Pour se départir du risque de longévité qui pèse sur les régimes à prestation déterminée, les gestionnaires appellent les actuaires en renfort.
Les transferts de risque des régimes ont atteint 2,8 milliards de dollars (G$) en 2016, révèle Mercer dans son rapport Brace for (or Embrace) The Change in The Canadian Retirement Landscape. « Il s’agit principalement d’activités d’achat de rentes collectives, explique Michel Fortin, responsable du domaine avoirs au Québec chez Mercer Canada. L’achat de rentes pour les retraités a toujours existé. Maintenant, cette pratique se fait au fur et à mesure, alors que le futur retraité est encore actif, pour que la caisse de retraite puisse se départir du risque de longévité. »
Alternative aux rentes
Plus nouvelle au Canada, l’assurance longévité devient de plus en plus populaire comme alternative aux rentes, pour gérer le risque de longévité. « Le régime de l’employeur s’entend avec un assureur et un réassureur sur les hypothèses de mortalité. La mortalité réelle sera payée par l’assureur si elle est plus longue que le stipulent les hypothèses actuarielles. Si elle est au contraire moins longue, l’assureur y gagne. Cette solution permet à l’employeur de transférer le risque sans acheter une rente complète. Il conserve ainsi une partie de ses actifs », dit M. Fortin.
Il rappelle que Mercer a été l’intermédiaire dans une transaction intervenue en novembre 2016 entre Canadian Bank Note (CBN) et Canada-Vie, pour le transfert d’un risque de 35 millions de dollars (M$), attribuable à 200 retraités. En avril 2015, Mercer agissait dans un dossier beaucoup plus gros, alors que Financière Sun Life a assuré le risque de longévité des retraités du régime de Bell Canada, pour des engagements de 5 milliards de dollars (G$). Sun Life avait alors partagé le risque avec un syndicat de réassureurs formé de RGA Canada et SCOR Global Life.
Mercer signale que la croissance des activités d’atténuation du risque des régimes (de-risking) a atteint un niveau record en 2016. Elle pourrait atteindre 50 % en 2017.
Financière Sun Life croit que les nouvelles tables stimuleront les transferts de risque de retraite par achat de rentes collectives ou d’assurance longévité, en établissant une base commune en longévité, dit Mathieu Tessier, directeur des relations clients, solutions de prestation déterminée. « Il y a eu une forte croissance de ces stratégies de transfert de risque lié à la retraite. Avant 2013, il y avait un volume annuel d’un milliard de dollars (G$) de rentes collectives au Canada, surtout pour les régimes en terminaison. Depuis 2013, ce marché a franchi la barre des 2 G$. Il bat des records chaque année, avec un sommet de 2,7 G$ en 2016. Cette stratégie n’est plus seulement utilisée pour des régimes en terminaison, mais aussi pour des régimes en continuité. »
Acheter une rente sans responsabilité
Thierry Chamberland, actuaire-conseil, associé chez Aon Hewitt, ainsi que membre de la commission des rapports financiers des régimes de retraite de l’Institut canadien des actuaires (ICA), rappelle que la nouvelle loi sur les régimes complémentaires de retraite entrée en vigueur le 1er janvier 2016 fournira un outil de plus aux promoteurs de régimes de retraite pour se prémunir contre le risque de longévité. Il sera permis d’acheter une rente avec rachat des engagements.
« Des règlements restent encore à publier. Lorsque cela sera fait, les promoteurs pourront acheter une rente et ne plus conserver aucune responsabilité. C’est l’assureur qui endossera le risque. S’il fait faillite, l’endosseur sera Assuris. »
N’est-ce pas risqué pour les participants, considérant qu’Assuris pourrait ne couvrir qu’une partie des obligations de l’assureur failli ? « Les participants peuvent y gagner, répond M. Chamberland. Ils deviennent la responsabilité d’un assureur dont la cote de crédit est généralement meilleure que celle de leur employeur, qui pourrait éventuellement avoir des difficultés à verser les rentes. »