Investir en gardant à l’esprit que le climat pourrait se réchauffer en moyenne de 2oC de plus d’ici la fin du siècle permettra de réaliser des rendements additionnels, selon un récent rapport d’envergure mondiale de Mercer sur les changements climatiques, intitulé Investing in a Time of Climate Change.

Le modèle que présente Mercer dans son rapport prévoit trois scénarios de changement climatique : un réchauffement moyen de 2 °C ; un réchauffement moyen de 3 °C ; et un réchauffement moyen de 4 °C. Il s’agit de réchauffement au-dessus des niveaux observés à l’ère préindustrielle. Dans son modèle, Mercer échelonne chaque scénario de réchauffement sur trois périodes distinctes : 2030, 2050 et 2100.

Mercer signale que des scénarios de réchauffement projetés sur de longues durées permettent de mieux prévoir les répercussions que pourraient avoir les catastrophes naturelles. Mercer a d’ailleurs ajouté à son modèle de 2019 la période allant jusqu’à 2100, absente de son précédent rapport publié en 2015.

Faibles émissions de carbone

« Une des principales conclusions du rapport révèle qu’investir en prévision d’un scénario d’augmentation des températures de 2 °C est à la fois un impératif et une occasion. C’est un impératif, puisque pour presque toutes les catégories d’actif, les régions et les périodes, un scénario d’augmentation des températures de 2 °C donne lieu à des rendements projetés améliorés par rapport aux scénarios de 3 °C ou de 4 °C », a déclaré Helga Birgden, responsable mondiale, investissement responsable de Mercer.

Si les secteurs traditionnels peuvent subir des pertes selon un scénario de 2 °C supplémentaire, la transition vers une économie à faibles émissions de carbone pourrait présenter de nombreuses occasions de générer des rendements positifs, ajoute Mme Birgden.

« La modélisation montre qu’une plus grande pondération en actifs durables dans les portefeuilles peut améliorer les rendements. Les preuves sont irréfutables et renforcent les conclusions du rapport de 2015 de Mercer sur les changements climatiques qui soutiennent l’urgence d’agir pour limiter le réchauffement à moins de 2 °C », dit-elle.

Atténuer le risque des catastrophes

Mercer fait également valoir que les investisseurs peuvent envisager des mesures à court et à long terme, pour atténuer le risque et profiter des occasions en matière d’investissement. La firme d’actuaires-conseils estime que son modèle permet aux investisseurs d’évaluer les risques financiers liés aux changements climatiques, pour un portefeuille total englobant toutes les catégories d’actif et les secteurs d’activité. Le modèle vise à quantifier à quel point les changements climatiques pourraient affecter les rendements, sur plusieurs décennies.

Sujet chaud au Canada

Le sujet interpelle particulièrement les Canadiens, croit Mercer. « Des recherches récentes révèlent que le réchauffement climatique au Canada est deux fois plus rapide que dans le reste du monde. Voilà pourquoi l’investissement sensible aux changements climatiques est crucial pour toutes les institutions de ce pays, y compris pour les investisseurs institutionnels comme les caisses de retraite », dit Karen Lockridge, conseillère principale, investissement responsable de Mercer Canada.

Selon Mme Lockridge, une caisse de retraite se doit d’avoir une vision à long terme. « Dans un monde moderne, cela signifie de veiller à ce que la répartition de l’actif soit protégée contre les risques et les incertitudes découlant des changements climatiques. »

Volatilité des rendements à court terme

Mercer croit que les investisseurs devraient également mettre l’accent sur les possibles répercussions à court terme des investissements en période de changements climatiques. « Des changements soudains dans les rendements sont plus plausibles que des rendements moyens annuels stables, c’est pourquoi une analyse de sensibilité est un outil important », peut-on lire dans son rapport.

« Si on anticipe une plus grande probabilité d’un réchauffement climatique de 2 °C ou de 4 °C et une sensibilité accrue des marchés, des révisions des prix pourraient être observées sur les marchés et entrainer des variations de l’ordre de -3 % à 3 % en moins d’un an dans les rendements des portefeuilles diversifiés modélisés », précise Mme Birgden.

Accord de Paris

Le rapport propose aux investisseurs de miser sur des entreprises dans une perspective où elles sont des « créatrices d’avenir ». Mercer recommande aux entreprises exposées aux risques de transition réchauffement de 2 °C d’établir leurs plans d’affaires en conséquence. Il recommande aussi aux gouvernements de prendre des mesures d’urgence pour mettre en œuvre l’Accord de Paris, y compris des engagements encore plus grands pour lutter contre les changements climatiques.

« Les investisseurs devraient tenir compte des changements climatiques à chaque étape du processus d’investissement : de l’établissement des convictions de placement, de la politique et des processus jusqu’aux décisions de constitution des portefeuilles, » affirme Deb Clarke, responsable mondiale de la recherche sur les placements de Mercer.