Même si la crise économique mondiale provoquée par la pandémie de la COVID-19 a un peu réduit les émissions de gaz à effet de serre (GES), un rapport récent de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) montre que l’impact des changements climatiques n’est pas près de s’estomper.
Le 14 avril, lors de la Journée de l’assurance de dommages, une session portait sur le rôle des assureurs en matière de lutte contre les changements climatiques. « Selon un rapport d’Aon pour l’année 2020, les dommages causés par les sinistres climatiques ont été estimés à 268 milliards de dollars américains (G$ US), dont 97 % étaient des dommages couverts par des assureurs », rappelle Bernard Deschamps, président et consultant des Conseillers stratégiques Incremento, qui animait la session. Seulement au Québec, les dommages ont été estimés à 1 G$.
Le chercheur Philippe Gachon, du département de géographie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), a résumé les grandes lignes du rapport publié en janvier 2021 par l’OMM. M. Gachon dirige le Réseau Inondations Intersectoriel du Québec (RIISQ), qui regroupe quelque 120 chercheurs répartis dans 16 universités et institutions de recherche.
Trois éléments plus préoccupants pour les assureurs et la population en général sont ciblés dans le rapport de l’OMM : les inondations, l’érosion des berges en bordure de mer et la fonte du pergélisol et des glaces.
La pandémie de la COVID-19 et les mesures sanitaires imposées partout dans le monde ont eu un impact notable sur l’activité économique, ce qui a permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre en 2020, confirme M. Gachon. « Mais la concentration de GES dans l’atmosphère dépasse encore les 410 ppm, soit 1,5 fois la concentration qui existait avant l’ère industrielle », dit-il.
En route vers 1,5 degré
Depuis les premiers relevés météorologiques, il y a 150 ans, le réchauffement moyen de la température à l’échelle de la planète est estimé à 1,2 °C. Les mesures découlant de l’Accord de Paris en 2015 visaient à limiter le réchauffement à 1,5 °C, mais les objectifs annoncés n’ont pas été respectés par les États signataires. En conséquence, la cible pourrait être atteinte plus rapidement que prévu.
« On s’approche du moment où il n’y aura plus de glaces dans la mer Arctique en été », note M. Gachon. Comme la banquise met plus de temps à se reformer en hiver, cela contribue au réchauffement de la température moyenne des océans, ce qui augmente la fréquence des tempêtes majeures, résume le chercheur.
Il devient de moins en moins rare de voir des coups d’eau ailleurs qu’au printemps ou à l’automne, comme on l’a vu à Sainte-Brigitte-de-Laval en décembre 2020. À Gaspé le même mois, on a enregistré une température record de 14 °C et des précipitations de pluie de 170 millimètres.
« Quand ces pluies fortes tombent sur de la neige ou un sol gelé, le ruissellement est immédiat et cela crée des volumes d’eau énormes », précise le chercheur. Les inondations majeures qui ont frappé à Fort McMurray (Alberta) en 2020 ont été causées par un redoux important qui suivait un hiver très rigoureux.
Au Québec, des inondations printanières majeures ont touché les mêmes municipalités en 2017 et en 2019. La durée des inondations est aussi prolongée. « Des inondations comme celles de la rivière Richelieu en 2011, où des terres ont été inondées durant près de deux mois, c’est particulier au Québec. On ne voit pas ça ailleurs dans le monde », souligne Philippe Gachon.
Pour mettre à jour la cartographie des zones inondables, le Québec doit mieux financer les travaux des chercheurs qui documentent les causes des inondations, plaide M. Gachon.
Heureusement, les experts ont des pistes de solution. Pour bien évaluer le risque, on doit être capable d'anticiper. Et cela passe par une meilleure communication auprès des municipalités et des sinistrés.
Voici un extrait tiré de la présentation de Philippe Gachon, qui a eu lieu le 14 avril, lors de la Journée de l’assurance de dommages.