Des entreprises en technologie de l’assurance ayant uni leurs forces démontrent, dans un nouveau rapport, que les feux de forêt redéfinissent les coûts de l’assurance habitation et de l’abordabilité du logement. Un autre rapport publié récemment par l’industrie s’attarde quant à lui aux facteurs à l’origine de la hausse des primes d’assurance.
Dans la première analyse, le site de comparaison de prix MyChoice, en collaboration avec la plateforme immobilière numérique Wahi, a comparé les primes d’assurance actuelles à celles d’il y a deux ans. Les résultats illustrent une hausse rapide des primes, dont le montant augmente de manière significative par rapport aux remboursements hypothécaires des consommateurs.
La ville de Medicine Hat, en Alberta, se démarque comme le marché le moins abordable au pays en matière d’assurance habitation, avec une prime annuelle moyenne en hausse de 24%, atteignant 3 875 $. « Les paiements d’assurance représentent maintenant 19% de ceux d’un prêt hypothécaire typique, soit le ratio le plus élevé parmi toutes les villes analysées », observe le rapport.
Les trois villes où l’inflation des primes d’assurance habitation a été la plus marquée sont Kamloops et Kelowna, en Colombie-Britannique, avec des hausses respectives de 98% et 52%, ainsi que Regina, en Saskatchewan, où les primes ont augmenté de 59% entre 2023 et 2025.
Un marché sous pression
Pour comprendre les pressions qui alimentent l’inflation des primes, au-delà des feux de forêt, un rapport distinct du Bureau d’assurance du Canada (BAC) note que les signes de tension se multiplient dans les régions les plus exposées aux risques. « Le Canada doit agir avant que la situation ne devienne critique, comme c’est le cas dans d’autres pays », affirme le BAC.
Le rapport, intitulé Un marché solide, mais la pression s’accentue, appelle les gouvernements à revoir la manière dont les habitations sont construites et situées, à investir dans la résilience, à aider les communautés à réduire leurs risques et à combler les lacunes du marché, tout en évitant les interventions politiques qui affaibliraient la capacité du marché.
La flambée des coûts de construction
Outre la fréquence et la gravité croissantes des catastrophes naturelles, d’autres facteurs contribuent à la hausse des primes, notamment l’augmentation des coûts de construction, la pénurie de main-d’œuvre spécialisée, les tarifs douaniers et la hausse des coûts de réassurance.
Selon Statistique Canada, les coûts de construction ont grimpé de 68% entre 2019 et 2025. Le BAC indique pour sa part que les coûts de remplacement des habitations ont bondi de 24% depuis 2019. Le prix du bois d’œuvre a augmenté de 30%, les produits métalliques et matériaux de construction ont vu leur prix grimper de 43%, les machines et équipements de 23%, et le ciment, le verre et les autres produits minéraux non métalliques de 41%.
« Ces tendances entraînent une hausse du coût des sinistres liés aux biens personnels, surtout dans les régions du pays où les catastrophes naturelles sont plus fréquentes et plus graves », indique le rapport.
En Alberta, les assureurs auraient déboursé 1,18 $ en sinistres et en frais d’exploitation pour chaque dollar perçu en primes d’assurance de biens en 2024. « L’augmentation du coût des sinistres a contribué à un rendement des capitaux propres de -11 % pour l’assurance des biens personnels en Alberta. »
Des incendies catastrophiques de plus en plus coûteux
Dans une récente allocution prononcée devant l’Association canadienne des chefs de pompiers, Liam McGuinty, vice-président des affaires fédérales au BAC, a souligné que les pertes assurées liées aux incendies catastrophiques, c'est-à-dire celles dépassant le seuil officiel d’une catastrophe naturelle – 25 millions de dollars (M$) par le passé, et 30 M$ aujourd’hui –, sont passées d’une moyenne annuelle de 72 M$ entre 2005 et 2014 à plus de 746 M$ au cours des dix dernières années.
« Le Canada devient un pays de plus en plus risqué en matière de catastrophes naturelles », affirme-t-il en entrevue avec le Portail de l’assurance sur les facteurs à l’origine de la hausse des primes d’assurance de biens.
Il note qu’en vertu des politiques actuelles, le pays s’apprête à construire 200 000 logements dans des zones à risque d’incendie de forêt et plus de 500 000 dans des zones à risque d’inondation. Bien que le gouvernement fédéral se soit engagé à ne pas financer de projets résidentiels dans des secteurs à haut risque, Liam McGuinty insiste sur l’importance de concrétiser cet engagement.
Le BAC presse aussi le gouvernement de moderniser les codes du bâtiment et d’aider les municipalités à investir dans leurs infrastructures.
Quatre principaux facteurs
Selon M. McGuinty, quatre facteurs principaux expliquent la hausse des primes d’assurance habitation :
- la fréquence et la gravité croissantes des catastrophes naturelles ;
- la flambée des coûts de reconstruction, qui dépassent largement l’inflation ;
- la pénurie de main-d’œuvre spécialisée, particulièrement aiguë dans les régions rurales ;
- les choix de politiques publiques quant à l’emplacement des constructions résidentielles.
« Il est temps de prendre des décisions politiques plus éclairées, qui tiennent compte du nouveau profil de risque croissant du pays », dit-il.