Les femmes et les hommes ne sont pas égaux au niveau de la santé cardiaque. La maladie est la même, mais ses répercussions diffèrent grandement selon le sexe.

Les femmes qui subissent un infarctus sont plus susceptibles d’en décéder ou de présenter une insuffisance cardiaque et celles qui sont victimes d’un AVC sont plus sujettes à en mourir, décrit la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada dans un rapport publié en février dernier.

Cet exposé des femmes au niveau de la maladie cardiaque trace un portrait sombre et inquiétant des fortes disparités qui persistent toujours en 2022-2023 entre les deux sexes.

Ces inégalités s’expriment à plusieurs niveaux : symptômes (qui sont mieux décrits et plus faciles à détecter chez les hommes), gravité, diagnostic, soins et recherches. Elles sont si généralisées et si persistantes au détriment des femmes que l’organisme national parle de lacunes et de défaillance du système.

Les maladies du cœur et l’accident vasculaire cérébral (AVC) forment les principales causes de décès prématuré chez les femmes au Canada. En 2019, elles ont fauché 32 271 vies féminines au pays : c’est une toutes les 16 minutes, selon les calculs de la Fondation.

Les preuves qu’elles en sont davantage victimes que les membres de l’autre sexe ne manquent pas : l’insuffisance cardiaque a tué 20 % plus de femmes que d’hommes au pays en 2019. La même année, 32 % plus de femmes que d’hommes ont succombé à un accident vasculaire cérébral. Les femmes qui subissent un AVC sont plus sujettes que les hommes d’en décéder. Quand elles y survivent, leurs séquelles sont plus graves.

Les maladies du cœur sont méconnues même de la gent féminine. Seulement 11 % des femmes seraient en mesure de nommer un ou des facteurs de risques propres à leur sexe.

Facteurs de risques distincts 

Biologiquement, le corps des femmes est différent de celui des hommes, rappelle le rapport. Elles font face à des facteurs de risques distincts pour les maladies du cœur et l’AVC à différents moments de leur vie. Elles y sont sujettes pendant la grossesse et plus tard durant la ménopause. En avançant en âge, les femmes présentent des facteurs de risques cardiovasculaires plus rapidement que les hommes.  

Certains types de maladies du cœur sont plus fréquents chez elles. L’infarctus du myocarde avec artères coronaires non obstruées est au moins deux fois plus répandu chez les femmes que chez les hommes.

Le risque de décès dans l’année qui suit une crise cardiaque continue d’être plus élevé chez les femmes que les hommes. Les femmes qui subissent un infarctus du myocarde avec élévation du segment ST ou sans élévation du segment ST, deux des trois principaux types de crises cardiaques, sont plus susceptibles que les hommes de mourir ou de présenter une insuffisance cardiaque.

Même la recherche favorise les hommes. Les deux tiers des participants à des essais cliniques sur les maladies cardiaques et l’AVC étaient des hommes et lorsqu’il y avait des femmes parmi les participants, il n’y avait pas toujours d’analyse fondée sur le sexe et le genre.

Des signes et des effets différents 

Chez la moitié des femmes qui subissent une crise cardiaque, dit le rapport de la Fondation, les symptômes passent inaperçus. Les femmes sont moins susceptibles de ressentir des douleurs thoraciques lors d’une crise cardiaque que chez les hommes. Elles éprouvent plutôt de la douleur dans le cou, la mâchoire, les épaules, le haut du dos ou le haut du ventre, elles présentent un souffle court, des nausées ou des vomissements. Une crise cardiaque chez la femme peut survenir sans blocage des grandes artères coronaires.

Même les médecins éprouvent certaines difficultés à diagnostiquer et à traiter les maladies du cœur et l’AVC chez la femme. « Les médecins et les autres professionnels de la santé ne sont pas conscients que les soins qu’ils prodiguent aux femmes sont insuffisants », déplore l’organisme.

Des traitements et des effets différents 

Les inégalités entre les hommes et les femmes persistent au niveau du suivi médical : les femmes sont moins susceptibles que les hommes de recevoir les traitements et les médicaments dont elles ont besoin, ou de les recevoir en temps opportun.

Même lorsqu’elle obtient le bon diagnostic, il se peut qu’elle ne reçoive pas le traitement approprié à son sexe, car la plupart des thérapies ont été mises au point par des essais cliniques effectués en majorité chez des hommes. Dans certains cas, l’administration d’une dose conventionnelle de médicaments cardiovasculaires est plus susceptible de provoquer des effets indésirables chez les femmes. Elles sont aussi plus à risques d’éprouver des troubles du rythme cardiaque d’origine médicamenteuse. 

Facteurs ethniques et socio-économiques 

En outre, des facteurs culturels et sociaux font en sorte que la santé cardiaque et cérébrale de certaines femmes est plus à risque que celle d’autres groupes féminins.

Un statut socio-économique précaire, l’origine ethnique, l’appartenance à des groupes autochtones et le fait de vivre dans des régions nordiques, rurales et éloignées accroissent le risque de développer des maladies du cœur ou de subir un AVC et ces femmes sont plus susceptibles d’en mourir. 

Retard à rattraper 

La Fondation insiste sur le retard à rattraper en matière de recherches et de soins et propose une série de mesures pour le combler.

Elle suggère notamment que soient élaborées des lignes directrices relatives aux maladies cardiaques et cérébrales qui touchent principalement les femmes et de sensibiliser davantage le public quant aux risques et symptômes de maladie du cœur et de l’AVC propres aux femmes.