De grands agents généraux comme Groupe Cloutier et Groupe financier Horizons croient que les petits agents généraux pourront se démarquer dans le futur. Ils devront toutefois bien jouer leurs cartes, préviennent-ils.

Michel Kirouac, vice-président directeur général du Groupe Cloutier, estime que certains MGA faisant affaire avec un petit nombre d’assureurs et embauchant une cinquantaine de conseillers réussissent très bien. « Il y a de la place pour les plus petits joueurs », a-t-il dit lors d’un panel tenu au Congrès de l’assurance et de l’investissement.

Le Groupe Cloutier est probablement le plus petit joueur dans le secteur des fonds communs de placement. Quand il s’est lancé en 2007, il avait des actifs de 67 millions de dollars (M$). « On nous disait : “Vous êtes fous, il faut gérer des milliards”. On a réussi, nous sommes rendus à trois milliards de dollars (G$). Ça se fait, mais c’est important d’avoir les ressources humaines pour mener le tout », dit-il.

Les plus gros joueurs se font une concurrence très forte pour mettre la main sur les meilleurs employés, non seulement en vente, mais aussi en markéting, en administration, en informatique, notamment. Deux agents généraux qui unissent leurs forces sont ainsi mieux armés pour se doter des meilleurs outils et appuyer adéquatement leur force de vente, ajoute M. Kirouac.

Il n’y a pas de formule magique lorsqu’on veut fusionner deux agents généraux. « Ce sont deux entrepreneurs, chacun avec sa politique, ses façons de faire, son actionnariat », indique M. Kirouac.

Essais et erreurs

Ailleurs au Canada, d’autres essais ont fonctionné, comme cela a été le cas de Bridgeforce. Cette entreprise a regroupé cinq agents généraux qui se sont dotés de ressources communes, notamment en matière de conformité.

Au Québec aussi, des efforts similaires ont été menés dès 1995, poursuit M. Kirouac en donnant l’exemple de Gilles Cloutier, Daniel Labonté et Réal Parent. « Ils ont voulu se donner un “back-office” commun en regroupant cinq agents généraux. Gilles nous a résumé ça en disant : “On a eu 10 maudits bons soupers, mais ça n’a jamais rien donné”. Oui, il faut essayer des choses, au lieu de simplement se dire qu’il faut vendre parce qu’on n’est pas assez gros », dit M. Kirouac.

James McMahon, président, région du Québec, chez Horizons, estime qu’il y aura d’autres fusions et acquisitions dans l’industrie. « Pour certains agents généraux plus petits, mais très bien nichés, avec une offre de service bien distincte, ils peuvent survivre », dit-il.

Selon M. McMahon, les plus petits joueurs qui ne sortent pas du lot auront de la misère à trouver des capitaux pour financer la nécessaire expansion de leur réseau de distribution et les outils de support à la force de vente.

Michel Kirouac fait observer que l’appétit pour le risque diminue en vieillissant. Les entrepreneurs prennent de l’âge, dans ce secteur comme dans les autres.

« Rendu en fin de carrière, c’est moins évident d’avoir envie d’investir beaucoup d’argent pour acquérir un concurrent. C’est pour ça que les gens parlent de vente ou de fusion. Être soi-même l’acquéreur, ça demande beaucoup d’argent et un peu de courage. »

La lourdeur de la conformité

Le poids de la règlementation est un défi important pour les agents généraux, ajoute Pierre Vincent, vice-président, assurance individuelle chez iA Groupe financier. La tendance est observable partout au Canada. On veut que le conseiller, surtout lors de la vente de fonds distincts, soit tenu de faire affaire avec un distributeur qui s’assure des règles de conformité comme c’est le cas pour les fonds communs de placement.

Le régulateur s’attend à ce que l’analyse des besoins ait été faite et que le bon produit ait été vendu au client. Si ce conseiller fait des affaires avec plusieurs assureurs et doit recevoir la visite des gens de la conformité de chacun d’eux pour vérifier sa pratique, il est probable qu’il changera ses façons de faire, explique M. Vincent.

Michel Kirouac constate que les mentalités ont évolué ces derniers mois. Des agents généraux québécois se sont regroupés pour soumettre un mémoire à l’Autorité des marchés financiers. Ils y affirment que le conseiller devrait idéalement être associé à un agent général.

M. Kirouac n’est toutefois pas certain que l’on se rendra jusque-là. « Si le régulateur force le conseiller à transiger avec un seul agent général ou un distributeur pour tous ses besoins en services financiers, ça fera mourir tous les petits joueurs. Nous avons 18 assureurs, Horizons aussi, Les Assurances Hollis (anciennement connu sous le nom de CNCA) aussi. Pour celui qui n’en a que deux ou trois, le conseiller fera quoi ? »