Comme on compte quelque 90 000 conseillers financiers au Canada – autant des indépendants que des conseillers œuvrant dans des bureaux de courtage à service complet – il est de prime importance de se différencier des autres entreprises, affirment les nombreux conseillers qui se sont exprimés lors d’une webdiffusion organisée dans le cadre du Canada Sales Congress.
Tom Love peut en témoigner : celui qui agit comme conseiller financier dans le Tennessee relate que, lorsqu’on demande à un vendeur de parler de ce qu’il fait comme travail, ce dernier se met à paniquer. Or, au lieu de changer de sujet, l’auteur de Turning Clients into Advocates vous conseille d’être à l’affût de l’attention que votre interlocuteur porte à vos propos, ce qui vous aidera à travailler avec lui.
La prétendue « présentation des services » que la plupart des conseillers donnent aux clients est « la responsabilité la plus mal comprise de tout vendeur, quel que soit son domaine », maintient M. Love. En parlant aux gens, il a appris que la plupart ne se soucient pas de ce que vous faites, mais plutôt de pourquoi vous le faites et comment vous pouvez les aider.
Partagez votre passion
« Si ce que vous cherchez, c’est d’empocher une commission, je vous conseille fortement d’ouvrir un établissement de restauration rapide : vous aurez moins de migraines et probablement plus d’argent dans vos poches, conseille M. Love. Mais si vous me parlez de ce qui vous passionne, de la raison pour laquelle vous faites ce travail et des avantages obtenus par ceux qui ont finalement fait affaire avec vous, je veux bien sauter dans votre locomotive et y rester pour toujours. »
Pour réussir, un conseiller financier doit comprendre qu’il ne commercialise pas un produit – il vend le résultat de ce produit, précise Marvin Feldman, un membre depuis 40 ans de la Top of The Table de la Million Dollar Round Table(MDRT) vivant à Palm Harbor, en Floride.
Résoudre des problèmes
« En fait, nous ne sommes pas en train de vendre des produits : nous essayons plutôt de résoudre des problèmes, nuance M. Feldman. Il nous faut poser des questions qui suscitent une réflexion chez le client… et qui vont même parfois les “chicoter” parce qu’il n’a même pas pensé à un problème en particulier ou ne s’en est pas occupé. »
Poser les bonnes questions, c’est particulièrement important auprès des professionnels et des gens d’affaires qui ont réussi et qui se sont tellement consacrés à leur travail qu’ils n’ont pas réglé divers dossiers personnels, comme leur héritage. « On peut refaire, revoir et continuer d’accompagner le client pour qu’il devienne de plus en plus important. Mais il ne faut pas en mettre tellement au départ qu’ils paient une première prime, mais hésitent ensuite à payer la deuxième. »
Cindy David, présidente du cabinet de planification successorale Cindy David Financial Group à Vancouver, affirme que la meilleure façon de se différencier, quand on est conseiller, c’est de s’assurer d’être la personne qui en sait le plus dans une pièce.
Se trouver un mentor
Celle-ci fait quantité de suggestions, notamment de lire et d’écrire le plus possible, de solliciter des coachs et de se trouver un mentor.
Mme David explique qu’elle se différencie en consacrant beaucoup de temps aux détails, ce qui lui permet d’avoir à portée de main toute l’information clé concernant un client. Ce n’est qu’à ce moment qu’elle est vraiment satisfaite de son entretien avec le client. Au cours d’un tel entretien, il faut porter attention à ce que l’on fait, s’assurer d’écouter davantage qu’on ne parle et répondre aux besoins du client.
Celle qui est également présidente du Conference for Advanced Life Underwriting (CALU) s’est distinguée dans le milieu en créant un modèle commercial unique : elle ne travaille qu’avec cinq familles, au lieu des 350 à 500 ménages gérés par de nombreux conseillers.
« Si vous définissez bien votre marché cible, il sera plus facile d’en parler à vos centres d’influence et aux spécialistes pertinents. Il ne faut quand même pas se limiter, car il n’y a pas de solution universelle », déclare-t-elle.
Adrian George, président du MDRT au Canada, a vraiment mis au point sa façon de se différencier auprès de ses clients. M. George, qui vit à Calgary, commence par les interroger sur ce qui les préoccupe le plus et sur ce qu’il peut faire pour eux.
« J’avais besoin d’agir d’une manière qui me ressemble. Ainsi, lorsque je m’entretiens avec mes interlocuteurs, ils peuvent réellement adhérer à ce que je dis parce que je crois vraiment que ma façon de faire va les aider », mentionne-t-il.
Adrian George dit expliquer à ses clients potentiels qu’il n’y a pas mille façons de disposer de son revenu : on peut le diriger vers l’épargne, le dépenser, l’utiliser pour rembourser un prêt ou le mettre à l’abri, toujours en tenant bien compte de la portion qui sera prélevée en impôts. Et quand on lui parle de gestion de dettes, il demande au client si le remboursement d’un prêt vise à dégager des liquidités ou à payer moins d’intérêts.
Accueillir la technologie
Les conseillers doivent se différencier en s’appropriant la nouvelle technologie. C’est un véritable impératif, surtout depuis l’arrivée de la COVID-19, estime Christopher Dewdney, CFP et directeur de la société torontoise Dewdney&Co.
La pandémie a contraint de nombreux conseillers à évoluer encore et encore, et la technologie devrait être vue comme un bel outil qui permet de les différencier, a déclaré M. Dewdney. Par exemple, la plupart des clients sont heureux de pouvoir consulter leur portefeuille en ligne. Les conseillers qui font ce saut technologique avec leurs clients peuvent tirer parti de l’évolution de la pratique et rendre la leur encore plus efficace, ajoute-t-il.
Il fait aussi remarquer que les conseillers ont une responsabilité envers leurs concitoyens et qu’ils devraient les aider sans frais ou à peu de frais. « À l’instar de l’avocat qui fait du travail pro bono, les conseillers devraient se garder du temps chaque mois pour aider un client qui ne figure pas nécessairement dans ses livres. Si nous pouvions tous participer à un tel effort… notre pays s’en porterait beaucoup mieux. »
Faire valoir la philanthropie
Elke Rubach, du cabinet torontois Rubach Wealth, a amorcé la création d’une marque unique en son genre dès 2015, en cofondant Fashion Heals for SickKids, un défilé de mode associé à une campagne de financement annuelle et impliquant des patients et membres du personnel de l’Hôpital pour enfants malades. L’activité finance des programmes d’oncologie pédiatrique et de santé mentale tout en faisant indirectement valoir l’importance de la philanthropie, explique Mme Rubach.
Dans son entreprise, Mme Rubach s’occupe des dossiers de repreneuriat familial, toujours en essayant d’équilibrer les besoins et désirs de chaque génération.
« Il est si facile d’éviter un tel stress à une famille… C’est en fait la planification financière minimale que l’on devrait procurer à ses proches », fait-elle remarquer.
Mme Rubach invite ses clients à préparer un testament et à souscrire une assurance vie suffisante. Personne n’aime se procurer une assurance vie, dit-elle, mais il n’est jamais arrivé que quelqu’un revienne la voir en proposant de lui remettre une partie de l’indemnité reçue parce qu’elle était trop élevée.
Jesse Vu, d’Exceedia Consulting Ltd. à Calgary, se distingue en préparant un « gâteau financier » comprenant six étages de données de planification financière.
Mme Vu commence par la base de la planification financière : les liquidités et la façon dont on dépense l’argent, sa provenance et la façon dont il sort des poches du client. Les autres étages traitent du mode de vie des clients, du paiement des dettes ou de l’accès au crédit, puis de la constitution d’un fonds d’urgence. Il faut ensuite prévoir combien d’argent devra aller à l’impôt et aux créanciers et, enfin, planifier sa succession.
« Bien des gens construisent leur gâteau financier à l’envers, affirme-t-elle. Ils placent tout leur argent dans des actifs, mais ces derniers n’ont pas le temps de leur procurer des revenus. À cause de ce gâteau à l’envers, ils n’ont donc pas le mode de vie souhaité, ils accumulent les dettes et n’ont pas de fonds d’urgence, pas plus que les ressources financières pour faire face aux imprévus. »
Des objectifs clairs
Mme Vu suggère que les conseillers forment un cabinet qui reflète leurs attentes, en définissant leurs objectifs avec précision et en s’acquittant de leur tâche avec efficacité.
Parce qu’elle a une formation dans un domaine à part, Marnie White, associée principale chez Mosby Insurance Agencies à Vancouver, crée aisément des liens avec les clients tout comme avec les centres d’influence. Grâce à sa formation initiale en actuariat, Mme White peut offrir des services de planification financière complets, tout en jumelant son travail avec « la crème de la crème » du côté des avocats, comptables, prêteurs et spécialistes en voyage.
« Dans notre marché, il y a trop de personnes qui voudraient jouer tous les rôles auprès de leurs clients, fait-elle remarquer. Nous croyons vraiment qu’il faut former une équipe, un conseil d’administration autour de nos clients pour qu’ils aient accès à une panoplie de compétences. »
Bien que férue de connaissances techniques, Mme White a rapidement compris qu’elle n’allait pas vraiment impressionner ses clients en leur présentant des chiffriers et des présentations PowerPoint. « J’ai vite saisi que le client se pose deux questions, poursuit-elle : “Est-ce que je peux lui faire confiance ?” et “Pouvez-vous résoudre mon problème ?”. Ils ne s’intéressent pas à mes connaissances de la loi sur l’impôt sur le revenu. Nous sommes là pour leur simplifier les choses, leur faciliter la vie et leur proposer une solution qui a de l’allure à leurs yeux. »
L’ancien joueur de football professionnel Milan Topolovec se qualifie désormais d’architecte financier des propriétaires d’entreprise. Ce conseiller installé à Ottawa a choisi un créneau précis, celui des professionnels et des propriétaires d’entreprise qui tiennent à soutenir leur famille, payer leurs impôts et améliorer le sort de leurs descendants.
« Ma passion, c’est de servir des gens qui voient comme moi les choses de cette façon », déclare-t-il.
Imaginer l’avenir
M. Topolovec aime imaginer le futur de ses clients. Il s’assure qu’ils lui posent toutes les questions possibles sur leur avenir financier et souligne l’importance d’avoir l’aide d’un comptable et d’un avocat.
Le conseiller britannique Tony Gordon a beau avoir pris sa retraite, cet homme qui a été membre du Top of the Table durant 43 ans, et président de l’organisme au niveau mondial, sait fort bien que les objectifs dont incontournables. En fait, il affirme qu’un conseiller n’est apte à planifier son avenir qu’après s’être fixé des objectifs clairs.
Tony Gordon admet qu’il n’est pas toujours facile de se prêter à cet exercice, en particulier au quotidien. « Il reste que ceux qui ont le courage de le faire auront toujours, mais vraiment toujours plus de succès que ceux qui ne le font pas. »
Il invite les conseillers à arrêter de dire ce qu’il leur faut aux clients ; il faut plutôt leur demander ce qu’ils veulent. La différence est subtile, mais il assure que la réponse obtenue peut doubler un chiffre d’affaires.
Si de nombreuses personnes ont vu leurs résultats perturbés par la COVID-19, M. Gordon estime que c’est leur sens de la discipline qui a permis aux conseillers de passer au travers de la pandémie. « Si nous faisons ce que nous avons à faire et si nous continuons de travailler comme nous devons le faire – solliciter des noms de clients, faire des appels, parler aux clients –, rien de ce qui est survenu au cours des 18 derniers mois ne devrait freiner notre progression. »
Planification de la relève
Ce qui vous distingue de la concurrence peut également rendre votre entreprise plus attractive lorsque vient le moment de passer le flambeau, croit Don White, coach en planification de la relève et auteur de deux livres sur le sujet.
La planification de la relève pose problème parce que, généralement, l’entreprise et le conseiller ne font qu’un, et ce dernier ne pose pas beaucoup de gestes pour faciliter la transition vers un autre conseiller, même s’il reste généralement conscient de sa responsabilité envers sa clientèle, analyse M. White.
« Or, quand on sait où l’on s’en va, on peut mettre en place un parcours qui permettra d’y arriver. Ainsi, en planification de la relève, il faut savoir vers quoi vous vous dirigez. Il vous faut un objectif qui va plus loin que vous-même. J’ai toujours eu comme objectif que… mon entreprise me survive. Donc, dès mes débuts, j’ai sans cesse cherché un successeur, la personne qui pourrait un jour prendre ma relève. »
Et si le projet ne fonctionne pas avec le premier candidat en vue, « on continue d’essayer et on marche par en avant ! » conclut M. White.
Vous avez manqué la webdiffusion du Canada Sales Congress qui s'est tenu les 20 et 21 octobre ? Pas de soucis : vous pourrez encore la visionner en intégralité jusqu'au 30 novembre (en anglais seulement). Pour en savoir plus, cliquez ici.