Après quatre années d’existence et un succès mitigé, la Fédération des courtiers d’assurance indépendants du Québec (FCAIQ) tente une nouvelle relance. Le respect des règles entourant les limites d’actionnariat des assureurs dans des cabinets sera au cœur de leur action, car la Fédération clame qu’il y a des irrégularités en la matière. En ce moment, un assureur ne peut détenir plus de 20 % des actions d’un cabinet.L’invitation lancée par l’Autorité des marchés financiers à participer à la consultation sur la révision de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (voir encadré) a incité les dirigeants de l’organisme à tenter de relancer l’initiative.

C’est ce qu’ont révélé ses dirigeants lors de leur premier congrès annuel tenu à Boucherville le 6 juin. Une trentaine de propriétaires et dirigeants de cabinets de courtage y ont participé. Le Journal de l’assurance y a aussi assisté.

« Cesser de se taire »

« Notre but est d’atteindre une transparence et un jeu équitable, dans une industrie qui vend du conseil. Il faut cesser de se taire sur ce sujet », a dit son porte-parole, Louis Cyr, qui a livré un long plaidoyer sur la question de la limite du 20 %. Il rappelle que c’est en 1987 que la loi 134 a introduit la règle du 20 %.

En 1998, la règle a été reconduite avec l’avènement de la loi 188. Selon M. Cyr, des assureurs européens ont alors acheté 100 % des actions de cabinets à l’aide de sociétés paravents et de sociétés canadiennes. « Ce fut le début de l’illégalité dans l’industrie », dit-il.

L’Autorité a fait enquête sur la question en 2005, et des assureurs ont dû payer des amendes comme conséquence, en 2007. « Malgré tout, l’illégalité s’est poursuivie, dit M. Cyr. On n’a qu’à prendre les règles de divulgation de concentration. Si vous appelez chez le Groupe Promutuel, dans le message d’attente, vous entendrez que leurs agents vendent exclusivement des produits de Promutuel. Ce n’est pas dur de respecter la loi. On a vu des cabinets obligés de jeter des cartes d’affaires à la poubelle puisqu’il manquait un “s” à “assurance de dommages” sur celles-ci. Or, rien n’oblige un cabinet à dévoiler ses liens de propriété avec un assureur sur ses affiches », dit-il.

C’est dans ce contexte que la FCAIQ a vu le jour, en 2009, dit M. Cyr. Il s’agissait d’une initiative du cabinet lavallois Invessa Assurances et services financiers. Le premier président de la FCAIQ était d’ailleurs le président d’Invessa, Robert Beauchamp. Celui-ci s’est retiré en mars 2010 et a cédé la place à Sylvain Racine, président du cabinet montréalais Racine Chamberland.

Lors du congrès du 6 juin, M. Cyr a affirmé que M. Beauchamp a quitté son poste à la suite de représailles. « On a attaqué le messager plutôt que le message. On lui a fait comprendre “qu’il se pourrait que…”. Difficile de poursuivre dans de telles conditions », a affirmé M. Cyr.

Les attaques contre la FCAIQ ont aussi pris d’autres formes, dit M. Cyr. Une page dédiée à la Fédération existe sur le réseau social LinkedIn. Or, ce ne sont pas les dirigeants de la FCAIQ qui l’ont créée, a révélé M. Cyr. « Il existe même un lien pour envoyer des questions. On l’a fait et aucun des membres de l’exécutif n’a reçu les courriels envoyés », dit-il. La FCAIQ entend toutefois prendre les moyens pour corriger la situation.

La FCAIQ n’a pas levé de cotisation auprès de ses membres depuis 2011. « Ce fut le début d’une période léthargique, de réflexion et de remise en question pour la Fédération », dit M. Cyr. Une campagne publicitaire fut néanmoins amorcée en 2012, rappelle-t-il.

Malgré l’absence de collecte de fonds, la FCAIQ possédait 100 000 $ dans ses coffres, à la fin de 2012. Elle en possède encore 50 000 $, a affirmé M. Cyr. La Fédération demandera une nouvelle cotisation pour le 1er septembre. La tarification variera selon la taille du cabinet. Un rabais de 50 % sera offert aux cabinets en affaires depuis moins d’un an.

« On ne peut ignorer les nouveaux entrepreneurs qui se lancent en affaires. C’est par nos conseils et notre mentorat qu’ils prendront notre relève et assureront la pérennité du courtage indépendant. Il est tout de même important pour nous qu’ils paient une cotisation, pour montrer leur engagement envers les services qu’on leur offre », dit M. Cyr.

Sollicités à investir lors de la création de l’organisme, en 2009, les assureurs ne le seront pas de nouveau pour soutenir financièrement la FCAIQ. « On veut démontrer ce qu’on peut faire avant de leur demander de s’impliquer financièrement », dit M. Cyr.

La Fédération a revu son image de marque, ainsi que le sceau que ses membres peuvent utiliser pour afficher qu’ils sont 100 % indépendants. La FCAIQ travaillera d’ailleurs à ce que ce sceau soit davantage connu du public.

Accès au sceau

L’adhésion à la FCAIQ permettra aux membres d’avoir accès à ce sceau, notamment pour l’afficher sur leurs cartes professionnelles, leur papèterie et leur site Web. Ils pourront aussi commander des affiches, des épinglettes, ainsi que des documents promotionnels pour les remettre à leurs clients.

L’organisme a d’ailleurs embauché la firme Tapage Créations à titre de firme de relations publiques. Cette dernière assurera la permanence de l’organisme qui ne veut pas se doter d’employés, mais plutôt miser sur les outils qu’il peut offrir à ses membres. « On veut être à la hauteur des attentes, sans les frais fixes d’une permanence, et que nos revenus servent à nos besoins. On vise à avoir une structure ultra-mince », dit M. Cyr.

La Fédération affiche qu’elle compte près d’une trentaine de membres sur son site Internet. Elle estime qu’environ 300 cabinets pourraient correspondre à ses critères d’effectif, lesquels sont de n’avoir aucun assureur parmi les actionnaires de son cabinet et d’en avoir le contrôle global.

Les dirigeants de la FCAIQ reconnaissent qu’il sera difficile d’obtenir la preuve du respect de ces deux conditions, mais elle compte développer un mécanisme au cours de la prochaine année pour s’en s’assurer.

« On a aussi grand espoir que le Registraire des entreprises en vienne à exiger la divulgation des actions votantes qu’on retrouve dans une entreprise, mais aussi des actions participantes. Pour l’instant, on devra se contenter d’une déclinaison volontaire », dit M. Cyr.

Il a aussi tenu à préciser qu’il ne voulait pas empiéter sur le terrain de jeu du Regroupement des cabinets de courtage d’assurance du Québec (RCCAQ). Il invite même les membres de la FCAIQ à être membre des deux organismes.

Ne pas nuire au RCCAQ

« Le RCCAQ est celui qui le moins d’intérêt à voir éclore la FCAIQ. C’est un organisme de représentation globale. Malgré tout, on ne peut lui demander de s’occuper uniquement des courtiers indépendants », dit M. Cyr.

Recruter des membres qui s’impliquent et qui proviennent de l’extérieur de Montréal sera un autre défi pour la Fédération. Pour pallier ce problème, elle s’est dotée d’une salle de conférence virtuelle, qui lui permettra de tenir des réunions à distance.