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La couverture en assurance collective au Canada se ressemble tellement d’un assureur à l’autre qu’il n’y a que le prix pour les distinguer. Le Big Data viendra changer les choses, croit un réassureur.

Cette analyse est celle d’Anil Sanwal, vice-président de la division mondiale des produits collectifs de RGA International Re. Il a étudié les différents marchés d’assurance collective de par le monde pour voir où la cassure (disruption) se fera dans ce marché. Le Journal de l’assurance s’est entretenu avec lui.

Dans ses premières hypothèses, M. Sanwal anticipait que la cassure se ferait au niveau de la distribution. Celles-ci n’ont toutefois pas tenu la route. Il s’est rapidement rendu compte que c’est du côté du traitement des mégadonnées que la cassure se fera en assurance collective, du moins pour le marché individuel.

Il souligne que les assureurs ont maintenant accès à différents types de données. La technologie permet de les compiler.

« Ça donne aux assureurs un savoir beaucoup plus profond. Ils doivent maintenant la mettre en lien avec les données qu’ils utilisent déjà. S’ils peuvent en plus y lier des données liées à la santé d’une personne, ça leur donne une vision stratégique incroyable. »

Les assureurs n’utilisent pas encore à plein escient les données qu’ils ont entre les mains. C’est particulièrement vrai au Canada, dit M. Sanwal.

Travailler sur les problèmes détectés

« Ils offrent tous le même produit. Le seul élément de différenciation qui reste est le prix. Ce qui fait en sorte que les employeurs choisissent le fournisseur qui offre le plus bas prix. La technologie amène de nouvelles opportunités. Avec les données qu’il acquiert, l’assureur peut dire à son entreprise cliente qu’il peut l’aider à travailler sur des problèmes qu’il a détectés au sein de celle-ci. »

Dans une étude sur le sujet, et à laquelle M. Sanwal a participé, RGA indique qu’accéder à une gamme de données alternatives et y appliquer des modèles analytiques permet de mieux cibler le profil de risque d’un groupe. En plongeant plus profondément dans cette analyse, les assureurs peuvent identifier des nuances au sein des groupes qu’ils n’auraient pas considérés avant.

Même si le tout semble simple, M. Sanwal souligne que les assureurs se fient aux mêmes données traditionnelles : l’âge, le genre et le statut de fumeur ou non-fumeur. « Pourquoi n’utilisent-ils pas quelque chose comme la cote de crédit ? C’est une donnée qui est hautement prédictive en termes de mortalité. Ça peut être très profitable du point de vue de la souscription. Ils gagneraient en efficience. »

Le code postal est une autre donnée à considérer, dit M. Sanwal. Il ajoute que l’assureur est souvent le seul à pouvoir accepter à ce type de données. L’assureur peut alors s’en servir pour soumissionner de nouveaux groupes ou bonifier son renouvellement.

Autre avantage qu’amènera l’usage des mégadonnées : bâtir des outils pour réaliser des ventes croisées. Là encore, le tout peut être utilisé lors de la souscription. « Ce sont des façons efficientes d’atteindre le consommateur pour lui proposer un certain produit. »

M. Sanwal reconnait que les solutions comme l’analytique des données et les blockchains en sont encore à leurs balbutiements. Il souligne toutefois que le potentiel est là pour les assureurs, tant pour aller chercher des données que pour trouver des façons de s’en servir. Il consent qu’elles ne seront pas toutes pertinentes, mais l’assureur doit commencer à songer à aller dans cette direction.

Call to action

« Nous sommes dans la phase de l’appel à l’action. Comment peut-on faire mieux ? Il y a des leadeurs qui émergeront. Les autres ne seront pas capables de suivre une fois que le train sera parti. »

L’approche actuelle des assureurs ne peut être viable à long terme compte tenu de l’environnement dans lequel ceux-ci exercent, dit M. Sanwal. De nouveaux joueurs pourraient émerger. Il souligne toutefois que l’industrie a les solutions en main pour y faire face.

Il s’attend à ce que la vente d’assurance collective prenne le chemin qu’Uber a pris du côté de la mobilité. Mais pas dans le sens que la technologie chamboulera tout. M. Sanwal y fait plutôt le comparatif qu’avec Uber, le consommateur a maintenant un choix entre les mains.

« L’industrie est très bonne pour concevoir des produits pour les consommateurs. Mettre le client au centre de l’équation est une tendance qui prend de plus en plus d’ampleur. Des solutions peuvent être mises de l’avant. Les dollars de couverture que le client assuré peut utiliser à sa guise en sont une. Il ne faut pas oublier que les budgets ne sont pas sans fin. Aux vues de la démographie, offrir une solution de taille unique ne fait pas de sens, même si ça répond aux besoins de la moyenne des gens. Le problème est que ça ne répond pas aux besoins individuels »

M. Sanwal ajoute que mettre le consommateur responsable de ses protections fait en sorte que des processus doivent être mis en place chez l’assureur. Les clients seront très ouverts à cette approche, dit-il.

Courtiers et conseillers demeureront

L’émergence des mégadonnées en assurance collective ne réduira pas le besoin de faire appel à un courtier ou à un conseiller, croit M. Sanwal. Des outils seront développés pour qu’ils puissent proposer le produit idéal à leur entreprise cliente. L’assureur pourra concevoir une application ou un autre outil pour rendre l’intermédiaire plus efficient.

L’assurance collective n’est pas un segment où tout pourra se faire sur le Web, croit M. Sanwal. Des interactions en personne y demeureront nécessaires, dit-il. Il donne en exemple les marchés des États-Unis, de l’Italie et de l’Afrique du Sud, où les assureurs ont été innovants en termes d’assurance collective et de sa distribution.  


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