Le paysage de l’industrie de l’assurance est en train d’évoluer. Les changements démographiques, climatiques, technologiques et socioéconomiques créent un nouvel environnement d’affaires qui comporte ses risques, mais aussi des occasions dont peuvent profiter les assureurs, affirme la firme de consultation KPMG.

KPMG a récemment publié la deuxième édition du sondage annuel sur les risques et occasions dans le secteur de l’assurance au Canada. Mary Trussell et Louis Regimbal, tous deux associés au sein de la firme de consultation, en ont présenté les conclusions lors d’une conférence le 29 avril dernier, à Québec.

« Plus que jamais, l’accent doit être mis sur le client, dit-elle. Il faut faire cette transformation pour rester concurrentiel, voire être le meneur de son industrie », dit Mme Trussell. Les obstacles et les contraintes se multiplient, mais elle juge que les assureurs pourront les surmonter en plaçant les clients au cœur de leur stratégie d’affaires.

5 enjeux

En cette ère numérique qui bouleverse les modes de distribution, les assureurs doivent affronter cinq enjeux. La capacité d’exercer ses activités en mode numérique est le premier. En second lieu, Mme Trussell cite la capacité de récupérer et d’utiliser la masse d’information dont ils disposent pour développer le marché.

trussell_mary_articleLes répondants au sondage reconnaissent majoritairement que l’analyse de l’expérience de l’assureur ne suffit plus à prévoir les revenus futurs et les actions à prendre en matière de gestion de risque. « Il faut modifier l’offre faite aux consommateurs », insiste Mme Trussell. Pour y arriver, on doit régler le troisième enjeu soulevé, celui de la désuétude des systèmes.

Le quatrième enjeu soulevé est celui de la cybersécurité. Les assureurs de personnes classent ce thème au 5e rang parmi leurs 10 principales préoccupations en 2015. Chez les assureurs de dommages, la cybersécurité arrive au 3e rang.

Le cinquième enjeu, celui des ressources humaines requises pour apporter les changements requis dans l’industrie, exigera des assureurs qu’ils impliquent davantage leur personnel. Pour cela, ils doivent modifier leur mode de recrutement et de rétention de leurs employés, souligne Mme Trussell.

Elle parle même de la nécessité d’une nouvelle culture organisationnelle où l’innovation et la collaboration entre les personnes et les départements sont mises à l’avant-plan. Mme Trussell rappelle que le spécialiste de l’analyse des données est le travail qui sera bientôt le plus recherché par les employeurs, selon les gestionnaires de ressources humaines. Et le spécialiste en cybersécurité arrive au 3e rang. Selon elle, la gouvernance numérique devient un indicateur clé de la performance des assureurs, et leur degré de maturité à cet égard est critique pour leur pérennité. Afin de communiquer cette nécessité de changement dans leur organisation, ils devront certes en exprimer clairement la volonté, mais aussi préciser à leurs troupes pourquoi il faut le faire, comment y arriver et déterminer les priorités d’action.

Apprendre de ses erreurs

« Nous sommes à un tournant », ajoute-t-elle. Cinq conditions doivent être réunies pour franchir le cap. Cette évolution vers l’ère numérique doit être axée sur les capacités et l’expertise du personnel. Il faut mener une veille très serrée à l’égard des risques émergents. Comme dans les autres secteurs, il faut essayer et apprendre de ses erreurs. Il faut savoir réagir avec agilité aux demandes des clients et créer rapidement les produits qu’ils demandent.

Enfin, il faut apprendre à aimer le risque associé aux nouvelles affaires, ce qui n’est pas évident pour les assureurs qui vivent de l’aversion au risque de leurs clients. « Les assureurs ont souvent peu de contacts directs avec les clients, contrairement aux distributeurs. Cessez de surveiller ce que font vos concurrents, et soyez attentifs à ce que vous disent vos clients », répète Mme Trussell. Les assureurs font des affaires dans une vision à long terme, où ils vendent des produits qui ne serviront que bien des années plus tard. « Mais ils doivent apprendre à expérimenter », conclut-elle.

Interrogée à la sortie de la salle par le Journal de l’assurance, Mme Trussell dit ne pas être inquiète à l’égard de la capacité des assureurs à faire preuve d’agilité. Elle note que de nombreux assureurs sont actifs depuis de nombreuses décennies, voire plus d’un siècle. Ceux-là ont donc su montrer leur capacité à s’adapter aux besoins de ses clients, « sinon ils ne seraient plus là », dit-elle.

Est-ce que cette capacité d’innovation est présente chez les assureurs canadiens? « Oui et ils n’ont pas le choix, réplique-t-elle sans hésiter. Nous sommes en présence d’un marché mature, et les assureurs doivent faire évoluer leurs pratiques en fonction des besoins des clients. » Elle cite l’exemple de la longévité et de la nécessité de faire durer la valeur des produits de rentes. Elle parle aussi des changements apportés dans les polices en assurance de dommages des biens des particuliers.