Le plus important n’est pas ce que les conseillers financiers disent, mais ce que les clients entendent. C’est en partant de ce constat que François Corbeil présente les mots à employer pour faire de la transparence imposée une opportunité d’affaires.

À partir du mois de juillet prochain, les épargnants canadiens recevront de nouveaux relevés de compte énumérant en détail tous les frais qu’ils ont versés à leur conseiller au cours de l’année, alors que le cadre du Modèle de relation client-conseiller – phase 2 (MRCC2) entrera en force. Aussi, les conseillers financiers seraient bien inspirés de se préparer à cette nouvelle exigence de transparence, en utilisant les bons mots pour faire de ce changement règlementaire une opportunité d’affaires.

C’est dans cette optique que François Corbeil, vice-président régional, au service des ventes chez Invesco, dispense des conseils avisés, loin des idées reçues qui voudraient que « transparence » rime obligatoirement avec « handicap ». Et il démontre que ces nouvelles obligations représentent une occasion pour les conseillers de rappeler à leurs clients la valeur qu’ils procurent en échange des frais qu’ils reçoivent d’eux.

« Beaucoup d’entre vous voient le MRCC2 comme un vent de face, contre lequel il va être difficile de naviguer. Chez Invesco, on voit ça comme un vent de dos. Il faut utiliser le MRCC2 comme un catalyseur qui va amener la relation client à un autre niveau. »

Pour être sûr de viser juste, Invesco a commandé une étude à la firme américaine Maslansky & Partners, qui sondé des investisseurs canadiens. M. Corbeil en a présenté les principaux résultats lors du récent Congrès de l’assurance et de l’investissement.

Quand et comment communiquer ?

La première question à se poser est donc de savoir quand et comment communiquer avec les clients. « On a demandé à des clients ce qui leur ferait perdre confiance en leur conseiller, explique M. Corbeil. Ce qui ressort en premier, ce sont « des frais imprévus et inexpliqués » (pour 58 % des investisseurs interrogés). Les conseillers doivent donc être prêts à en parler tout de suite. »

De plus, l’étude révèle que 68 % des épargnants souhaiteraient être informés tout de suite sur les modifications qu’entrainerait le MRCC2. Une personne sur cinq (20 %) aimerait être informée quelques mois avant sa mise en place. « Les clients seront déçus d’apprendre que vous le saviez et que vous avez attendu pour leur dire. S’ils l’apprennent de quelqu’un d’autre, leur niveau de confiance va baisser », dit-il.

De plus, l’étude réalisée par Maslansky & Partners, apporte un éclairage sur la façon de s’adresser aux clients. Par exemple, annoncer que « le MRCC2 n’est qu’un autre ramassis de renseignements inutiles et détaillés de la part des organismes de règlementation » fera assurément baisser le niveau de confiance des investisseurs.

En revanche, présenter les choses en disant : « Pour nous, ce sont de bonnes nouvelles. C’est positif pour vous comme pour nous. La transparence est toujours une bonne chose. L’important, c’est de garder à l’esprit que les couts liés à vos placements ne changent pas » peut être bien plus payant !

Un autre élément d’analyse montre que les investisseurs, dans leur majorité (42 %), souhaitent être informés en personne de ces changements, car ils veulent voir le body language de leur conseiller. Ils veulent voir comment il en parle, souligne l’étude. Suivent ensuite le courriel ou la lettre (28 % pour chacun) et en dernière position, le téléphone (18 %).

Les mots à utiliser

« Les mots comptent. Le plus important ce n’est pas ce que les conseillers financiers disent, mais ce que les clients entendent », prévient M. Corbeil. Ainsi, au lieu d’utiliser le langage proposé par le régulateur et de parler de « commissions de suivi provenant de gestionnaires d’organismes de placement collectif », on privilégiera plutôt une « rémunération qui encourage le conseiller à se concentrer sur le rendement des placements en établissant un lien direct entre le rendement et la rémunération ».

Dans la même veine, on utilisera une « somme imputée pour sélectionner les bons fonds répondant à vos besoins » au lieu de « frais de sélection de fonds ». Idem pour les « frais de pénalité pour retrait anticipé » qui deviendront des « frais pour modifier les placements, au besoin ».

Selon l’étude de Maslansky & Partners, parmi les mots à utiliser, on préfèrera « couts », plutôt que « frais », « commissions » ou « charges ». Pourquoi ? « On parle constamment de frais de service, frais de gestion, frais d’activation, etc. Idem pour commission - l’agent d’immeuble m’a eu ! - ou pour charge, détaille M. Corbeil. Avec le mot “ cout ”, les clients savent qu’ils ont à faire à un conseiller. Et ils savent que cela a un cout. Le mot “ cout ” ressort donc plus positivement. » De plus, on choisira plutôt « gérer les couts » plutôt que « contrôler les couts » ou « atténuer les couts ».

Autre élément important : l’étude révèle que l’investisseur souhaite avant tout que son conseiller le guide dans ses décisions d’investissement. « Les deux mots “ me ” et “ guider ” ont une puissance exceptionnelle. Les clients veulent de leur conseiller qu’il les aide à naviguer », dit M. Corbeil.

Autre mot important à adopter : les clients ne souhaitent pas « la retraite de leur rêve », mais plutôt « avoir une retraite confortable ». Pour le vice-président régional des ventes chez Invesco, « confortable », c’est un mot qui passe bien. Le mot « sécurité » aussi reste largement plébiscité face à « liberté », surtout depuis le 11 septembre. On misera aussi sur « expertise » au lieu de « expérience » au moment de se vendre à un client.

Une autre expression apparait capitale pour François Corbeil : « Une partie de votre épargne ». « Une partie de » montre que le conseiller ne met pas tous les œufs dans le même panier.