Le troisième trimestre a inspiré des craintes aux sociétés d’actuaires-conseils. « Bien que le niveau de solvabilité des régimes ait largement tenu le coup jusqu’à maintenant, le niveau ultra faible des taux d’intérêt et l’incertitude liée aux marchés boursiers ont beaucoup réduit les prévisions concernant les rendements à long terme d’un portefeuille type d’un régime de retraite PD », s’alerte Mercer Canada, en regardant son indice de la santé financière des régimes de retraite.
Signal d’alarme
Le ratio de solvabilité médian à la fin du troisième trimestre de 2019 était de 98,6 %, signale de son côté le sondage d’Aon. Il a ainsi diminué de 0,7 point de pourcentage, pour passer de 99,3 % au deuxième trimestre à 98,6 % au troisième trimestre de 2019.
Au troisième trimestre, les rendements obligataires ont diminué et les rendements des actifs ont stagné sous l’emprise de l’incertitude économique mondiale, ajoute la société. « Les niveaux de solvabilité des régimes de retraite canadiens à prestations déterminées accusaient un léger recul au cours du troisième trimestre », indique Aon.
Le ratio de solvabilité médian de l’indice de Mercer s’est établi pour sa part à 94 % au 30 septembre. Il est en baisse par rapport au ratio de 95 % enregistré à la fin du deuxième trimestre, mais en hausse comparativement au ratio de 93 % à la fin de 2018. « La plupart des régimes de retraite PD au Canada ont résisté à la tempête au cours de l’été et, dans certains cas, en sont sortis renforcés. Cependant, des signes inquiétants pointent à l’horizon », indique F. Hubert Tremblay, conseiller principal au sein du domaine avoirs de Mercer Canada.
Même son de cloche chez Aon. Selon la firme d’actuaires, la solvabilité globale demeure élevée, mais la diminution des rendements et la situation économique difficilement prévisible devraient être considérées comme des « signaux d’avertissement » pour les promoteurs de régimes de retraite.
Cout des régimes en hausse de 20 %
Ces conditions occasionneront probablement une augmentation des cotisations requises et des couts présentés aux états financiers pour de nombreux promoteurs de régime dans les années à venir, renchérit Mercer. « Un régime de retraite PD avec une répartition d’actif type pourrait être confronté à une hausse de 15 % à 20 % de ses cotisations d’exercice si l’on se base sur la diminution récente des taux de rendement prévus à long terme », dit la société d’actuariat.
Les rendements les plus bas sur les obligations à long terme depuis plus de 60 ans et la chute de 74 points de base des obligations à long terme du gouvernement du Canada ont contribué à un environnement de taux d’intérêt extrêmement bas, souligne Mercer, ce qui crée « des risques supplémentaires ».
Spectre de récession
« Si l’on ajoute les courbes de rendement inversées en Amérique du Nord — un indicateur fort d’une récession — le tableau est clair : une tempête se profile et les plans de toutes les tailles et de tous les horizons doivent maintenant envisager leurs options pour y faire face », ajoute F. Hubert Tremblay, de Mercer.
À cela s’ajoute l’incertitude provoquée par les tensions commerciales, le Brexit et le ralentissement de la croissance mondiale. « Pour les régimes avec un horizon à long terme, dégager un niveau de rendement qui les rendra abordables et durables dans ce contexte exigera, dans nombre de cas, de sortir des sentiers battus, affirme M. Tremblay. Quant aux promoteurs de régimes ayant un horizon à court terme, l’occasion s’offre à eux maintenant de réfléchir aux options leur permettant de prémunir davantage leurs régimes contre les jours plus difficiles qui les attendent peut-être. »
L’étude d’Aon montre quant à elle que les promoteurs se tournent davantage vers des placements non traditionnels. Aon exhorte les promoteurs à prendre tous les moyens d’éliminer les risques, y compris des stratégies de couverture. Le temps presse, dit la firme. « La baisse de la solvabilité donne à penser qu’il s’agit peut-être de la meilleure solution à court terme », soutient Claude Lockhead, associé exécutif, solutions pour la retraite d’Aon. Selon son le sondage sur les risques liés aux régimes de retraite d’Aon, les promoteurs de régimes pourraient ne pas avoir été assez énergiques dans leur adoption de stratégies de réduction du risque, ajoute M. Lockhead.