Richard Allen, vice-président au développement des affaires de CAFO, juge qu’il peut être dangereux pour un cabinet de courtage de financer lui-même ses primes. Une seule perte peut mettre en danger son entreprise, dit-il.

M. Allen reconnait qu’il peut être payant pour un courtier de financer des primes s’il a les reins assez solides financièrement pour le faire. « Ça peut être un gros problème s’il y a annulation de police. Une firme comme CAFO est protégée, car elle exige un retour de prime à courte échéance s’il y a annulation pour défaut de paiement. Le courtier n’y pense pas toujours. Si un syndic de faillite embarque dans le dossier, il peut exiger ce retour de primes si le courtier ne s’est pas protégé. »

Pour toute prime de moins de 100 000 $, CAFO souscrit une hypothèque au Registre des droits personnels et droits mobiliers (RDPRM). C’est à la suite de plusieurs annulations subies au début des années 2000 que des firmes de financement de primes, dont CAFO, ont fait des pressions pour faire modifier le Code civil du Québec.

Et ils ont réussi ! En 2008, le gouvernement du Québec a ajouté l’article 2479.1 au Code civil du Québec. Il stipule que « lorsque l’assuré a cédé ou hypothéqué son droit au remboursement du trop-perçu de prime en faveur de celui qui a payé la prime et que l’assureur en a reçu avis, l’assureur est tenu de rembourser le trop-perçu au cessionnaire ou au titulaire de l’hypothèque. La cession ou l’hypothèque du droit au remboursement du trop-perçu de prime n’est opposable aux tiers qu’à compter du moment où l’assureur en reçoit avis. En présence de plusieurs cessions ou hypothèques du droit au remboursement du trop-perçu de prime, la priorité est fonction du moment où l’assureur est avisé. »

« Sans cette règle, on pourrait mettre l’entreprise en péril, dit M. Allen. En envoyant cet avis, l’assureur se doit de nous retourner les primes non gagnées. Le courtier qui fait son financement lui-même ne le fait pas nécessairement. Il n’a qu’un contrat courtier-client qui le lie à l’assureur. Ce dernier détient donc le retour de primes et le courtier n’a aucun recours en un tel cas. »

Rien n’empêche un courtier de souscrire une telle hypothèque, dit M. Allen, mais ils ne le font pas. « Ils jugent que leurs clients sont de bonne qualité. Nous aussi nous disons la même chose des nôtres. Mais si jamais le syndic s’en mêle, il peut y avoir des pertes pour le courtier », prévient-il.

M. Allen estime qu’une dizaine de grands courtiers financent eux-mêmes leurs primes au Québec. « Or, ils ne connaissent pas nécessairement la situation financière de leurs clients. Plusieurs entrepreneurs refusent de les dévoiler », souligne-t-il.