Les professionnels en assurance travaillant à Lac-Mégantic sont montés au front dès les premières heures de la terrible tragédie qui a frappé cette ville. Leur service et leur soutien ont fait une différence pour les Méganticois, tout en leur apportant une certaine paix d’esprit.
Dès la première explosion des wagons en feu, le président du cabinet FGL Assurances, Mario Morin, a été évacué de sa résidence, qui se trouvait à environ 1 kilomètre de la déflagration. On lui a demandé de se rendre à la Polyvalente Montignac. Il a ensuite joint le service des réclamations d’Intact Assurance pour leur signaler qu’un incident majeur était survenu à Lac-Mégantic, en leur demandant d’y déplacer une unité mobile. Intact était sur les lieux le lendemain.
Marc-Olivier Gagnon, courtier et associé chez FGL, a appris la nouvelle de la catastrophe de la bouche d’un ami, qui l’a joint le lendemain matin pour s’assurer qu’il était bien en vie. « Dès 7 h 30, je me suis rendu au bureau pour remplir des rapports de réclamation. On est le courtier majeur de la région et on savait qu’on aurait à régler 80 % des sinistres, tant en assurance des particuliers qu’en assurance des entreprises. Dès le samedi, on a commencé à joindre des assurés », a-t-il relaté, en entrevue au Journal de l’assurance.
La tâche était toutefois ardue, puisque les lignes téléphoniques ne fonctionnaient pas. « Dans certains cas, on avait le numéro de téléphone cellulaire des gens. Bien souvent, il fallait retrouver leurs parents, ou encore un oncle ou une tante pour avoir leurs coordonnées. Dès qu’on les joignait, on prenait charge du dossier et on les invitait à venir nous voir », dit-il.
Le personnel de FGL était au boulot dès le dimanche. « Nous nous sommes alors attelés à sortir les copies papier pour les remettre aux clients ainsi qu’à notre expert en sinistre Déry Barette, mais aussi à nos assureurs, dont le Groupe Promutuel, qui n’avait pas accès à ses bureaux », dit-il.
Dès le départ, FGL s’est retrouvé avec 30 dossiers en entreprises qui s’avéraient des pertes totales. « Plusieurs étaient dans la zone rouge, qui était au départ plus étendue que ce qu’elle est aujourd’hui. On a aussi fait dû faire des appels pour retrouver des gens, notamment en diffusant un communiqué à la polyvalente. On avait fait un mapping de chaque rue pour ainsi savoir d’où viendraient les réclamations potentielles », dit-il.
Le cabinet a aussi prolongé ses heures d’ouverture à la suite de la tragédie, de 7 h à 19 h, et ce, 7 jours sur 7, jusqu’à la fin juillet. « Étant donné les nombreux décès, il y a eu des transferts d’argent. Il a fallu s’assurer que ça n’entraine pas d’annulation de contrat. On avait aussi un paquet de bateaux coincés à la marina, ce qui a entrainé d’autres tracas. On a toujours essayé d’être au-devant des questions, en travaillant en mode proactif », dit M. Gagnon.
Promutuel sans bureaux
Pierre Bélair, directeur général de Promutuel Monts-et-Rives, a cru pendant un temps que l’édifice abritant ses bureaux s’était volatilisé en cendres. Il n’en est finalement rien, les flammes s’étant arrêtées aux portes de l’immeuble. L’assureur ne sait toutefois pas quand, ni même s’il il pourra le réintégrer.
« Dès le lendemain du drame, devant l’ampleur des dégâts, il était évident que nous devions nous relocaliser rapidement. Vu notre implication dans le milieu, on savait qu’on serait fortement sollicités. Avec l’aide du Groupe Promutuel, nous avons pu nous organiser très rapidement. Le lundi matin, la grande majorité de nos effectifs travaillaient de chez eux », dit-il.
L’assureur dit avoir été en mesure de verser rapidement des avances substantielles aux gens, parfois même dans les cinq à six chiffres. Promutuel a ainsi traité 175 dossiers de réclamations les deux semaines suivant la tragédie et a versé plus de 2,5 millions de dollars à ses sinistrés.
« On a eu quelques témoignages de gens qui étaient vraiment surpris. Dans leur esprit, ils ne s’attendaient pas à avoir un chèque de 50 000 $ ou 100 000 $ aussi rapidement. Compte tenu de notre présence locale et régionale, on avait une assez bonne idée des gens sinistrés, même si, dans les premiers jours, les sinistrés n’avaient pas la tête à parler d’assurance », dit M. Bélair.
Une présence rapide pour décider
Jacques Fortier, président-directeur de l’expert en sinistre Déry Barette, dit qu’arriver rapidement sur place lui a permis de sécuriser les sinistrés au sujet de leur stress financier. Déry Barrette a ainsi loué une unité mobile de 60 pieds qui a été installée le dimanche suivant la catastrophe, dans le stationnement de FGL. Dès le lendemain, les sinistrés étaient contactés au fur et à mesure que les assureurs assignaient des mandats.
« Nous n’avons rien négligé et nous sommes satisfaits d’avoir fait une différence dans les premiers jours. Chaque sinistré avait son histoire à raconter. L’expert en sinistre est aussi là pour écouter les gens. Cette écoute a pris tout son sens lors de cette tragédie. On était face à des gens qui ont perdu des proches. L’émotion était palpable. On voyait aussi des gens arriver à notre bureau qui avaient 50 ou 60 ans et qui avaient perdu leur maison, d’autres qui étaient des propriétaires de jeunes entreprises et qui ont tout perdu. J’exerce ce métier depuis 36 ans, mais dans ce cas-ci, c’est le côté humain qui est venu me chercher en premier », dit-il.
Un regret
Le président de Déry Barrette dit n’avoir qu’un regret : que l’industrie n’ait pas démontré davantage la différence qu’elle a faite auprès des Méganticois. « Le gouvernement était là, tout comme la Croix-Rouge, la Sécurité civile et la Sureté du Québec. Où était l’industrie de l’assurance? Elle était là, mais elle ne l’a pas montré », dit-il.
Il souligne que le Bureau d’assurance du Canada a obtenu une certaine presse avec son unité mobile. « Aurait-on pu faire plus en matière de communications? J’aurais aimé que les efforts déployés par les assureurs aient eu plus d’échos, pour démontrer la préoccupation que l’industrie a eue pour ses assurés. Ça aurait été une belle occasion de démontrer que les assureurs font vraiment une différence. Les assureurs et tous les intervenants de l’industrie se sont donné la main pour accélérer les choses. Au fil du temps, nous aurions pu dire combien de gens il y avait sur le terrain et combien a été versé aux assurés. Ça aurait été une occasion de prendre notre place juste en disant : «Nous sommes là» », dit-il.