Le gouvernement fédéral a éliminé bon nombre des avantages fiscaux liés à deux stratagèmes d’assurance vie avec effet levier. Il dit agir ainsi pour accroitre l’intégrité et l’équité du régime fiscal. Ces mesures lui permettront de récupérer 360 millions de dollars (M$) d’ici 2017-2018.     Le gouvernement s’attaque tout d’abord aux rentes assurées avec effet de levier (RAL). Ce type de contrat prévoit l’utilisation de fonds empruntés en lien avec une rente viagère et une police d’assurance vie, qui sont toutes deux émises sur la vie d’un particulier. En pareil cas, la police d’assurance vie couvre habituellement la vie entière du particulier dont la vie est assurée, le montant de la prestation de décès prévue par la police est égal au montant investi dans la rente, et tant la police que la rente sont cédées au prêteur des fonds empruntés.

Ce sont des produits de placements intégrés offerts et vendus comme tels. Toutefois, aux fins de l’impôt sur le revenu, chaque élément d’une rente assurée avec effet de levier est traité séparément. Par conséquent, ceux qui investissent dans des rentes assurées avec effet de levier profitent de nombreux avantages fiscaux qui ne sont pas accessibles avec d’autres produits de placements comparables.

Le budget de 2013 élimine ces avantages fiscaux inattendus en instaurant diverses règles. Le revenu gagné dans un tel contrat sera imposé chaque année sur une base courue. Aucune déduction d’une portion quelconque d’une prime versée à l’égard de la police ne sera permise, et le compte de dividendes en capital d’une société privée ne sera pas majoré du montant de la prestation de décès reçue au titre de la police. En outre, aux fins d’une présomption de disposition au décès, la juste valeur marchande du contrat de rente cédée au prêteur en lien avec ce contrat sera réputée être égale au total des primes versées aux termes du contrat.

Le gouvernement s’attend de récupérer 100 M$ avec cette mesure d’ici 2017-2018. Il récupérera tout d’abord 5 M$ en 2013-2014, puis 15 M$ en 2014-2015, 20 M$ en 2015-2016, 25 M$ en 2016-2017 et 35 M$ en 2017-2018.
Stratagème 10/8 aussi pénalisé
Le gouvernement fédéral s’attaque aussi au stratagème 10/8, qui prévoit un investissement dans une police d’assurance vie, dans le but d’emprunter sous la garantie de ce placement et d’engendrer une déduction annuelle pour frais d’intérêt aux fins de l’impôt, sur une longue période (c’est-à-dire, jusqu’au décès du particulier dont la vie est assurée aux termes de la police). En l’absence des avantages fiscaux, il n’y aurait ni investissement ni emprunt.
Au terme du stratagème 10/8, un contribuable (habituellement un particulier ou une société privée comptant peu d’actionnaires) engendre une déduction annuelle pour frais d’intérêt en participant à des opérations qui se traduisent par un mouvement circulaire de fonds. Plus précisément, le contribuable investit d’abord un montant dans une police d’assurance vie. Puis, il emprunte un montant équivalent. Cet emprunt est garanti par la police ou par un compte d’investissement relatif à la police. Le contribuable investit ensuite le montant emprunté dans des actifs produisant des revenus (pour que l’intérêt payé ou payable sur le montant emprunté soit déductible aux fins de l’impôt).
Au terme du stratagème 10/8, le contribuable paie des frais d’intérêt sur le montant emprunté et gagne un revenu d’intérêt sur le montant investi dans la police. Le taux d’intérêt gagné par le contribuable (habituellement 8 %) sur le montant investi dans la police est égal au taux d’intérêt payable sur le montant emprunté (habituellement 10 %), moins une marge donnée (habituellement deux points de pourcentage). Le contribuable estime que les frais d’intérêt sur le montant emprunté sont déductibles, tandis que le revenu d’intérêt sur le montant investi dans la police n’est pas inclus dans son revenu (parce qu’il s’agit d’une police exonérée aux fins de l’impôt sur le revenu).
Afin de maximiser la déduction annuelle des frais d’intérêt, le montant total emprunté est majoré en répétant les opérations décrites ci-dessus, chaque année, pendant un certain nombre d’années, et en appliquant un taux d’intérêt élevé au montant emprunté. Les stratagèmes 10/8 peuvent aussi procurer d’autres avantages fiscaux inattendus, à savoir une déduction annuelle pour une fraction des primes payées aux termes de la police et une majoration – à concurrence du montant total emprunté – du compte de dividendes en capital d’une société privée qui est un bénéficiaire aux termes de la police.
Contestations fastidieuses et couteuses
Le gouvernement conteste les stratagèmes 10/8 en vertu des dispositions actuelles de l’impôt sur le revenu. « Puisque ces contestations sont fastidieuses et couteuses, le gouvernement agit dès maintenant afin de déposer des mesures législatives pour éviter l’utilisation des stratagèmes 10/8 à l’avenir », peut-on lire dans le budget.
Le gouvernement propose d’empêcher qu’on puisse profiter d’avantages fiscaux inattendus avec les stratagèmes 10/8. Dans le cas des années d’imposition se terminant à la date du budget ou par la suite, si une police d’assurance vie ou un compte d’investissement relatif à la police est cédé pour garantir un emprunt (le taux d’intérêt payable sur un compte d’investissement relatif à la police est déterminé par rapport au taux d’intérêt payable sur l’emprunt, soit la valeur maximale d’un compte d’investissement relatif à la police est déterminée par rapport au montant de l’emprunt), on ne pourra bénéficier des avantages fiscaux suivants : la déductibilité de l’intérêt payé ou payable sur l’emprunt qui se rapporte à une période postérieure à 2013, la déductibilité d’une prime payée ou payable aux termes de la police qui se rapporte à une période postérieure à 2013, l’ajout au compte de dividendes en capital du montant de la prestation de décès qui devient payable après 2013 en vertu de la police et qui est associée à l’emprunt.

Pour faciliter la résiliation des stratagèmes 10/8 en vigueur avant 2014, le budget de 2013 propose aussi d’alléger les conséquences fiscales d’un retrait sur une police aux termes d’un stratagème 10/8 qui est effectué pour rembourser un emprunt relevant du stratagème, si ce retrait est effectué à la date du budget ou par la suite, et avant le 1er janvier 2014.
Le gouvernement s’attend de récupérer 260 M$ avec cette mesure d’ici 2017-2018. Il récupérera tout d’abord 10 M$ en 2013-2014, puis 50 M$ en 2014-2015, 60 M$ en 2015-2016, 65 M$ en 2016-2017 et 75 M$ en 2017-2018.

« Le gouvernement suivra l’évolution de ces dossiers. Si des structures ou des opérations minant l’efficacité de cette mesure devaient émerger, le gouvernement évaluera si d’autres mesures s’imposent avec possibilité d’application rétroactive », peut-on lire dans le budget.