Les fournisseurs pourraient se réjouir de voir les agents généraux perdre de l'influence? Bien au contraire. Ils souhaitent que le réseau de distribution indépendant demeure solide pour le bien de toute l'industrie... Surtout avec les nouvelles formes de concurrence qui pointent à l'horizon.Les agents généraux se trouvent entre deux eaux actuellement, lance d'emblée Sylvain Gagné, vice-président régional pour le Québec chez Empire Vie. « Il y a de grands leaders dans le réseau des agents généraux. Mais ce n'est plus seulement une question de leadership maintenant, c'est une question de vision. Le marché québécois est saturé; il n'y a plus de place pour y bâtir comme avant », soutient M. Gagné. Un des mandats que devraient d'ailleurs poursuivre les agents généraux, ajoute-il, c'est d'aller voir à l'extérieur du Québec.

Et le marché n'est pas seulement saturé, ajoute Sylvain Gagné. Il a aussi changé. « La concurrence viendra dorénavant de l'extérieur. Il y a la consolidation que le réseau est en train de vivre. Puis, il y a des joueurs qui ne sont même pas de l'industrie et qui entrent dans notre marché, tels les Canadian Tire et Costco. Ce ne sont pas encore des concurrents directs des agents généraux, mais ils saisissent des occasions que ne peuvent saisir les agents généraux québécois qui n'ont pas de réseau pancanadien », estime M. Gagné.

Ce que Empire Vie souhaite, c'est guider les agents généraux québécois dans cette transition, affirme Sylvain Gagné. « Les agents généraux sont assis sur une mine d'or qu'ils doivent valoriser : la force de leur réseau. Ils doivent lui donner une direction. »

En juin, la direction d'Empire doit déposer son plan d'attaque auprès des actionnaires de la compagnie, la famille Jackman, et il sera question de cette initiative, révèle M. Gagné. « Nous voulons nous asseoir avec nos partenaires de distribution pour parler d'autres choses que de production. Nous voulons discuter avec eux de nouvelles façons de croître et de recruter, car le réseau des agents généraux est ce qu'il y a de plus important pour nous. »

Il croit aussi que les conseillers, les cabinets et tous les autres membres de l'industrie doivent s'asseoir ensemble et de cesser de travailler en vase clos. Ce qui inclut aussi la Chambre de la sécurité financière, dit-il.

Sylvain Gagné se dit attristé du sort qui attend l'Association. « Mais peut-être doivent-ils trouver une autre façon de faire. De mon côté, je continue de croire que nos partenaires sont solides. Le réseau des agents généraux ne disparaîtra pas, mais il va changer et sera perçu différemment. »

Pour sa part, Stéphane Rochon, vice-président aux ventes et marketing de La Survivance, estime que les agents généraux n'ont pas à être aussi solidement structurés que l'est, par exemple, l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes (ACCAP), précise-t-il. En revanche, ils devraient avoir une structure minimale qui leur permette de défendre leurs intérêts et de faire face à une foule d'enjeux plus grands que nature.

M. Rochon craint que des modifications législatives surviennent alors que les agents généraux ne disposent d'aucune structure pour négocier avec les assureurs, hormis leur volume de primes. « Si j'étais propriétaire d'un agent général, je voudrais que ma voix soit entendue à travers tout le réseau et l'industrie », a-t-il lancé.

Crédibilité

Il convient que de faire fonctionner une association coûte cher. « Mais une voix unique et solide est toujours payante. » Si des décisions réglementaires se prennent au moment où les agents généraux manquent de crédibilité parce qu'ils ne sont pas organisés, les agents généraux ne seront pas heureux des résultats, croit-il.

De son côté, Denis Berthiaume, premier vice-président, marchés individuels de Standard Life, croit aussi que, tôt ou tard, les agents généraux devront se donner une association forte pour répondre à des enjeux communs.

M. Berthiaume voit le vieillissement du réseau comme un problème majeur et déplore l'absence d'un plan de succession chez la plupart des cabinets. « Cela prend de 5 à 10 ans au minimum pour bâtir la relève d'un agent général. »

La fragmentation des cabinets est un autre enjeu. « Il y a encore beaucoup de petits cabinets et il sera difficile pour eux de s'organiser en réseau efficace. Peu ont en effet le temps et les ressources pour joindre une association. »

Pourtant, les agents généraux ont clairement besoin d'une association, croit M. Berthiaume. « Lorsque qu'un changement se prépare en réglementation, nous mettons notre poids dans la balance pour que nos distributeurs ne soient pas trop affectés, parce qu'ils sont au cœur de notre développement. Mais il y a des choses qui sont du ressort des agents généraux. Surtout pour des éléments comme la responsabilité, la conformité et la divulgation au point de vente. Quelle forme prendrait une telle association? Une association avec CAILBA ou quelques leaders forts pour prendre le bâton du pèlerin? Je ne sais pas mais chose certaine, l'assureur ne pourra le faire à leur place. »