D’ici la fin de l’année, deux mesures mises en place par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) favoriseront les prescriptions de médicaments génériques plutôt que les médicaments innovateurs. L’Association canadienne des médicaments génériques (ACMG) a récemment salué cette initiative qui, selon elle, permettra d’importantes économies.
Depuis le 2 juillet dernier, les règles entourant la mention « ne pas substituer » ou « NPS » sur les ordonnances ont été resserrées. Ce faisant, la RAMQ rembourse tous les médicaments inscrits à sa Liste des médicaments selon la méthode du prix le plus bas, favorisant ainsi le service systématique d’une molécule générique aux patients.
Le remboursement du médicament innovateur sera privilégié uniquement dans des cas où le patient souffrirait d’une allergie ou d’une intolérance grave à un « ingrédient non médicinal de la version générique », indique la RAMQ sur son site Internet.
Québec espère ainsi économiser jusqu’à 12 millions de dollars (M$) par année, « soit près de la moitié du coût actuel engendré par la mention NPS », peut-on lire dans un communiqué du ministère de la Santé et des services sociaux daté de décembre dernier.
Le ministère estime en effet à environ 25 M$ la somme déboursée annuellement par la RAMQ pour rembourser des médicaments innovateurs dont il existe un générique moins onéreux.
« Il s’agit d’un choix judicieux, commentait récemment le président de l’ACMG, Jim Keon, dans une lettre ouverte. Les génériques offrent une efficacité thérapeutique équivalente aux médicaments d’origine, à une fraction du coût. Leur adoption systématique permet d’éliminer des dépenses superflues sans compromettre la qualité des soins. Le Québec rejoint ainsi les meilleures pratiques observées ailleurs au Canada, tout en préservant des exceptions cliniquement justifiées — par exemple, en cas d’allergie à un ingrédient non médicinal. Une approche équilibrée, à la fois rigoureuse et humaine. »
Moins cher pour la RAMQ, les assureurs et les patients
Pour Christian Ouellet, vice-président aux affaires corporatives de Sandoz Canada et membre de l’ACMG, il s’agit d’une bonne nouvelle, mais pas d’un énorme gain. « La majorité des patients se voyaient déjà prescrire un médicament générique, mais plus on avance dans le temps, plus les professionnels de la santé expliquent que les médicaments génériques constituent la meilleure solution », dit-il en entrevue avec le Portail de l’assurance.
En effet, le médicament générique contient la même molécule médicinale que le médicament innovateur, mais il permet d’importantes économies partout dans le système de santé. « En règle générale, le médicament générique coûte de 10% à 25% du prix du médicament innovateur », illustre M. Ouellet.
Au Québec, les médicaments génériques comptaient pour 78,3% de toutes les ordonnances, mais n’accaparaient que 24,3% de la facture totale en médicaments, qui était de 9,5 milliards de dollars (G$), indiquent des données publiées par l’ACMG.
M. Ouellet indique qu’environ 18% des ordonnances de médicaments de marque sont pour des produits qui n’ont pas encore d’équivalent générique, ou bien parce que le patient est allergique ou intolérant à un ingrédient non médicinal de sa version générique.
La mesure du patient d’exception resserrée
D’autre part, le gouvernement du Québec a annoncé son intention de revoir la mesure du patient d’exception le 30 juin, une démarche qui devrait s’échelonner jusqu’en décembre prochain.
En vertu de cette procédure, seules les versions génériques des médicaments pourront être remboursées si ceux-ci ne figurent pas sur la liste déterminée par l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS).
Les médecins devront donc davantage justifier leur décision de prescrire un médicament innovateur pour traiter une condition n’ayant pas été soulagée par d’autres traitements.
« Ces changements traduisent une volonté claire de bâtir un régime d’assurance médicaments moderne, équitable et durable, écrit Jim Keon dans sa lettre. En valorisant les données probantes, la transparence et la rigueur, le gouvernement du Québec jette les bases d’un système plus résilient — un système capable de réinvestir intelligemment les économies réalisées dans d’autres priorités en santé. »
Des économies qui profiteront à tous
D’après Christian Ouellet, les économies générées par les fabricants sont réinvesties dans la recherche et le développement pour définir d’autres molécules pouvant soigner d’autres maux. De plus, la vente de médicaments génériques se traduit par des économies en remboursement de la part de la RAMQ pour les assurés du régime public, et par des économies chez les assureurs privés.
Selon des calculs de l’ACMG effectués à partir de données de l’IQVIA, une multinationale américaine spécialisée dans le traitement des données en santé, « pour chaque augmentation de 1% du recours aux [médicaments] génériques, le secteur public de l’assurance médicaments pourrait économiser 111,3 millions de dollars annuellement » alors que « le secteur privé de l’assurance médicaments pourrait économiser 140,6 millions de dollars ».
« Tout le monde gagne, parce que l’argent épargné peut être réinvesti ailleurs dans le système de santé et dans l’innovation : plus de gens pourront être soignés », résume M. Ouellet.