Bien qu'aucun assureur de dommages n'ait fait faillite en 2009, la Société d'indemnisation en matière d'assurances IARD (SIMA) estime que le risque d'en voir un devenir insolvable en 2010 demeure élevé.C'est ce qu'indique l'organisme dans son rapport annuel déposé au printemps. Plusieurs raisons expliquent cet état de fait. La SIMA note que les résultats des assureurs ont continué à fléchir en 2009. L'organisme s'inquiète ainsi du fait que l'industrie poursuit sa glissade vers le creux du cycle de l'assurance, où le rendement des capitaux propres des assureurs est plus faible, comme c'est le cas en ce moment. De plus, la SIMA fait remarquer que les ratios combinés des assureurs ont atteint leurs pires niveaux depuis 2002. Par ailleurs, la moitié des assureurs membres de la SIMA ont subi des pertes techniques en 2009.

L'environnement tumultueux dans lequel évoluent les assureurs ajoute au danger d'insolvabilité : contrecoups de la crise financière, détérioration des conditions d'indemnisation, augmentation des couts liés aux sinistres et décisions désavantageuses des tribunaux font accroitre ce risque. « Si l'on se fie au passé, le risque d'insolvabilité atteint son paroxysme au creux du cycle de l'assurance et pendant les 12 à 18 mois de reprise subséquents. Les assureurs les plus faibles ne disposent pas des capitaux nécessaires pour soutenir leurs activités au cours du cycle suivant », indique la SIMA.

L'organisme s'inquiète aussi de la baisse des revenus d'investissements des assureurs de dommages canadiens, surtout qu'elle survient au même moment que la hausse des couts reliés aux sinistres. La SIMA fait remarquer qu'au début des années 1990, les revenus de placement équivalaient à 20,6 % des couts liés aux sinistres. Cette proportion a chuté au début des années 2000 pour se stabiliser à 4,5 %. En 2009, toutefois, les revenus de placement n'ont totalisé que 3 % du cout des sinistres, un creux historique.

La crise a aussi soumis les portefeuilles de placements des assureurs à une certaine volatilité, souligne la SIMA. En 2008, les assureurs ont vu la juste valeur de leurs investissements baisser de 2,5 % pour atteindre 1,7 milliard de dollars ( G$). Bien que cette baisse soit modeste par rapport à l'ensemble de l'industrie, les pertes étaient le lot d'un petit nombre de sociétés. La reprise sur les marchés financiers au cours des trois derniers trimestres de 2009 a permis aux assureurs de récupérer une grande partie de la valeur perdue.

« En 2009, aucun assureur IARD canadien n'a été en difficulté financière à cause d'investissements liés à des prêts à risque ou à la tourmente sur les marchés boursiers. Toutefois, 2010 laisse entrevoir un accroissement du risque de taux d'intérêt. Il y a une forte corrélation (73 %) entre la volatilité des taux d'intérêt et l'insolvabilité. Depuis 1970, les taux d'intérêt ont grimpé 19 fois d'au moins un point de pourcentage et, dans la plupart des cas, un assureur a fait faillite cette année-là », écrit la SIMA.

Les nouvelles normes comptables poseront un risque

L'organisme voit aussi un risque d'insolvabilité dans la mise en place des nouvelles Normes internationales d'information financière (NIIF, mieux connues sous leur acronyme anglais IFRS). Les assureurs de dommages devront s'y conformer dès 2011. Selon la SIMA, l'application de ces normes comptables devraient se traduire par un accroissement du risque lié à l'information financière, particulièrement dans le cas des plus petits assureurs.

La SIMA tient cette affirmation à la lumière d'un sondage mené par la firme Ernst & Young (E&Y) en 2006. La firme comptable avait alors interrogé des assureurs sur l'application des nouvelles normes, dans les pays qui avaient déjà opéré la transition à cette date. Les deux tiers des répondants ont signalé une augmentation du risque lié à l'information financière. Cette augmentation du risque était liée en grande partie aux complexités techniques des NIIF, aux corrections manuelles qu'elles demandaient et à la gestion de temps exigée par leur mise en œuvre.

« En 2010, les assureurs canadiens pourraient être confrontés à des difficultés semblables, dit la SIMA. Comme les assureurs devront fournir des données comparatives avec leur exercice précédent, ils commenceront la mise en œuvre opérationnelle en 2010 pour être prêts à ouvrir leur bilan selon les NIIF. »

Rappel du danger

Les risques liés au climat et sinistres météorologiques sont une autre source d'inquiétude pour la SIMA. Bien que les assureurs aient tiré des leçons de la crise du verglas de 1998, l'organisme souligne que les catastrophes subies en 2009 en Alberta et en Ontario sont un rappel du danger posé par ce type d'événements à la santé financière des assureurs de dommages.

« Les sinistres catastrophiques de 2009 font ressortir l'incidence des risques climatiques sur l'industrie et un virage dans l'interprétation des tendances relatives aux couts des sinistres. La nature des couts en assurance de biens se transforme. Par le passé, l'assurance de biens était synonyme d'assurance incendie. Depuis 2004, les couts liés aux sinistres d'origine météorologique (eau et vent) ont dépassé ceux imputables aux incendies. Ces sinistres sont maintenant la plus grande source de couts d'indemnisation en assurance de biens », ajoute la SIMA.

Un élément rassure toutefois la SIMA quant au risque de faillite d'un assureur. L'organisme a constaté qu'ils ont accumulé passablement de capital entre 2003 et 2007, bien qu'il y ait d'importants écarts entre eux, ainsi que dans le degré d'exposition à divers risques. Néanmoins, la SIMA affirme que différents indicateurs montrent que les assureurs de dommages canadiens affrontent la phase de repli du cycle avec un solide capital.

« Par le passé, les risques liés à la souscription ont été la principale cause d'insolvabilité en assurance de dommages. Plus précisément, les faillites sont le plus souvent imputables à une tarification inadéquate, particulièrement au creux du cycle de l'assurance. Par le passé, on a constaté une très forte corrélation entre l'insolvabilité et une augmentation du cout des sinistres supérieure à la croissance du capital. En 2009, les assureurs ont commencé à combler l'écart entre la croissance du cout des sinistres et la croissance des primes », spécifie la SIMA.