Le numéro un de l’IARD pour Suisse de Ré au Canada, Jean Jacques Henchoz, affirme que l’industrie de l’assurance doit se préparer à affronter une possible hausse du nombre de catastrophes naturelles, résultant du réchauffement climatique.
Le président et chef de l’exploitation du secteur IARD du réassureur a fait cette affirmation lors d’une entrevue exclusive accordée au Journal de l’assurance, depuis ses bureaux torontois.
Selon M. Henchoz, le message lancé ces dernières années par scientifiques et environnementalistes, relativement au réchauffement climatique, a en effet provoqué une prise de conscience au sein de l’industrie canadienne de l’assurance de dommages.
La déclaration de M. Henchoz coïncidait avec les conclusions alarmantes du rapport par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui a été rendu public à Paris le 2 février dernier.
Dans ce document, les experts révèlent que le réchauffement climatique est du en grande partie à l’action humaine. Le rapport indique notamment que la température moyenne pourrait augmenter de 2 à 4 degrés Celsius, d’ici la fin du siècle.
Le rapport révèle aussi que les catastrophes naturelles continueront de sévir. À ce chapitre, le Groupe d’experts affirme qu’il est très probable que les vagues de chaleur et les fortes précipitations continueront à être plus fréquentes et que les cyclones seront plus intenses.
L’industrie réalise et se prépare désormais à affronter les conséquences du réchauffement climatique, qui pourraient se traduire par une importante hausse des sinistres des biens assurés, affirme M. Henchoz.
Il dit d’ailleurs constater une augmentation au chapitre des demandes de protection en vue de couvrir les risques associés à des catastrophes naturelles d’importance, dit-il.
Les assureurs mènent aussi diverses campagnes pour sensibiliser leur clientèle face à l’importance d’avoir une protection d’assurance adéquate. Cette démarche consiste à ce que les montants de leurs protections reflètent convenablement le montant de leurs biens assurés, explique M. Henchoz.
Les réassureurs ne sont pas en reste, dit-il. « Nous avons pris tous le moyens nécessaires pour nous assurer que les risques admis dans notre bilan de catastrophes, ainsi que toute autre exposition au risque, soient mesurés et soient conformes aux meilleures pratiques de gestion », avance M. Henchoz.
Suisse de Ré, conjointement à des universités et autres établissements de savoir, a entrepris des recherches scientifiques de manière à mieux mesurer le possible impact qu’aurait le réchauffement climatique sur l’industrie de l’assurance IARD, ajoute-t-il.
« Dès que nos recherches produisent des résultats quantitatifs pertinents, nous les intégrons immédiatement dans notre processus d’évaluation et de gestion des risques », explique M. Henchoz.
À titre d’exemple, une étude rendue publique par Suisse de Ré en 2006 révèle que l’industrie de l’assurance de dommages doit s’attendre à une hausse de 16 à 68 % des réclamations liées à la sévérité accrue des tempêtes hivernales en Europe et ce d’ici 2085. Pour l’heure, les réclamations causées par ces vents violents se chiffrent à deux milliards de dollars (G$) annuellement.
Suisse de Ré se dit néanmoins prêt à absorber cette hausse à condition, notamment, que les assureurs tiennent compte de la nouvelle donne climatique et tarifent adéquatement de tels risques.
Le Canada frappé
Bien que le réassureur n’ait pas chiffré l’impact en termes de dommages pour le Canada, le pays ne sera pas épargné pour autant. Les deux paliers de gouvernements affirment depuis nombre d’années que le phénomène frappera aussi durement le pays.
Selon Environnement Canada, la température moyenne dans le bassin des Grands Lacs pourrait monter d’environ 4,5 °C d’ici l’an 2055. L’accroissement de la température serait plus marqué en hiver qu’en été.
L’organisme s’attend aussi à observer d’ici 2050 une hausse du niveau de la mer qui pourrait aller jusqu’à 30 cm dans le Nord de la côte de la Colombie-Britannique et jusqu’à 50 cm dans le Nord de la côte du Yukon. Cette situation sera causée principalement par un réchauffement de l’océan.
Mais l’industrie canadienne ne doit pas craindre pour autant de s’effondrer sous le poids des réclamations causées par ces phénomènes, avance M. Henchoz.
« Réassureurs et assureurs ont fait preuve d’une grande capacité d’adaptation à la suite du passage de l’ouragan Katrina, en 2005. Cette année s’est révélée être la plus coûteuse de l’histoire pour l’industrie de l’assurance au chapitre des catastrophes naturelles avec 45 G$ en réclamations », rappelle M. Henchoz.
La saison des ouragans de 2005 a d’ailleurs eu un effet durable au sein de l’industrie IARD, ajoute M. Henchoz. « Ce développement a contribué à l’augmentation de la tarification des réassureurs au chapitre des catastrophes naturelles, l’an dernier au Canada », a ajouté M. Henchoz. Il n’a cependant pas chiffré cette hausse.
« Tout à la fois, nombre de réassureurs perçoivent le marché canadien comme une source de diversification à leur exposition des risques de catastrophes sur le marché américain. Cela a pour effet de stabiliser les conditions sur le marché canadien », explique-t-il.