La télématique représente une occasion pour les assureurs de créer une nouvelle valeur ajoutée à leur service, croit Boston Consulting Group (BCG). Il importe pour les assureurs de prendre le plus rapidement possible le chemin de la télématique, indique la firme de consultation dans un rapport, car ceux qui le feront les premiers mettront la main sur les clients les plus payants.

Pour BCG, les avantages de la télématique sont indéniables : revoir les modèles de tarification, aller chercher une plus grande part des conducteurs ayant une bonne conduite, couper les couts de gestion des réclamations et améliorer l’expérience client. L’étude est signée par plusieurs hauts dirigeants de la firme de consultation, dont Eric Brat, partenaire senior et directeur général de BCG à Montréal, qui ont interrogé des exécutifs d’assureurs un peu partout à travers le monde.

BCG n’en démord pas tout au long de son étude : la télématique a le potentiel de révolutionner l’industrie de l’assurance automobile en raison de sa tarification selon l’usage (usage-based pricing). La firme de consultation estime à 70 le nombre d’assureurs qui y ont recours à travers le monde. Pourtant, son taux de pénétration ne dépasse pas encore 1 % du marché, pour un total de 3 millions de polices d’assurance.

L’Italie est le marché le plus en avance à cet effet, avec 19 de ses 20 principaux assureurs qui y ont recours et un taux de pénétration de 3,5 %. Les assureurs italiens interrogés par BCG s’attendent à ce que cette pénétration atteigne entre 10 % et 13 % au cours des prochaines années.

Aux États-Unis, ce sont 10 des 25 principaux assureurs qui offrent des options de télématique. Au Royaume-Uni, 8 des 10 principaux assureurs y ont recours. Là aussi, le taux de pénétration est de moins de 1 %, mais les assureurs britanniques s’attendent à ce qu’il soit de 7 % à 10 % d’ici 3 ans et de 15 % d’ici 5 ans. Au Japon, quelques fabricants automobiles installent des équipements de télématique à même leurs voitures. L’intérêt des assureurs japonais est aussi grandissant, signale BCG.

Méconnaissance des assureurs

Pourtant, indique BCG, la pénétration de la télématique en assurance automobile à travers le monde demeure faible. La firme de consultation l’attribue à l’hésitation des assureurs à investir en télématique. Selon les hauts dirigeants de Boston Consulting Group, cette hésitation s’explique par la méconnaissance des assureurs du potentiel de cette technologie pour créer de la valeur.

Tout d’abord, les hauts dirigeants de BCG font remarquer que plusieurs assureurs croient, à tort, qu’il est couteux d’implanter un programme de télématique. Avec la montée des téléphones intelligents et des tablettes appareils portables intelligents, la firme de consultation fait remarquer que le cout de cette technologie ira en diminuant avec le temps. La firme de consultation ajoute que la mise en place de la télématique ne sera pas bénéfique uniquement pour les conducteurs présentant un profil de conduite plus risqué haut risque comme les jeunes, mais pour tous les types de clientèle.

Pour y réussir, les assureurs devront avoir une bonne segmentation, dit BCG dans son étude. « Ils doivent trouver le bon produit, avec la bonne proposition, ainsi que le bon équipement. Ils pourront ensuite orienter leurs programmes vers différents groupes, comme les femmes, les jeunes familles ou encore les férus de technologie. »

Autre interprétation erronée des assureurs : avoir un petit portfolio en télématique est suffisant pour y tirer son épingle du jeu. C’est tout le contraire, dit BCG. Un programme doit avoir une certaine taille pour être véritablement concurrentiel. La firme de consultation y voit d’ailleurs une explication au fait que les assureurs y ont réalisé peu d’investissements jusqu’à maintenant.

Amélioration de 15 % à 20 % du ratio combiné

Boston Consulting Group croit aussi que la télématique aura un impact important sur le rendement des assureurs qui l’adopteront. La firme de consultation prévoit que les programmes ayant recours à la télématique présenteront un ratio combiné de 15 % à 20 % plus bas que ceux des programmes réguliers d’assurance automobile.

Plusieurs raisons l’expliquent. Tout d’abord, la télématique donnera aux assureurs une meilleure capacité d’aller chercher de l’information détaillée sur leurs clients. De plus, les assureurs pourront cibler les conducteurs ayant les meilleures habitudes de conduite, et présentant ainsi moins de risques.

BCG prévoit même que les assureurs n’adoptant pas la télématique se retrouveront avec les moins bons conducteurs, ce qui fait que leur portefeuille se détériorera et les forcera à hausser leurs primes. Les assureurs faisant usage de la télématique attireront quant à eux les conducteurs recherchant les primes les plus basses. Comme peu de programmes de télématique offrent la possibilité d’échanger des données avec un autre assureur, leur taux de rétention s’améliorera. « Le défi pour les assureurs sera de construire à l’interne l’infrastructure pour soutenir la télématique et en tirer les pleins avantages », dit BCG dans son étude.

La souscription et les réclamations ne seront pas en reste. Les assureurs pourront, par exemple, recueillir des données sur l’état du véhicule d’un client. Ils pourront alors avertir leur client conducteur de problèmes qui pourraient survenir sur sa voiture. Des technologies existent déjà pour permettre aux assureurs de dire à leurs clients que la pression de leurs pneus est trop basse. De plus, les assureurs peuvent leur donner de la rétroaction par l’entremise d’un portail Web pour les encourager à adopter de meilleures habitudes de conduite ou encore interagir avec eux.

« Un tel contact peut favoriser la loyauté du client envers l’assureur, ainsi que sa rétention. L’assureur augmentera la valeur ajoutée qu’il donne au client en devenant un fournisseur de services et non plus uniquement en lui offrant une protection contre un risque », peut-on lire dans l’étude de BCG.

Impact sur la distribution

Boston Consulting Group souligne aussi que la télématique peut influencer la relation entre un assureur et sa force de vente, particulièrement lorsque des intermédiaires, tels que des agents ou des courtiers, sont impliqués. La firme de consultation fait remarquer que les intermédiaires italiens ont tout d’abord été réfractaires à l’arrivée de la télématique, car ils craignaient une baisse de leurs commissions. Avec le temps, ils ont toutefois vu la télématique comme une proposition amenant une valeur ajoutée leur permettant même de vendre plus de couvertures. Ils en sont même venus à penser que la télématique était une façon de protéger leurs portefeuilles de clients leurs clientèles face à la montée des distributeurs directs.

Le temps presse toutefois pour les assureurs de prendre le virage de la télématique, souligne BCG. Les manufacturiers automobiles, qui sont de plus en plus présents dans la vente et la distribution d’assurance, sans parler du financement qu’ils offrent, voit la télématique comme une occasion de croissance. Des compagnies de télécommunications voient aussi la télématique d’un œil avantageux.

« Avec les centaines de millions de véhicules qu’on retrouve sur les routes de par le monde, les implications sont énormes. La télématique pourrait aussi s’appliquer à d’autres segments, comme à l’assurance maritime ou cargo. Les assureurs doivent se demander s’ils peuvent se permettre de ne pas adopter la télématique », concluent les hauts dirigeants de BCG.