui couvrent habituellement un grand éventail de maladies rares.