Les restaurateurs après sinistre rivalisent d’ingéniosité pour se faire connaitre des consommateurs. Or, la plupart d’entre eux rappellent aux consommateurs qu’ils doivent appeler leur assureur en premier lieu lors d’un sinistre. Pourquoi alors investir autant en publicité auprès du grand public? Le Journal de l’assurance a posé la question à quelques firmes de ce secteur.
Le grand constat découvert est que les restaurateurs après sinistre privilégient la relation de confiance avec les assureurs. Ils misent aussi sur un service aux clients irréprochable. Quant à leurs plans de communication, ils reposent généralement sur le bouche-à-oreille et une présence médiatique ciblée. Avec pour objectif principal de renforcer leur image de marque.
« Nous croyons que l’assureur est le mieux placé pour répondre aux besoins du client, parce que c’est lui qui a vendu une couverture à l’assuré. » Cet aveu de Pierre Bégin, vice-président, services administratifs et communications, de Groupe Urgence Sinistre (GUS), résume un peu à lui seul le point de vue du reste de la profession.
En effet, pour se faire connaitre ou développer leur notoriété, les restaurateurs misent aujourd’hui sur une relation privilégiée, de proximité, avec les assureurs, plutôt que d’adapter une stratégie plus agressive. En clair, l’argument de vente « En cas de sinistre, plus besoin de passer par votre assureur, appelez-nous » semble avoir pris du plomb dans l’aile.
Dans leur grande majorité, les restaurateurs recommandent à leurs clients de se tourner en premier lieu vers leur agent ou leur assureur en cas de sinistre. « Le choix final doit revenir à l’assuré et à l’assureur, conjointement. À une nuance près, car il existe parfois des situations où le restaurateur peut proposer d’entrer directement en contact avec l’assureur, précise toutefois M. Bégin. Lors d’un dégât des eaux par exemple, la situation génère un grand stress pour l’assuré. On peut donc essayer de lui faciliter certaines démarches et d’appeler sa compagnie d’assurance. »
Du côté de Sinisco, l’entreprise affirme avoir toujours prôné la ligne directrice consistant à demander à l’assuré d’appeler son assureur. « Cette façon de faire engendre beaucoup moins d’ambigüités et beaucoup moins d’insatisfactions. Dans plusieurs cas, il y a une insatisfaction au moment de payer. Il y a toujours de la négociation. C’est pourquoi nous demandons à nos clients d’appeler l’assureur pour qu’ils se renseignent bien sur leur couverture », dit sa présidente Christine Dufour.
Nancy Raymond, présidente de Première Générale, privilégie elle une approche plus B2B - business to business - avec les assureurs. « On essaye de développer une relation d’affaires avec les assureurs. Bien entendu, on ne refuse pas de répondre à la demande directe d’un client, mais notre modèle d’affaire à nous est basé sur la relation avec les assureurs, dit-elle. Cette façon de faire nous permet d’être sûrs de la prise en charge complète par l’assureur. On est certain que la réclamation sera couverte à 100 %. C’est aussi plus équitable pour l’assuré qui bénéficie alors de toutes les informations nécessaires », dit-elle.
Relation triangulaire
Certains restaurateurs, spécialisés dans des programmes moins conventionnels que l’habitation individuelle, se voient plutôt dans un ménage à trois qui réunirait l’assuré, l’assureur et le restaurateur. « Nous sommes présents sur le marché commercial et institutionnel, avec des clients comme des commissions scolaires ou des résidences pour personnes âgées, explique le président de Phoenix Intervention après sinistre, Daniel Pellerin. Nous utilisons donc une solution un peu hybride, quelle que soit la porte d’entrée. Nous sommes en général directement en communication avec le gestionnaire, mais cela ne nous empêche pas non plus de traiter avec certains assureurs. Je me vois mal travailler sans l’une des deux autres parties. Ce qu’il faut savoir, c’est que 80 % de notre clientèle nous sont référés directement. Ça a forcément un impact ensuite dans la relation avec l’assureur. »
M. Pellerin est aussi président de la Fédération de l’industrie de la restauration après sinistre (FIRAS) et, à ce titre, souligne que la FIRAS ne s’est jamais positionnée sur la question. Il tient aussi à préciser que le lien contractuel existe seulement entre le propriétaire du bien et l’entrepreneur, l’assureur étant, au mieux, un référent. « Il s’agit en fait d’une relation triangulaire qui demande, il est vrai, un certain doigté. Pour nous, en fin de compte, on a deux clients », précise-t-il.
Contacté par le Journal de l’assurance, le Bureau d’assurance du Canada (BAC) préconise aussi une relation directe entre l’assuré et son agent ou son assureur. En ce sens, il suit les recommandations de la Chambre de l’assurance de dommages qui invite l’assuré à appeler en premier son assureur qui, lui, dépêchera des restaurateurs après sinistre si nécessaire. La Chambre conseille éventuellement de communiquer directement avec un fournisseur avant de rappeler que « si le sinistre n’est pas couvert par le contrat d’assurance, l’assuré devra en assumer les frais. »
Enfin, l’Association canadienne des directeurs en sinistre d’assurance (ACDSA) ne souhaite pas prendre position sur cette question. Toutefois, elle recommande, par la voix de son président, André Parra, d’appeler directement son assureur en cas de sinistre. C’est, dit-il, « la meilleure chose à faire ».
Un des tenants reconnus de l’approche visant à cibler directement le consommateur est Qualinet. L’entreprise a toutefois refusé de répondre à nos questions lors de la réalisation de ce reportage.