La Société de compensation en assurance médicaments du Québec élargira dès le 1er janvier 2017 la taille des régimes d’assurance collective qu’elle prend à sa charge.

Cette taille exprimée en nombre de certificats passera de 2 999 à 3 999. En contrepartie, les entreprises doivent assumer depuis cette année une part accrue du risque.

Créée en 1997, la Société de compensation en assurance médicaments du Québec découle du régime général mis de l’avant par la Loi sur l’assurance médicaments. Corporation privée qui relève des assureurs, elle veille à répartir les risques entre assureurs et administrateurs de régimes, selon diverses modalités. La loi exige que l’industrie révise ses modalités régulièrement.

Le dernier élargissement remonte en 2013, alors que la limite passait de 1 499 certificats (l’employé assuré compte pour un certificat, avec ou sans personne à charge) à 2 999. Le comité chargé de recommander les nouvelles modalités pointait alors du doigt « l’apparition de médicaments très dispendieux », pour expliquer sa décision d’étendre la mutualisation aux groupes de 2 999 certificats.

La tendance est irréversible. Le comité justifie une fois de plus l’élargissement par la montée des médicaments et traitements onéreux. « En 2017, la Société étendra la protection aux groupes assurés et non assurés de taille allant jusqu’à 3 999 certificats. Cela devient nécessaire afin de tenir compte de la hausse importante des réclamations fortes couteuses.

Si certains groupes peuvent encore supporter le cout au renouvellement, c’est de plus en plus difficile même pour de très grands groupes d’y faire face, surtout si ces derniers sont frappés par des réclamations de nature récurrente, de 500 000 $ à un million de dollars (M$) », a expliqué Claude Di Stasio, directrice générale de la Société de compensation en assurance médicaments du Québec, au Journal de l’assurance.

Des médicaments qui soignent des tares génétiques peuvent entrainer pour un seul assuré des réclamations annuelles onéreuses pendant plusieurs années, par exemple jusqu’à 600 000 $ dans le cas de Soliris, voire 1 M$ dans le cas de Vibrizim, précise Mme Di Stasio. « De nouvelles molécules traitent des maladies qui ne l’étaient pas avant. Elles entraineront un alourdissement des couts pour les régimes, sur des périodes de 10, 15, 20 ans. »

La décision d’élargir la portée du système de mutualisation québécois fait suite aux consultations avec l’industrie qui ont lieu chaque automne, explique Mme Di Stasio. « Nous avons effectué des tests pour déceler à partir de quelle taille un régime ne serait plus capable de supporter une grosse réclamation récurrente. Après ces analyses actuarielles, nous avons jugé bon d’étendre la mutualisation, pour nous assurer que ces régimes soient mieux protégés. »

Au 31 décembre 2015, la société québécoise a de son côté mutualisé quelque 67 M$ de réclamations en excédent des seuils, a révélé Mme Di Stasio. Ce montant était de 55 M$ aux résultats de 2014.

Seuils et charges en hausse

La protection contre les risques catastrophiques offerte aux entreprises de moins de 3 000 employés par la Société de compensation en assurance médicaments du Québec deviendra plus couteuse. Depuis le 1er janvier 2016, le seuil à partir duquel la Société prend l’excédent d’une réclamation en charge augmente. En en-tête de son tableau sur les nouvelles modalités de 2016, la Société dit vouloir refléter « plus particulièrement l’évolution du nombre de réclamations catastrophiques et l’impact des traitements novateurs pour l’hépatite C.

Or, l’augmentation des seuils et des facteurs de risques de la Société de compensation n’est pas sans impact pour les PME. Pour les entreprises de moins de 25 employés, le seuil de la mutuelle de prévention passe à 8 000 $ en 2016, selon les nouvelles modalités de la Société. Il s’agit d’une hausse de près de 7 %, puisque le seuil était de 7 500 $ en 2015.

La hausse la plus marquée survient dans la strate des entreprises de 50 à 124 employés. Elle dépasse les 8 %, alors que le seuil passe de 30 000 à 32 500 $. Le facteur de risque annuel, soit les charges de mise en commun, subit aussi une hausse qui varie selon la taille des groupes.

Le pool canadien à la rescousse

La PME de 10 employés a-t-elle les moyens de s’assurer ? A-t-elle les moyens de ne pas le faire ? Une PME sans aucune couverture privée verra ses employés couverts par le régime public pour les médicaments.

Une autre pourra décider de s’assurer elle-même. « À la PME de 10 employés avec un régime d’avantages sociaux non-assuré qui a une réclamation de 12 000 $, la Société accordera un crédit de 4 000 $ soit l’excédent de son seuil fixé à 8 000 $ en 2016. L’entreprise devra absorber le reste. Bien sûr, ce régime devra acquitter les charges de mises en commun. Par ailleurs, ces charges sont incluses à la prime s’il s’agit d’un régime assuré, et cette prime serait demeurée raisonnable », dit Claude Di Stasio.

Lorsque cette PME dispose d’un régime privé entièrement assuré auprès d’une compagnie d’assurance, la Société canadienne de mutualisation en assurance médicaments constitue une protection complémentaire pour la partie non couverte par le système québécois de mutualisation des risques, a souligné Mme Di Stasio. L’assureur attribue ainsi à ce régime une protection EP3 (pool de risque propre à chaque assureur).

Le régime peut négocier une protection pour le montant sous le seuil de 8 000 $. « Les régimes du Québec et du Canada sont complémentaires et se superposent, avec des seuils canadiens qui sont inférieurs à ceux du Québec pour la plupart des groupes », ajoute-t-elle.

Dans un groupe de 125 certificats (seuil du Québec de 47 500 $), l’entreprise dotée d’un régime assuré pourra par exemple opter pour un EP3 qui lui accorderait une protection au premier dollar ou encore à partir de 10 000 $. Dans ce cas, la tranche sous le seuil que choisit d’assumer le régime demeure sa responsabilité entière, et l’EP3 absorbe l’autre 37 500 $.

Le seuil ainsi atteint, la Société de compensation en assurance médicaments du Québec entre en jeu et prend l’excédent en charge. « Dans le cas d’une réclamation de 500 000 $, la Société de compensation assumera 452 500 $. »

Plus d’une vingtaine d’assureurs participent au pool fédéral, dont les trois grands à charte fédérale que sont Financière Sun Life, Great-West et Manuvie, ainsi que des assureurs québécois iA Groupe financier, Desjardins Sécurité financière, SSQ Groupe financier, La Capitale, Humania Assurance et UV Mutuelle.