Les assureurs de dommages affirment que 2009 a été beaucoup plus clémente que 2008 au chapitre des catastrophes naturelles au Québec. Dans le reste du Canada, toutefois, l'histoire est tout autre.Le Bureau d'assurance du Canada (BAC) qualifie 2009 d'année la plus couteuse sur le plan des phénomènes météorologiques violents. « Les résultats de cette année confirment ce que les assureurs savent depuis un certain temps déjà, à savoir que les conditions climatiques s'aggravent et que les évènements météorologiques violents sont de plus en plus couteux », affirme Don Forgeron, PDG du BAC.
Il note aussi qu'une grande partie des dommages occasionnés par les tempêtes est attribuable à des défaillances de l'infrastructure. « Les réseaux locaux sont surchargés et n'arrivent pas à absorber les niveaux de précipitation actuels », dit-il.
Le BAC souligne trois évènements qui illustrent l'ampleur des couts liés aux dommages assurés. D'abord, les tempêtes de vent et de grêle qui ont sévi en Alberta entre le 1er et le 3 aout ont couté environ 365 millions de dollars (M $) aux compagnies d'assurance.
Les pluies diluviennes qui se sont abattues sur les régions d'Ottawa et d'Hamilton du 24 au 26 juillet ont occasionné des indemnités d'assurance de 196 M $. Puis, le 20 aout, une série de tornades a frappé la région du Grand Toronto. Cette catastrophe naturelle a démoli des habitations et a couté 76 M $ aux assureurs.
Au Québec, la tornade qui a frappé Mont-Laurier a retenu l'attention étant donné son caractère spectaculaire. Monétairement, les assureurs n'ont pas trop souffert de cette catastrophe, au contraire des personnes touchées par la tornade, dont l'intensité des vents a oscillé entre 180 à 250 kilomètres à l'heure.
Le BAC fait état d'environ 250 réclamations reçues par les compagnies d'assurance à la suite de la tornade. Quelque 146 de ces dossiers concernent des dommages aux résidences et aux biens des particuliers, ce qui totalise environ 4 M $. Du côté de l'assurance automobile, les clients ont acheminé 88 demandes d'indemnités pour des dommages estimés à 400 000 $. Enfin, les dommages causés aux commerces avoisinent les 2 M $.
Plus grand assureur au Canada, Intact Corporation financière dit avoir été épargné au Québec. « À toutes fins utiles, les dommages enregistrés au Québec en 2009 furent insignifiants, dit Louis Héroux, premier vice-président associé à l'indemnisation d'Intact, sans toutefois donner de chiffres. Le Québec a été épargné par rapport à 2008, où on avait la tempête de grêle du 10 juin et d'autres pluies abondantes lors de l'été. En 2009, on n'a pas eu ça. Il y a un évènement qui aurait pu s'avérer couteux en 2009, soit la tornade Mont-Laurier. Chez Intact, on a été peu touché par cet évènement ».
Pour l'ensemble du Canada, la situation fut tout autre, dit M. Héroux. « En nombre de catastrophes, c'est relativement similaire, mais 2009 a été plus couteuse que 2008. En ce qui a trait au nombre de réclamations, c'est un peu plus difficile à estimer, car nous avons eu un épisode de grêle important. Il faut comprendre que la grêle affecte à la fois nos segments auto et habitation, ce qui n'est pas le cas pour les dégâts d'eau. Il y a eu beaucoup de réclamations en Alberta, mais qui avaient trait à l'automobile », dit-il.
Plus de sinistres
Pour Co-operators, dont le siège social est en Alberta, 2009 se rapproche de 2008. Il s'agit donc d'une année qui a compté plus de sinistres que la normale. « En 2008, nous étions juste en-dessous de 50 M $ pour ce qui est des pertes liées aux tempêtes », note Glen Oxford, directeur national des réclamations en propriété. En date du 30 novembre 2009, la compagnie en était déjà à 54 M $.
« Ça devrait encore augmenter un peu. Nous recevrons surement des nouvelles réclamations ce printemps, découlant des évènements survenus en 2009 », ajoute-t-il. Co-operators croit que certains toits de résidences seront en état pour traverser l'hiver, mais au printemps, il sera évident qu'ils auront été très endommagés, notamment par la grêle qui aura frappé diverses régions du pays pendant l'été.
Co-operators a aussi estimé le cout de ses principales réclamations. Ainsi, la tempête de grêle survenue en Alberta lui a couté environ 25 M $ pour l'habitation et l'automobile. Pour les pluies diluviennes d'Hamilton, Co-operators a dû indemniser ses clients à hauteur de 12 M $. Sa filiale Co-operators Québec, qui comprend L'Union canadienne et Coseco, a dû débourser un million de dollars pour indemniser les dix réclamations liées à la tornade de Mont-Laurier.
M. Oxford n'a pas été en mesure de dévoiler les résultats de fin d'année puisque l'entrevue s'est déroulée avant leur publication officielle. Par contre, il note ceci : « en parlant à des gens de l'industrie, on se rend compte que les résultats ne sont pas très bons, surtout du côté de l'habitation. Ce constat n'est pas seulement dû aux tempêtes. Les dégâts causés par l'eau ont aussi un effet. Nous avons eu notre lot de défis en 2009 », indique-t-il.
Chez Desjardins Groupe d'assurances générales (DGAG), plus gros assureur au Québec, son vice-président à l'indemnisation Louis Chantal considère que 2009 aurait difficilement pu être pire que 2008, une année qui avait été très couteuse pour les assureurs avec son lot de catastrophes naturelles. M. Chantal souligne que 2009 est revenu « un peu plus à la normale » avec un nombre total de dossiers qui est 12 % moins élevé qu'en 2008. Quant au nombre de sinistres reçus en habitation, DGAG fait état d'une baisse de 17 %. Quant à la valeur des indemnisations, il indique qu'elle sera 10 % moins élevée en 2009 qu'en 2008.
Pour la tornade de Mont-Laurier, M. Chantal note que sa compagnie a reçu une trentaine de réclamations, dont trois pertes majeures, qui constituent des dommages importants à des résidences. « Le tiers des dossiers de réclamation représentent des dommages plutôt mineurs en automobile, ce qui fait en sorte de ne pas constituer une facture globale importante pour nous », affirme-t-il.
DGAG, qui exerce ses activités aussi à l'extérieur du Québec, note une hausse considérable du nombre de réclamations reçues depuis quelques années au Canada. « Hors-Québec, on observe une hausse de 15 % en habitation en 2009 par rapport à 2008. 2008 avait elle-même connu une augmentation de 20 % par rapport à 2007 », affirme Louis Chantal. Sa compagnie a déboursé 800 000 $ pour indemniser ses clients touchés par les tornades à Toronto.
Trois autres assureurs ont accepté de répondre aux questions du Journal de l'assurance et de divulguer certains chiffres. Ainsi, chez AXA Assurances, on a traité environ 600 dossiers de sinistres liés au climat. « C'est très minime », souligne Pierre Dépatie, vice-président indemnisation et opérations. L'assureur avait reçu au-delà de 5 000 dossiers liés à des catastrophes naturelles en 2008. Dans l'ensemble, AXA fait état de près de 4 % moins de sinistres. « 2009 est une bonne année en ce qui a trait aux résultats techniques », ajoute-t-il.
En habitation, le nombre de dossiers de sinistres a diminué de 21 % chez AXA de 2008 à 2009. L'assureur a toutefois été touché plus que les autres par la tornade de Mont-Laurier. « Le cout s'est établi à environ 2 M $. Nous avons reçu 69 dossiers en habitation, auto et entreprise pour cet évènement », précise M. Dépatie.
Pour le Groupe Promutuel, qui exerce ses activités exclusivement au Québec, 2009 a été moins couteuse que 2008. « Pour les pertes majeures et les catastrophes, on a eu 67 % moins d'indemnités. 2009 a été meilleure que ce que nous avions prévu au départ. Nos résultats sont de loin meilleurs que ceux de 2008 », dit Benoît Duchesne, directeur à l'indemnisation.
De plus, dans le segment de l'habitation, le nombre de dossiers a diminué de 22 % en 2009 par rapport à 2008 chez Promutuel. « L'énorme diminution en habitation est dûe à l'hiver difficile que nous avons eu en 2008 et à l'amélioration significative observée en 2009 », explique M. Duchesne.
Il ajoute que Promutuel n'a pas été trop touché par la tornade de Mont-Laurier. L'assureur a ainsi déboursé 800 000 $ pour indemniser ses clients dans cette région. M. Duchesne souligne toutefois que lorsque de tels sinistres surviennent, la compagnie reçoit plusieurs dossiers sur une courte période. « Ce qui a le plus affecté Promutuel, c'est la gestion de la crise, dit-il. Dans ce genre de situation, on se retrouve avec moins de fournisseurs parce que la majorité des assureurs utilisent les mêmes. Parfois, on est en période de vacances et moins d'employés sont disponibles. »
Finalement, chez La Capitale Assurances générales, Audrey Bouchard, conseillère en communication et relations publiques, mentionne que sa compagnie est passée « d'une extrême à l'autre de 2008 à 2009. » Elle parle d'une baisse du nombre de dossiers reçus de plus de 10 %. Quant à la tornade de Mont-Laurier, elle n'a pas voulu en dévoiler les couts, mais affirme que l'évènement a eu des répercussions sur les affaires de la compagnie.