Le premier semestre de 2014 a été relativement calme en matière de catastrophes naturelles. Comme en 2013, l’exception a eu cours en Amérique du Nord. L’hiver rigoureux qu’ont connu certaines parties des États-Unis et du Canada a fait monter les réclamations chez les assureurs. Des scientifiques se demandent toutefois si l’hiver rigoureux que nous venons de connaitre ne deviendra pas la norme au cours des prochaines années.À travers le monde, les pertes économiques liées aux catastrophes naturelles se sont chiffrées à 42 milliards de dollars (G$) pour les six premiers mois de 2014, selon le réassureur Munich Re. Les assureurs ont dû éponger 17 G$ de ce montant. C’est bien en deçà des pertes des dix dernières années, qui se chiffrent à 95 G$ pour l’économie mondiale et à 25 G$ pour les assureurs.

« Ce sont de bonnes nouvelles, mais il ne faut pas oublier que le risque que posent les catastrophes naturelles demeure. Les mesures de mitigation des cataclysmes doivent demeurer à l’avant-plan de nos préoccupations. De telles mesures ont du sens d’un point de vue macroéconomique, étant donné que les pertes moindres qui en découlent génèrent des économies dépassant de plusieurs fois les investissements initiaux qu’elles demandent », dit Torsten Jeworrek, membre du haut conseil de Munich Re et responsable de son portefeuille de réassurance.

Tempêtes de neige à Tokyo

La catastrophe la plus couteuse est survenue au Japon. Peu habitué à affronter les rigueurs de l’hiver, le pays du Soleil-Levant a notamment vu sa capitale, Tokyo, faire face à une série de tempêtes de neige en février. Plusieurs villes du Japon ont ainsi dû composer avec des accumulations de neige pouvant atteindre un mètre, ce qui est arrivé très rarement dans leur histoire. Plusieurs accidents en ont résulté, en particulier des effondrements de toitures. Le Japon s’est retrouvé avec une facture de 5 G$, dont les assureurs ont épongé la moitié.

L’hiver a aussi sévi en Amérique du Nord, alors que les températures froides et les accumulations de neige se sont prolongées plus longtemps qu’à l’habitude dans plusieurs parties du Canada et des États-Unis. Au total, les pertes ont atteint 3,4 G$, la majeure partie étant couverte par les assureurs. On y a aussi enregistré des pertes en assurance des entreprises, alors que plusieurs commerces se sont vus obligés de fermer leurs portes quelque temps.

Munich Re donne en exemple le cas de la ville d’Atlanta, qui a subi un blizzard à la fin de janvier. Même si seulement quelques centimètres de neige sont tombés, cela a été suffisant pour paralyser la ville. La glace et la neige ont rendu les chaussées impraticables, la ville n’ayant pas les équipements nécessaires pour déneiger et déglacer les routes.

Une nouvelle norme?

Ces extrêmes survenus en Asie et en Amérique du Nord se sont produits alors que plusieurs régions d’Europe ont connu des températures anormalement douces. Pour Peter Höppe, directeur du département de recherche des risques géographiques de Munich Re, il y a un lien à faire entre ces variations de température et les changements survenus dans les courants marins.

« Les scientifiques débattent intensément du pourquoi de tels changements dans les courants marins. Ainsi, la fréquence de telles conditions météorologiques extrêmes pourrait s’accroitre dans le futur », dit-il.

Le doux hiver européen a toutefois amené son lot de catastrophes. L’Angleterre et les Balkans ont été aux prises avec des inondations, respectivement en février et en mai. De forts vents ont aussi frappé l’Allemagne en juin, plus particulièrement à Düsseldorf. Certaines régions avoisinantes en France et en Belgique ont de plus subi des dégâts.

Des tornades ont à nouveau frappé les États-Unis, mais moins qu’à l’habitude. Nos voisins du Sud ont enregistré 721 tornades au cours des six premiers mois de l’année, comparativement à une moyenne annuelle de 1 026 au cours des dix dernières années.

Ce sera la faute à ENSO

Est-ce que le second semestre de 2014 sera aussi calme que le premier? Tout dépendra des caprices d’ENSO, un phénomène météorologique ayant les effets contraires d’El Niño et de la Niña, prévoient les scientifiques de Munich Re. ENSO pourrait ainsi se faire sentir à plusieurs endroits sur le globe, puisqu’il fera varier les températures près de l’équateur dans l’Océan Pacifique, affectant ainsi les courants marins.

El Niño devrait aussi être de la partie cette année. Son passage se traduit généralement par moins d’ouragans dans le bassin atlantique, mais par plus de typhons du côté de l’océan Pacifique. Ceux-ci ont toutefois tendance à moins toucher terre en raison d’El Niño. Son passage sera surveillé de près en vue de 2015. Si El Niño est fort en 2014, il est prévisible qu’on verra l’an prochain le passage de la Niña, qui fait généralement augmenter le nombre et la force des ouragans dans l’Atlantique.