En 2018, la question n’est pas de savoir si on doit être présent sur Internet, mais comment réorganiser sa stratégie de vente autour. Le Web n’est plus un simple complément, il est au cœur du cycle de vente d’une entreprise.
Pourquoi ce changement ? Parce que cette migration vers le numérique est le reflet d’un changement de culture profond : la volonté d’autonomie des consommateurs. Ils veulent désormais avoir le contrôle de la transaction d’un bout à l’autre. Il n’y aura pas de retour en arrière.
La Journée de l’assurance de dommages 2018 a convié deux entrepreneurs qui se sont approprié Internet avec succès et qui sont venus raconter leur démarche. L’un du secteur de l’assurance, l’autre un sommelier virtuel. Pourquoi être allé sur Internet ? Qu’est-ce qui a bien fonctionné ? Qu’est-ce qui les a empêchés de dormir certaines nuits ? Quelles grandes leçons en retirent-ils ? Voici leurs constats !
Parti de rien dans son sous-sol à 5 M$ de primes
Patrick Bouchard a fondé Bouchard & Associés en 2009. « Seul dans mon sous-sol », précise-t-il. Aujourd’hui, son cabinet de courtage en assurance de dommages, situé à Québec, emploie 13 personnes, dont 7 courtiers, et vient de franchir la barre des 5 millions de dollars de primes.
En plus d’offrir les produits standards, il s’est spécialisé dans les risques difficiles à assurer : annulation pour non-paiement, résiliation, dossier criminel, conduite avec facultés affaiblies, fréquence de sinistres et refus d’assureurs. « Tout ce qui ne rentre pas ailleurs ! »
Il a refait son positionnement à l’aide du Web à compter de 2014. Aujourd’hui, il gère de front quatre sites, dont difficiledemassurer.com.
« Internet est la seule façon à notre époque de faire valoir sa marque et de vendre sa valeur ajoutée, affirme-t-il. Mais cela ne se fait pas en criant ciseau. Nous y avons mis l’argent, le temps et la volonté nécessaires. Un cabinet de courtage comme le nôtre fait face aux Desjardins et Intact Assurance de ce monde qui disposent de gros budgets et d’experts pour migrer vers le numérique. On se fait connaitre et on appâte les gens par nos sites. Je complète avec de la publicité à la radio, sur Internet et même dans les toilettes de restaurant ! »
Patrick Bouchard est membre du conseil d’administration du Regroupement des cabinets de courtage d’assurance du Québec (RCCAQ) depuis 2010 et il en a assumé la présidence en 2015-2016. La question de l’encadrement des consommateurs le préoccupe beaucoup.
L’importance du conseil
« Chez nous, c’est un professionnel certifié qui finalise la transaction en ligne, précise-t-il. Je ne laisse pas mes clients sans filet de protection. Même s’ils sont simples à comprendre, à peine 10 % des formulaires sont remplis adéquatement. Le demandeur a-t-il fait le meilleur choix pour lui ou le plus économique ? A-t-il omis de dévoiler une information ou mal répondu à une question, ce qui pourrait compromettre une éventuelle réclamation ? La seule garantie, c’est l’intervention d’un intermédiaire certifié. D’expérience, je sais aussi que le contact humain rassure les gens. »
En résumé ? « Oui à Internet comme outil de marketing et de communication. Mais pas pour vendre de l’assurance sans un professionnel certifié. Les conséquences pourraient être trop graves. »
La plus grande cave à vin virtuelle du monde
Guy Doucet a fondé Alfred – L’Expert en Vin en 2015. Les images fusent quand vient le temps de décrire son entreprise.
Fondamentalement, Alfred est une application mobile qui permet aux propriétaires de celliers privés de proposer leurs vins sur le marché de la revente, de gérer leurs réserves et de connaitre le meilleur moment pour consommer leurs bouteilles. Pour ce faire, son équipe formée majoritairement d’ingénieurs et d’informaticiens a développé une courbe de durée de vie en tenant compte des données climatiques, du cépage et de la qualité du millésime.
On offre aussi à l’abonné une panoplie de services. Garantie automatique d’un an sur tous les produits achetés dans la boutique en ligne, possibilité d’acheter une assurance numérique séparée pour sa cave à vin et recevoir des conseils d’un sommelier professionnel, en ligne ou au téléphone, pour ses achats, en sont quelques-uns.
« Notre modèle d’affaires marie l’intelligence artificielle et l’expertise humaine, affirme Guy Doucet. Nous sommes des pionniers à l’échelle de la planète. »
Guy Doucet est un techno pure laine. De 1991 à 2012, il a été tour à tour actionnaire principal et chef de la direction d’Harfan Technologies et d’Oz3, un fournisseur de solutions de TI.
Un modèle à exporter hors Québec et outre-Atlantique
Il a mis dix ans à mettre au point son application mobile. Un partenariat avec la Société des alcools du Québec (SAQ) l’a aidé à réaliser son projet. Il songe à exporter son modèle dans le reste du Canada et outre-Atlantique.
« La technologie nous permet de servir 27 000 abonnés avec trois personnes », explique le fondateur. Le volume exige l’automatisation, dit-il.
« L’informatique permet aussi de mieux connaitre que jamais nos clients et de les fidéliser. Quand ils viennent sur notre site, ils nous livrent un paquet d’information sur eux : à quelle heure ils sont venus, à quelles pages ils se sont attardés, quels produits les ont intéressés, l’état de leur panier de provisions, les régions vinicoles qu’ils préfèrent, etc. Cela met la table pour un rappel de notre part, par courriel ou au téléphone, et nous permet de les relancer avec des spéciaux sur mesure. »
Pour Guy Doucet, le numérique n’est qu’un moyen de communication. « Les grands principes restent les mêmes : comment accrocher les personnes avec qui on veut faire affaire et comment les garder avec nous. Autrefois nous avions des réceptionnistes avec des voix accueillantes qui donnaient le ton. Le numérique permet seulement de tout faire plus vite et avec un plus grand nombre de personnes. »