Le régime général d’assurance médicaments du Québec (RGAM) devrait migrer vers un régime universel parce qu’il est devenu dysfonctionnel, affirment quatre médecins signataires d’une note socioéconomique publiée le 8 décembre par l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS).

Selon les chercheurs Alain Vadeboncoeur, de l’Université de Montréal, Marc-André Gagnon, de l’Université Carleton à Ottawa, Steve Morgan, de l’Université de Colombie Britannique et Mathieu Charbonneau, de l’Université Concordia, la flambée des couts du RGAM échappe maintenant à tout contrôle, après 20 ans d’existence et de dérives.

Une hausse continue des franchises, de la coassurance et des primes

« Non seulement ce régime n’a pas généré les économies escomptées sur les finances publiques, mais en plus les ménages et les employeurs doivent composer avec d’importants frais, qui représentent une taxe régressive, par ailleurs en croissance », écrivent-ils.

Ils concluent que le régime actuel subit continuellement une hausse des franchises, de la coassurance et des primes. Ce qui a selon eux des conséquences négatives et prévisibles, sur l’accessibilité aux médicaments pour les bénéficiaires des programmes publics et privés.

Les médicaments plus chers au Québec

Parmi les coupables : le prix total des médicaments, plus élevé au Québec qu’ailleurs au pays. Le document révèle que seuls les États-Unis affichent des dépenses totales en médicaments par habitant plus élevées que le Canada, parmi tous les pays déclarants de l’OCDE en 2014.


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La moyenne par habitant au Québec est supérieure à celle de l’ensemble du Canada. Ils pointent entre autres du doigt le cout élevé de délivrance du générique du médicament contre le cholestérol Lipitor. Au Québec, il est plus élevé que le cout de détail du médicament, « ce qui contribue au cout total le plus élevé au Canada », signalent les chercheurs.


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Des groupes en profitent

Les médecins estiment que les dysfonctions du RGAM bénéficient à des groupes d’intérêts tels que l’industrie de l’assurance, les pharmaciens et les firmes pharmaceutiques. Un régime universel rétablirait selon eux l’équilibre des forces.

« Le Québec doit migrer vers une couverture publique universelle des médicaments d’ordonnance. Elle permettrait d’augmenter le pouvoir de négociation face aux fabricants de produits pharmaceutiques et de mieux intégrer la gestion des médicaments au sein des autres soins de santé. Le gouvernement québécois pourrait par exemple obliger la participation au régime public et permettre la souscription volontaire aux couvertures privées de services de santé supplémentaires et de médicaments ne figurant pas au formulaire du régime public, comme pour le reste du régime d’assurance maladie en vigueur », suggèrent-ils.

S’il obtient une performance comparable aux autres pays qui l’utilisent, le régime universel permettrait au Québec d’économiser environ 3,8 milliards $ (G$) par année, estiment les quatre signataires. Ce serait 12 fois les économies annuelles générées par les rabais volontaires récemment consentis par les fabricants de médicaments génériques, écrivent-ils. « Ces économies permettraient d’améliorer les autres composantes du système de santé, et d’assurer une couverture universelle d’assurance médicaments à meilleur cout. »