Les assureurs ne s’entendent pas sur les chiffres, mais l’obésité a bel et bien un impact sur les coûts, donc sur les primes, des régimes d’assurance collective.Marcel Bilodeau, de La Capitale, dénonce l’impact sur les primes d’assurance collective de ces kilos que les Québécois accumulent sans cesse.

Difficile toutefois de créer un lien direct entre l’obésité et la prise de médicaments ou l’absentéisme. Mais ce lien existe, insiste M. Bilodeau, « Si l’obésité a augmenté de 30% au cours des dix dernières années, ça se répercute sur les primes. Il y a des impacts indirects sur le diabète, l’hypertension, les maladies cardiovasculaires, et on dit même que ça influence certains cancers », poursuit-il. L’augmentation de la prise de médicaments est aussi, dans certains cas, liée à des problèmes d’obésité.

Il en est de même pour les causes d’absentéisme. Après les maladies nerveuses, les absences liées à des problèmes musculo-squelettiques arrivent au second rang des réclamations chez l’assureur, souligne M .Bilodeau. Il est fort probable qu’une partie de assurés atteints soient aussi des personnes obèses.

L’actuaire Jacques L’Espérance pense aussi que l’impact sur les primes est déjà perceptible. Cependant, il n’est pas possible de chiffrer ces dépenses. « La cause d’une absence ou d’une invalidité est rarement liée à l’obésité, si ce n’est l’obésité morbide », lance M. L’Espérance.

Mais, ajoute-t-il, comment savoir si le remplacement d’un genou résulte d’une vieille blessure de hockey ou si c’est à cause d’un poids excessif?

Des tarifs adéquats

Même s’il est impossible de déterminer précisément les coûts engendrés par l’obésité dans les régimes d’assurance, ces derniers sont adéquatement tarifés, estime M. Bilodeau.

« L’obésité n’est pas retenue pour établir la hausse des primes, dit-il. Mais la hausse du coût des médicaments au cours des dernières années nous permet de faire des projections. » En bout de ligne, l’augmentation annuelle des primes permet de réduire les risques de sous tarification pour l’assureur.

Un tel risque de sous tarification est toutefois plus présent en assurance individuelle, précise M. Bilodeau. Tout simplement parce que les primes sont garanties et qu’au moment de leur établissement, l’obésité est peu considérée.

Pas de hausses en vue

Carl Laflamme, de SSQ, est aussi d’avis que l’obésité a une incidence sur les coûts d’assurance salaire, maladie ou vie. Même si l’assureur n’est pas en mesure de fournir des chiffres qui établissent clairement un lien entre l’obésité et la hausse des invalidités ou de la consommation de médicaments.

L’assureur n’entrevoit pas de hausses de primes faramineuses à cause du phénomène de l’obésité. « De nos réclamations de 2004 en invalidité, 35% touchaient les maladies psychologiques, 30%, les maladies musculo-squlettiques et 10% l’appareil circulatoire », explique-t-il.

À La Financière Sun Life, Claude Leblanc reconnaît que l’assureur suit de près l’évolution du phénomène de l’obésité en fonction de l’absentéisme. « C’est un déterminant important de la santé des assurés, dit-il. Difficile d’établir une relation de cause à effet entre l’augmentation de l’obésité et celle de l’absentéisme, car cela requiert énormément d’expérience. Il faudra des années avant de pouvoir vraiment démontrer les coûts. »

Mike Sampson, de Great-West est lui aussi persuadé que l’obésité a un impact sur les primes. Mais il constate à son tour qu’il est difficile de créer un lien direct. Et c’est d’autant plus compliqué, souligne-t-il, qu’en assurance collective, on ne sait pas qui est obèse et qui ne l’est pas!

Mais l’obésité n’est pas la seule responsable de la hausse actuelle des primes en assurance collective. Le vieillissement de la population a aussi son impact.

Mike Sampson, de Great-West, clame qu’il est urgent que chaque citoyen se prenne en main en matière de santé. Mais les employeurs doivent aussi prendre des mesures au plus vite. Ils ont tous les atouts en main pour jouer un rôle crucial dans la santé des travailleurs. Ce qui ne manquera pas d’avoir un impact positif sur les primes.

Des gens en meilleure santé logent moins de réclamations. Ce qui freinera l’augmentation annuelle des primes en assurance collective, qui se situe actuellement entre 15 et 16%, souligne M. Sampson.

En matière d’éducation et de sensibilisation, le gouvernement a aussi son rôle à jouer, dit-il.

Chez Desjardins Sécurité financière, on réfléchit encore à la manière de traiter l’obésité en assurance collective. « Nous évaluons certaines choses. Mais il n’y toutefois a aucune donnée précise sur l’incidence de l’obésité sur les réclamations. Il y a une certaine prudence des actuaires là-dessus », explique Claude Beauchamp, conseiller en communications externes.