Les transactions qui ont fait passer des agents généraux dans le giron d’assureurs se sont multipliées au cours de la dernière année. Pourtant, cela n’a pas eu d’impact sur leurs activités, témoignent de nombreux acteurs de l’industrie.

C’est notamment la perception de Doug Paul, vice-président, produits individuels de placements et d’assurance vie, chez SSQ Groupe financier, par rapport aux acquisitions de Groupe financier Horizons par Great-West Lifeco et de Groupe PPI par iA Groupe financier. « Franchement, ils ont très bien fait les choses. Je n’ai pas remarqué un seul changement dans l’accueil de ces agents généraux. Ça n’a rien changé à notre quotidien. Ils ont agi de façon très équitable pour maintenir une distribution indépendante », dit-il.

Jim Virtue, président et chef de la direction de Solutions PPI, affirme qu’appartenir à une grande compagnie d’assurance n’a aucune incidence sur son fonctionnement, qui continue d’opérer indépendamment. « La représentation indépendante représente une bonne valeur, dit-il. C’est la raison pour laquelle on assiste à cette tendance. Il sera intéressant de voir si d’autres assureurs suivront, mais il est clair qu’iA et Great-West y voient beaucoup de valeur. »

Soutien financier accru ?

L’influence de la société mère se manifestera-t-elle davantage dans le futur ? Les assureurs procureront-ils plus de capitaux aux agents généraux acquis ?

Jim Virtue, de PPI, dit que cet argent sert avant tout à procurer de meilleurs outils, un soutien accru en matière de conformité et de réglementation, ainsi qu’un meilleur service aux conseillers indépendants. PPI pourrait voir sa société mère accroitre la clientèle grâce à ses acquisitions continues. iA Groupe financier a acquis le 10 avril ABEX Brokerage Services et sa filiale ABEX National Brokerage.

M. Virtue espère aussi mettre au point un programme dans le cadre duquel iA aidera à financer la transition lorsqu’un nouveau conseiller souhaitera acheter l’entreprise d’un conseiller qui prend sa retraite. « L’accès au capital facilite alors grandement les choses. »

Au Groupe financier Horizons, le président fondateur John Hamilton affirme avoir réalisé plus de 35 acquisitions pour l’entreprise depuis cinq ans. (Note de la rédaction : John Hamilton cèdera le 1er juillet la présidence à Nick Pszeniczny.) La société a aussi créé les Centres Financiers Continuum, une entreprise conçue pour attirer de nouveaux conseillers dans l’industrie et les jumeler avec des conseillers qui prennent leur retraite.

« Nous avons un plan stratégique très solide en vue de poursuivre les acquisitions, tant du côté des agents généraux que des conseillers, dit-il. Nous avons été très actifs sur ce plan. »

Acquérir des conseillers avant des agents généraux

La consolidation se poursuit à un rythme raisonnable. Certains observateurs de l’industrie disent chercher à faire l’acquisition de bureaux de conseillers plutôt que d’entreprises en tant que telles.

« On se retrouve en concurrence avec de grandes institutions financières et de grandes sociétés de capital-investissement qui se présentent sur le marché avec une attitude fonceuse et paient d’énormes redevances multiples, dit Paul Brown, président et chef de la direction du Réseau d’assurance IDC Worldsource. Nous voyons davantage de valeur dans l’acquisition de conseillers, par opposition à celle d’entreprises. Cela ne signifie pas que nous ne sommes pas ouverts aux acquisitions stratégiques. »

M. Brown dit avoir remarqué, depuis quelques années, que la concurrence s’est accrue vu la présence de ces grands joueurs. « Il semble y avoir un désir de consentir des redevances multiples assez imposantes. Je ne sais pas si cela durera. Quand on veut vendre, c’est probablement attirant. Mais en tant qu’acheteur, la prudence est de mise. »

La conformité aura aussi ses effets, dit-il. « Nous sommes à l’aube de changements fondamentaux dans la façon dont les agents généraux fonctionneront et travailleront avec les conseillers. On mettra davantage l’accent sur la surveillance et la supervision des conseillers. Les agents généraux seront davantage tenus responsables de connaître le conseiller, de comprendre quel genre d’affaires il fait, et qu’ils auront un rôle plus important à jouer pour s’assurer de faire passer les intérêts du client en premier. »

Investir entre concurrents : place à la coopétition

Il y a d’autres avenues que la vente et l’achat, fait remarquer Doug Paul. Il signale que SSQ tend actuellement la main aux agents généraux qui n’agissent pas sous l’égide d’un des grands assureurs.

SSQ aimerait voir s’il serait possible de former des groupes où les entreprises investiraient ensemble dans des occasions d’affaires présentant une certaine envergure. Cette organisation pourrait aussi investir dans une technologie qui pourrait servir à tous, ou financer un agent général pour qu’il en achète une autre.

« Nous aimerions explorer une autre approche. Il s’agirait de travailler avec divers agents généraux réunis sous l’égide d’un assureur et de voir si nous pourrions investir dans leur bonne marche en échange d’un droit de premier refus advenant qu’une autre grande compagnie d’assurance vie fasse une offre les concernant. En ayant ce droit de premier refus, nous éviterions de voir cet investissement aller vers un autre assureur. »

Empire Vie n’achètera pas d’agents généraux

Empire Vie est un autre assureur qui n’a pas l’intention de faire l’acquisition de cabinets de distribution. Sean Kilburn, vice-président principal, marchés individuels, affirme que sa compagnie a élaboré des modalités de prêt et divers autres types d’ententes financières qui permettent à son entreprise de soutenir les agents généraux indépendants sans carrément les acheter.

« Nous avons configuré notre entreprise de manière à pouvoir soutenir les conseillers financiers indépendants. Nous ne consacrons pas l’ensemble de nos efforts à l’achat et le fonctionnement d’un bureau d’agent général. Nous croyons que nous pouvons jouer un rôle de soutien auprès de bureaux d’agents généraux existants, solides et indépendants, afin de les aider à maximiser leur potentiel », dit-il.

Les compétences nécessaires pour réussir à attirer et retenir des conseillers indépendants sont très différentes de celles qu’il faut pour créer un concepteur de produits d’assurance vie ou sa propre force de vente, ajoute M. Kilburn. « Nous pensons que la meilleure façon pour nous de soutenir les conseillers, c’est de les aider à savoir qu’ils ont des choix lorsqu’ils sélectionnent l’agent général avec lequel ils travailleront. »

Investir dans le numérique

Au lieu d’investir dans la distribution, Sean Kilburn indique qu’Empire Vie s’est plutôt intéressée à l’évolution des besoins technologiques de l’industrie en investissant dans les processus de vente numérique. Ceux-ci ont été conçus pour aider les conseillers à gérer leur temps plus efficacement tout en répondant aux nouveaux besoins de la clientèle et à ses préférences d’achat.

« Tout ce que nous avons fait, nous l’avons fait pour accroitre la rapidité, la simplicité et la facilité de gestion d’Empire Vie dans notre monde numérique, dit-il. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour créer des procédés numériques simples, rapides et faciles. Cela libère notre équipe, qui peut ainsi offrir un soutien extraordinaire. Empire Vie vise vraiment à être forte en numérique et en relations humaines. »