La Commission Charbonneau amène certains assureurs à se questionner sur les risques qu’ils souscrivent en assurance aux entreprises, notamment en cautionnement, a appris le Journal de l’assurance.« On voit certains entrepreneurs qui commencent à avoir des problèmes à souscrire de l’assurance, notamment pour aller chercher leur cautionnement », dit Gilles Gervais, de BFL Canada. Les assureurs portent attention à ce qui se dit à la Commission Charbonneau et ils surveillent ce qui s’y passe. Les assureurs essaient de voir jusqu’à quel point certains entrepreneurs sont impliqués dans des cas de collusion. Ils traitent plus au cas par cas qu’avant. Quand un nouveau client cogne à la porte, ils sont plus frileux. »

M. Gervais dit que plusieurs noms d’entrepreneurs ont été entendus à la Commission Charbonneau, mais qu’ils peuvent avoir été nommés à tort. « Plusieurs ont déjà mandaté leurs avocats pour rétablir leur image et prouver qu’ils ne sont pas ce qu’ils pourraient être. Si les assureurs les soutiennent depuis des années, ils ont tendance à continuer de les soutenir », dit-il.
Michael Wills, PDG d’Ironshore Canada, confirme que les témoignages entendus à la Commission Charbonneau influencent les assureurs à porter plus attention aux risques qu’ils souscrivent en assurance aux entreprises. « Les souscripteurs sont plus attentifs, d’où l’importance de bien connaitre ses clients. Si vous le connaissez bien, ça ne changera pas grand-chose aux risques que vous souscrivez avec lui », dit-il.

Benoit Lamontagne, vice-président, assurance spécialisée et des grandes entreprises chez RSA Canada, souligne qu’il a suivi les développements de la Commission. « Ce qui a un impact pour l’assureur, c’est que légalement, il veut que les règles soient suivies par ses clients. À travers les différents clients qu’on a, on doit s’assurer qu’on a une ligne de conduite qui répond aux attentes des législateurs », dit-il.

Est-ce que la Commission Charbonneau a un impact sur sa souscription? « On apprécie les risques dans la construction, dans la mesure où on les appréciait avant. Ça n’a pas d’impact sur les risques en tant que tel. Est-ce qu’on est plus spécifique dans notre souscription? Les facteurs à évaluer demeure les mêmes qu’avant », dit-il.

La contribution de la Commission, c’est d’amener les assureurs à se questionner sur les pratiques qui ont cours dans diverses industries. « Le risque demeure le même. Ce sont les pratiques qui sont plus aléatoires. On n’a pas de contrôle là-dessus. Néanmoins, la collusion n’est pas partie inhérente du rythme que nous avons. On se doit de continuer à offrir une protection d’assurance à nos clients », dit-il.

Jean-François Béliveau, premier vice-président, Québec, de Northbridge Assurance, souligne pour sa part que son entreprise continue à faire sa souscription en fonction des mêmes critères, comme auparavant. « On ne va pas juger un client sur la base de ce qui pourrait être allégué à son encontre », précise-t-il.

Du côté d’Intact Assurance, on souligne qu’en cautionnement, la souscription d'un risque repose sur une « analyse rigoureuse » des capacités des entreprises à rencontrer leurs obligations, compte tenu qu’il reviendra aux sociétés d’assurance de compléter les travaux d’un entrepreneur en cas de défaut. « Par conséquent, les facteurs analysés pour l’octroi d'un cautionnement sont les capacités financières, humaines et organisationnelles des entreprises à rencontrer leurs obligations. Nous analysons leurs conditions financières, leur expérience et leurs capacités techniques et professionnelles. Finalement, la réputation d’une firme est un facteur important dont nous tenons compte dans nos analyses. Bref, ce qui nous importe, c'est la capacité de l'entreprise à s'acquitter pleinement de ses obligations lors de l'exécution d'un contrat », dit Alexandre Royer, porte-parole d’Intact Assurance.

Il ajoute que l’entrée en vigueur prochaine de la Loi 1 fait en sorte que la réputation d’une firme devient un facteur encore plus important que par le passé compte tenu qu’elle peut affecter la capacité de certaines entreprises à rencontrer leurs obligations. « Bien que notre processus de souscription demeure le même que par le passé, nous sommes plus rigoureux et vigilants à l’égard de ce facteur lors de l’octroi de cautionnements. Nous entendons continuer d’offrir ce produit aux courtiers et à leurs clients et sommes toujours "ouverts" pour les affaires », dit-il.