Pour célébrer ses 25 années d’existence, le Journal de l’assurance vous présente 25 idées exclusives pour construire, dès aujourd’hui, l’industrie de demain.


Pour Robert Frances, l’industrie n’est pas en danger face aux géants technologiques. Ce sont les jeunes consommateurs qui l’inquiètent. L’industrie est à risque de ne pas connecter avec eux. Il en appelle aux régulateurs : faites en sorte que vos règles les inspirent à épargner !

Pour diversifier le portefeuille de Groupe financier Peak, son président du conseil et chef de la direction Robert Frances a commencé à réaliser des investissements dans diverses firmes technologiques, notamment Diagram au Canada dans les services financiers, ou encore Landr dans le monde de la musique, une firme montréalaise qui a déjà masterisé plus de six millions de chansons et qui compte Warner Brothers comme actionnaire. M. Frances est président du conseil d’administration de Landr, lui qui est aussi un musicien. Il a aussi réalisé des investissements aux États-Unis.

Qu’y gagne-t-il ? « Une exposition à des gens en technologie, répond M. Frances. On voit rarement des gens en services financiers intégrer des firmes technologiques. C’est l’inverse qui se produit. En y investissant, on y devient plus articulé. »

M. Frances va aussi y chercher des idées pour son entreprise, en plus de s’exposer aux visions d’entrepreneurs qui débutent. Il dit ainsi pouvoir agir en mentor pour eux, alors que tout comme le Journal de l’assurance, Groupe financier Peak fête ses 25 ans d’existence.

M. Frances travaille d’ailleurs à se distancier des opérations quotidiennes de Peak pour justement réfléchir à sa stratégie. La récente nomination de Marc Doré à titre de président et chef de l’exploitation en fait foi. « Je veux penser à ma relève. Me coller à des gens en technologie me permet ainsi de créer des passerelles en ce sens. »

Importante croisée des chemins

Il admet ressentir que son organisation arrive à une importante croisée des chemins. « Quand je pense à Peak, je ne peux plus me permettre d’y penser en termes de PME. Nous attiendrons d’ici quelques jours les dix milliards de dollars d’actifs sous gestion. Nous traitons avec 1 500 collaborateurs, ce qui comprend des employés, des conseillers financiers et des courtiers en valeurs mobilières. Je dois ainsi penser à son avenir comme entreprise de taille moyenne », confie M. Frances.

Le tout se passe plus vite qu’il ne le pensait, reconnait-il. « Que nous ayons atteint 25 ans d’existence n’est pas rien. Dans notre milieu, c’est rare. Bien souvent une entreprise comme la nôtre sera vendue ou sera fusionnée avec une autre firme bien avant qu’elle atteigne 25 ans. Je suis aussi heureux que le conseil indépendant prend beaucoup d’emphase. Nos fondations sont bonnes. »

Lorsqu’on lui a demandé s’il trouve que la réflexion de l’industrie face aux défis technologiques va aussi vite qu’il le voudrait, M. Frances a pris un moment avant de partager sa réflexion. Songeur sur ce point, il avance que même si l’industrie ne va pas au rythme qu’il voudrait, les opportunités sont pourtant énormes pour l’industrie. « On voit au moins qu’il y a un intérêt des assureurs. Le développement des propositions électroniques le prouve », dit-il.

Peak se rapporte à 19 régulateurs

Il ajoute toutefois que l’industrie de l’assurance a pris du retard en la matière. Et il pointe le poids règlementaire pour expliquer une partie de ce retard.

« Groupe financier Peak se rapporte à 19 organismes de règlementation à travers le Canada. Ça n’a pas de sens ! Je ne peux pas croire qu’il y a une telle concurrence entre eux. N’y a-t-il pas un moyen pour qu’ils puissent s’entendre ? La technologie nous permettrait pourtant de réduire la paperasse. Nous ne sommes pas assez forts dans ce domaine. »

M. Frances se porte en faux contre ceux qui croient que la technologie remplacera le conseil. Ou encore qu’un grand joueur numérique viendra tout chambouler le marché. « Nous n’en sommes pas là », assure-t-il.

Ses craintes pour l’industrie sont plus d’ordre social. « Comment allons-nous connecter avec les nouvelles générations. Il y a un danger là. »

Si on ne montre pas jeunes qu’ils peuvent épargner, ils vont dépenser leur argent, dit-il. M. Frances rappelle qu’il n’y a que quatre façons de se servir de son argent, soit en l’épargnant, soit en la donnant, soit en la dépensant ou soit en payant des impôts avec.

« C’est là que notre industrie doit investir, que ce soit dans des technologies modernes ou de la publicité ou quoi que ce soit d’autre qui permet de rejoindre ces jeunes. On doit leur inspirer confiance ! »

En ce sens, il dit bien comprendre les visées des régulateur sen matière de transparence, notamment avec la venue prochaine du Modèle de relation conseiller-client, version 3 (MRCC3). « Tant les régulateurs que l’industrie doit se poser la question : peut-on être inspirant pour inciter les gens à épargner plus ? S’ils sont craintifs de l’industrie, ils n’épargneront pas. Ils dépenseront leur argent et le regretteront plus tard. »

M. Frances livre aussi un plaidoyer aux régulateurs. Qu’ils fassent en sorte que toute cette règlementation soit inspirante pour les consommateurs.

« Je suis un grand fan de la règlementation. Tout comme les régulateurs, je veux œuvrer dans un environnement extrêmement propre. Même les conseillers trouvent cela lourd désormais. Ils étaient pourtant les plus ardents défenseurs de celle-ci compte tenu des scandales survenus ces dix à quinze dernières années. Ils nous confient que leurs clients craignent maintenant de se faire avoir en traitant avec eux vu le message qui est envoyé dans le moment, notamment avec le débat sur l’abolition des commissions intégrées. »

M. Frances avance que Google et Amazon sont déjà des concurrents de l’industrie, mais pas dans le sens où le pense traditionnellement. « Ils vendent des dépenses ! Si les gens ont plus de plaisir à dépenser qu’à épargner, nous aurons de grands problèmes. »  


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