Les taux d’intérêt pourraient influencer la tarification future des produits d’assurance vie. On assisterait ainsi à la naissance de produits à primes ajustables. Lorsque les taux d’intérêt seraient élevés, la prime des produits serait plus basse. Dans le cas contraire, les primes seraient appelées à augmenter.C’est ce qu’a affirmé Les Herr, PDG d’Empire Vie, lors du Congrès 2012 de l’assurance et de l’investissement. René Hamel et Steven Ross, respectivement PDG de SSQ Groupe financier et de La Capitale assureur de l’administration publique/La Capitale assurances et gestion du patrimoine, se sont aussi entendus sur le fait que les produits liés à des garanties à long terme subissent une énorme pression, compte tenu des conditions actuelles du marché. Cette « tempête parfaite » les a obligés à retarifer, revoir ou retirer ces garanties, au cours des derniers mois.

Peu ont levé la main

Pour continuer à offrir ces produits, les assureurs devront songer à introduire une tarification ajustable, a dit M. Herr, qui est aussi président du conseil d’administration de l’Association canadienne des compagnies d’assurance de personnes (ACCAP). Il a ensuite demandé aux congressistes présents s’ils étaient prêts à vendre de tels produits. Très peu ont levé la main.

M. Herr affirme que les conseillers ont déjà vendu des produits avec des primes ajustables, mais que l’expérience ne s’est pas terminée de façon concluante. Les taux d’intérêt étaient alors très hauts, ce qui faisait en sorte que les primes étaient très peu élevées. Quand les taux ont commencé à diminuer, et ils ont continué de le faire pendant 15 ans, les primes ont été ajustées, ce qui a été pénible pour plusieurs, a fait valoir le PDG d’Empire Vie.

Malgré tout, M. Herr croit que le moment est peut-être venu de lancer une nouvelle génération de produits à primes ajustables. Comme les taux d’intérêt sont au plancher, la tarification des produits garantis est assez élevée. Ce qui veut dire que les consommateurs qui achètent actuellement les produits disponibles actuellement « seront aux prises avec une prime élevée, à moins qu’ils ne réécrivent leur contrat. »

Lorsque vous êtes un babyboumeur ou une personne plus âgée, faire une telle chose n’est pas aisée, voire impossible pour des raisons de santé, dit M. Herr. La vente d’assurance avec une composante ajustable permettrait aux consommateurs de profiter d’une baisse de tarification, lorsque les taux d’intérêt reviendront à des taux plus habituels. De plus, les assureurs auraient besoin de moins de réserves de capitaux, ce qui pourrait améliorer la tarification, ajoute-t-il.

Quant à René Hamel, il dit ne pas croire que des assureurs vont prendre des risques sur 100 ans, vu l’état actuel des taux d’intérêt. « C’est pourquoi les produits ajustables sont une avenue intéressante. Toutefois, pour que ces produits soient acceptables, ils doivent avoir deux qualités : simplicité et objectivité. Assurez-vous que vous allez trouver ça dans l’offre qui vous sera faite dans les prochains mois et les prochaines années », dit-il.

Aussi présent dans la salle, Jacques Desbiens, PDG d’UV Mutuelle, est intervenu pour dire qu’il est ouvert à l’introduction de solutions ajustables, sa compagnie venant d’en lancer une tout récemment. « Plus les assureurs l’offriront, plus ça va faciliter notre tâche », dit-il.

Réticences compréhensibles

Les Herr a ajouté que des produits de vie entière avaient déjà des composantes ajustables. « Ils ne sont pas ajustables en termes de primes, mais en termes de retours en argent. Et ils ne sont pas garantis », dit-il.

Le PDG d’Empire Vie dit toutefois comprendre que les conseillers soient réticents à l’idée de vendre des primes ajustables, vu le contexte historique qui les entoure. Pour contrer ces craintes, les assureurs devront développer des solutions sur lesquelles les conseillers et leurs clients pourront compter, a-t-il ajouté.

« C’est la préoccupation numéro un des assureurs. Oui, il faut faire des profits. Toutefois, si nous ruinons notre réputation parce que nous ne pouvons proposer de solutions qui résistent au test du temps, ce sera un plus gros problème. »
René Hamel a ajouté que selon lui, les produits à long terme sont au Canada pour y rester, mais qu’ils changeront au fil du temps. Toutefois, il a souligné aux conseillers que ce ne sont pas les produits qui leur permettront de se démarquer dans le marché, mais les services qu’ils offrent aux consommateurs.

« Le futur peut être résumé en trois mots : service, service et service. L’innovation, vous la trouverez bien plus du côté des services que des produits. Les produits vont évoluer, mais ce n’est pas ce qui vous permettra de vous démarquer. »

Steven Ross avance quant à lui que les conseillers doivent profiter des produits et de la valeur marchande actuelle, malgré toute l’incertitude qui y règne. Quand les conditions s’amélioreront, il dit croire que les assureurs trouveront une façon de réduire les primes si les produits sont surtarifés. De toute façon, s’ils ne le font pas, ils perdront des parts ce marché aux mains de leurs concurrents. Il dit toutefois croire que la tendance des primes à la hausse va se poursuivre dans les prochains mois. Néanmoins, son expérience dans l’industrie l’amène à penser qu’il y aura toujours des joueurs qui vont gérer leurs risques différemment des autres et qui vont vouloir gagner des parts de marché.

« Est-ce que tous les assureurs vont aller vers des produits ajustables? Est-ce que les produits à long terme vont disparaitre? J’en doute. Ça va rester », a-t-il dit aux congressistes.