Au début de 2020, le changement climatique était perçu comme la plus grande menace pour l’humanité.
La pandémie de la COVID-19 a bousculé les choses, reléguant le changement climatique au second plan. Ce qui ne veut pas dire que les risques posés par le changement climatique. Bien au contraire, la pandémie augmente la menace posé par le changent climatique, affirme Rob Bailey, directeur de la résilience climatique chez Marsh & McLennan Advantage.
Dans une note intitulée How Will Climate Catastrophes Be Handled in the Face of Coronavirus?, M. Bailey a exposé son argumentaire. L’éclosion de la pandémie n’empêchera pas les inondations, les canicules, les ouragans ou les feux de brousse de survenir.
Le hic, c’est que les ressources gouvernementales sont utilisées au maximum dans l’état actuel des choses. « À l’heure actuelle, les gouvernements ne peuvent qu’espérer qu’ils seront de l’autre côté de la pandémie avant qu’une catastrophe naturelle frappe », dit M. Bailey.
Le pire est-il arrivé ?
Des pays ont aussi échappé au pire, rappelle M. Bailey. Le Royaume-Uni a subi d’importantes inondations juste avant que les premiers cas de COVID-19 apparaissent sur son sol. En Australie, la saison des feux de brousse a pris fin juste avant le début de la pandémie.
« Que serait-il arrivé si la pandémie avait éclaté un mois ou deux avant ? Comment les choses auraient-elles tournées en Australie si l’éclosion d’une maladie respiratoire mortelle et contagieuse était arrivée au moment où le nuage de fumée causée par les feux de brousse de janvier recouvrait plusieurs villes ? »
M. Bailey poursuit sa réflexion en soulignant que l’été pourrait être critique en Europe. Des vagues de chaleur y ont fait plusieurs morts, particulièrement parmi sa population plus âgée ou celle ayant des problèmes respiratoires… précisément ceux qui sont plus à risque face au coronavirus. « Il faut aussi considérer que la COVID-19 s’est propagée plus rapidement dans les pays plus chauds », fait valoir le directeur de la résilience climatique chez Marsh & McLennan Advantage.
Cocktail explosif en Inde
M. Bailey se dit aussi craintif pour l’Inde, qui affiche un mois de retard par rapport aux autres pays touchés par la COVID-19. Or, le mois de juin correspond aussi à la saison de la mousson dans ce pays. Rappelons aussi qu’en Inde, le système de santé est sous-financé, la densité de la population est très élevée et que ce pays est celui où la pollution de l’air est la plus élevée dans le monde.
« Ce sont toutes des conditions favorable à la propagation de la COVID-19. Des inondations monstres ne feraient qu’empirer les choses en Inde », anticipe M. Bailey.
Risques d’inondation aux États-Unis… et d’ouragans
Aux États-Unis, ce sont les inondations qui font craindre le pire à M. Bailey. Les évènements qui ont cours au Michigan en ce moment pourraient lui donner raison. Selon le National Weather Service, plus de 128 millions d’Américains sont situés dans des zones à risque d’inondations ce printemps.
Viendra ensuite la saison des ouragans… Les prévisions actuelles font état d’une saison plus active qu’à l’habitude en 2020 de l’ordre de 40 %… Ce qui pourrait inclure huit ouragans, dont quatre de force majeure.
L’exemple japonais
Même les pays les mieux équipés pour faire face aux catastrophes naturelles auront leurs défis, prévoit M. Bailey. Il donne le Japon en exemple, réputé avoir une forte gouvernance à cet égard, notamment au niveau de la résilience de ces infrastructures.
Le Japon a semblé échappé à la pandémie pendant un temps. Or, ses dirigeants ont finalement été obligés de décréter l’état d’urgence national. Son système de santé roule à pleine capacité. Et la saison des typhons s’est amorcée en mai. Déjà, des médecins disent craindre que le système de santé s’effondre en cas de catastrophe majeure, fait remarquer M. Bailey.
« La résurgence de la COVID-19 au Japon est peut-être un signe de ce qui s’en vient pour les pays qui ont amorcé des mesures de déconfinement avant d’avoir atteint une immunité de masse ou d’avoir trouvé un vaccin. Comment éviter les contrecoups découlant d’être frappé à la fois par le coronavirus et par une catastrophe naturelle? Il se peut que les gouvernements doivent naviguer au travers avec ce risque pendant quelques saisons. Ils doivent planifier le tout en conséquence », dit-il.
Le cout de l’inaction
Pour M. Bailey, le coronavirus et le changement climatique démontrent pourquoi les gouvernements doivent avoir un engagement à long terme envers la gestion de risques. « Les leadeurs du secteur public doivent s’assurer qu’ils ont des plans et stratégies dynamiques qui guideront la préparation et les efforts non seulement pour les crises actuelles, mais qui tiendra aussi compte des risques qui évolueront dans le futur », dit-il.
Cela ne se fera pas en criant ciseaux, prévient toutefois M. Bailey. « Ces leadeurs devront prendre des décisions qui favoriseront l’implantation de solutions durables et qui devront être réévalués continuellement. Les gouvernements devront prioriser ces éléments dans leurs budgets. Des décisions visant à réduire les risques maintenant produiront une meilleure résilience. Ces efforts demanderont du temps et des ressources. Le cout de l’inaction est toutefois trop grand pour être ignoré. »