Les maladies du cœur ont tendance à se développer environ dix ans plus tard chez les femmes que chez les hommes, mais l’écart entre les sexes diminue à mesure qu’ils vieillissent et le risque pour les femmes augmente à mesure qu’elles progressent en âge.
Pourquoi les femmes plus jeunes seraient-elles moins à risque que les hommes de développer des maladies du cœur ? D’où proviendrait cette protection ?
« Des données indiquent que des hormones sexuelles, soit les estrogènes, ont sur les femmes un effet cardioprotecteur qui peut expliquer les taux d’incidence plus faibles chez les femmes plus jeunes que chez les hommes ou les femmes ménopausées du même âge », explique l’Agence de santé publique du Canada.
Toutefois, cet effet protecteur disparait peu après la ménopause qui entraine une diminution de ces hormones sexuelles. Le risque de coronaropathie augmente alors rapidement. Il est démontré que des facteurs de risque chez les femmes ménopausées, comme l’augmentation de la cholestérolémie et une prévalence élevée d’hypertension et de diabète, les rendent plus vulnérables aux maladies du cœur. Même si les taux de mortalité associés aux maladies du cœur sont en déclin de manière générale, cette baisse a été plus lente chez les femmes.
En outre, comme les maladies du cœur chez les femmes touchent généralement les petits vaisseaux sanguins du cœur plutôt que les grandes artères coronaires, les symptômes qu’elles éprouvent peuvent différer de ceux qui sont ressentis par les hommes. Comme il leur est plus difficile de reconnaitre les signes d’une crise cardiaque, il a été démontré que les femmes attendent plus longtemps avant d’agir. Cette lenteur peut contribuer au fait que leurs résultats sont moins favorables pour les femmes que ceux des hommes, notamment un taux plus élevé de mortalité en milieu hospitalier, ajoute l’Agence.
Un portrait alarmant
Les maladies du cœur forment ainsi la cause principale de décès prématuré chez les femmes au Canada et les signes précurseurs d’une crise cardiaque sont passés inaperçus chez 78 % de celles qui sont touchées. Les maladies du cœur emportent une Canadienne toutes les 20 minutes. Elles sont cinq fois plus nombreuses à décéder d’une maladie du cœur que du cancer du sein.
«Les femmes qui font une crise cardiaque sont plus susceptibles d’en mourir ou de subir un deuxième événement cardiaque que les hommes», dénonce la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada dans un bulletin publié en 2018.
Aussi, après une crise cardiaque, les femmes sont moins sujettes à se faire prescrire des médicaments qui peuvent les aider comme la médication pour réguler leur pression artérielle ou réduire leur taux de cholestérol. De toutes les personnes frappées par la dissection spontanée de l’artère coronarienne (DSAC), 90 % sont des femmes. Les femmes qui ont fait une crise cardiaque seraient aussi deux fois moins portées que les hommes à faire de la réadaptation cardiaque, qui est pourtant primordiale pour éviter de subir une récidive.
Des médicaments aux effets indésirables
Par ailleurs, on constate que certains médicaments pour le cœur causent davantage d’effets indésirables chez les femmes que chez les hommes et la gravité de ces effets peut même être accrue. Elles présentent un plus grand risque de souffrir de troubles du rythme cardiaque d’origine médicamenteuse et le risque de complications hémorragiques associé à plusieurs traitements courants, comme l’angioplastie, est deux fois plus élevé chez elles.
Ce qui n’aide pas leur cause et même l’aggrave, les femmes sont sous-représentées dans les travaux de recherche en cardiologie. Les deux tiers des études cliniques sur les maladies du cœur portent sur les hommes seulement. Un grand nombre des examens visant à diagnostiquer une crise cardiaque ayant été créés pour les hommes et testés sur ceux-ci, il se pourrait, déplore la Fondation, qu’ils ne parviennent pas à détecter une maladie du cœur ou une crise cardiaque chez une femme.
«Dans le cas des maladies du cœur, dénonce le Dr Quoc Dinh Nguyen, professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et gériatre, la sous-représentation la plus importante des femmes et des gens âgés concerne la maladie coronarienne et l’insuffisance cardiaque. Par exemple, 54,6 % des personnes atteintes de maladie coronarienne aux États-Unis sont des femmes, mais les essais cliniques sur cette maladie ne comptent que 27,4 % de femmes».
Dans une étude nommée Circulation: Cardiovascular Quality and Outcomes menée par le Dr Nguyen, il indique que les chercheurs continuent de tester de nouvelles interventions sur des personnes de 63 ans d’âge moyen, composée en grande majorité d’hommes (71 %) alors que la population générale atteinte de maladie cardiaque est composée en majorité de femmes et de personnes âgées entre 68 et 69 ans.
Comme les signes d’une crise cardiaque sont différents chez la femme (nausée, fatigue soudaine, essoufflement) que ceux des hommes (douleur à la poitrine, à l’épaule gauche, sueurs), elles sont plus enclines à retarder leur transport au service des urgences et donc moins susceptibles d’y recevoir rapidement le traitement que nécessite leur état alors que le temps est un facteur extrêmement précieux pour réduire les risques de mortalité et de morbidité.