Les systèmes d’arrière-guichet vantent des passerelles qui ne se matérialisent pas toujours, déplorent les agents généraux qui doivent souvent les développer eux-mêmes pour aller de l’avant.

Au gré des acquisitions, Groupe financier Horizons s’est retrouvé avec trois plateformes d’arrière-guichet différentes. Force financière Excel utilisait un système maison et Horizons utilisait VirtGate. Groupe CMA utilisait AGEman. Horizons a choisi WealthServ.

Regrouper trois plateformes en une seule a requis un travail ardu d’un an et demi, et a aussi obligé l’agent général à créer ses propres passerelles, se rappelle son président, Québec, James McMahon. « Il n’y avait pas de passerelles. Il nous a fallu les créer, et mettre la main dans la poche gauche », a-t-il dit en faisant l’allusion aux profits de l’entreprise.

Ces travaux ont été importants, car il s’agissait de plusieurs passerelles, entre autres pour l’émission de rapports comptables mensuels et de rapport sur les ventes. Dans le nouveau site Web d’Horizons, des passerelles se font automatiquement entre WealthServ, le système Mirador bonifié (Excel) et le portail des conseillers, a révélé M. McMahon.

Aurrea tape du pied

Le PDG d’Aurrea Signature, Christian Laroche, se dit exaspéré du manque de communication entre les divers systèmes d’arrière-guichet, tant ceux des assureurs que ceux qu’offrent les assurtechs aux agents généraux. « Un agent général doit avoir un système d’arrière-guichet pour assurer sa conformité. Mais les agents généraux commencent à avoir des problèmes avec ces systèmes. Les passerelles, on n’en voit pas la couleur », déplore-t-il.

M. Laroche dit espérer un système uniforme dans lequel les passerelles s’établissent enfin. « Et que nous n’ayons plus à subir la concurrence entre les fournisseurs de système d’arrière-guichet », dit-il.

L’agent général souhaite ainsi que les systèmes d’arrière-guichet se parlent complètement entre eux. Ils ne doivent pas uniquement « pousser » des données vers les systèmes de gestion de la clientèle (CRM). Ils doivent aussi en recevoir d’eux.

« Actuellement, le conseiller doit entrer dans mon système AGEman pour faire le suivi de ses affaires. Dans un monde idéal, le conseiller travaillerait dans un système par lequel il aurait accès à tout, son suivi, ses courriels, son système de gestion de la clientèle, etc. Ce que j’entre comme données devrait pouvoir aller directement dans son système Kronos », donne en exemple le PDG d’Aurrea.

Christian Laroche désigne iGeny comme modèle en ce sens, mais qui peine encore à ouvrir les portes des compagnies d’assurance. Axé sur la conformité, le système développé et commercialisé par le cabinet d’assurance Diversico offre un suivi à la trace des transactions, telle que la vérification des signatures et la complétude des formulaires d’assurance. Un tel système pourrait selon lui s’adapter à un système d’arrière-guichet, pour aider l’employé de l’agent général au traitement des données et à vérifier la conformité de chaque transaction.

Il permettrait aussi au conseiller de faire certaines transactions à distance. « De nos jours, un changement de bénéficiaire devrait pouvoir se faire à distance, avec la signature électronique. Souvent, des assureurs refusent alors que cette façon de faire est légale. J’ai l’impression qu’ils préfèrent voir le conseiller utiliser le système de l’assureur », soutient M. Laroche.

Passerelle tripartite chez iGeny

Président de Diversico et créateur d’iGeny, Daniel Guillemette vise à créer une passerelle qui se raccorderait à celle qui existe depuis un an entre AGEman et le système d’arrière-guichet en fonds communs de VieFONDS Corporation. « Cela créerait une passerelle tripartite qui deviendrait le seul système de bout en bout », dit M. Guillemette.

Au volet assurance et investissement s’ajouterait un volet hybride d’iGeny qui offre une zone externe sécurisée à l’usage des clients. « Il y aurait l’arrière-guichet, l’avant-guichet (front-office), et je me rends un étage plus loin en faisant qu’iGeny parle au client. Le client et le conseiller peuvent interagir en vase clos. Il reste à prendre l’information qui en résulte et l’acheminer au back-office de l’agent général, qui l’acheminerait à son tour à celui du fournisseur d’assurance », explique-t-il.

Gestion des opérations

À la différence de Kronos qu’il décrit comme un CRM qui gère le développement des affaires des conseillers, le système d’iGeny évolue davantage dans un contexte de gestion des opérations. « En qualité de CRM, iGeny et Kronos font la même chose. Je me distingue toutefois du CRM en ce que l’intelligence artificielle derrière iGeny fait 60 % des opérations de l’adjointe à sa place, par exemple le changement de bénéficiaires et la génération des formulaires nécessaires pour chaque compagnie. Le système fait aussi le rappel automatique au client de signer son formulaire », explique M. Guillemette.

Éviter les doublons, les triplons et les quadruplons

Or, il a aussi des mots durs sur les passerelles. « Ce terme est à la mode, mais ça ne marche pas, dit M. Guillemette. Les passerelles créent des doublons d’information, des triplons, des quadruplons… » Au fil des acquisitions et 7 000 clients plus tard, il reçoit l’information sur des contrats en vigueur qui proviennent de multiples systèmes, dans lesquels les données ont été entrées de toutes les façons imaginables. Dans les noms, les majuscules se disputent aux minuscules et aux différences dans l’orthographe, ce qui crée des entrées distinctes qui n’ont pas lieu de l’être. L’information peut aussi se chevaucher dans les différents champs, où elle se trouve tronquée.

Recevoir tout cela dans iGeny et le rendre de façon uniforme est impossible, signale Daniel Guillemette. « Notre passerelle est fonctionnelle, mais l’information entre de travers. Par exemple, un employé de l’assureur qui ne connaissait pas le numéro de téléphone du client met un point d’interrogation plutôt que laisser le champ vide : le système génère un signal d’erreur. Quand tu veux être professionnel, tu n’as pas le choix de rentrer tout cela à la mitaine », explique-t-il.

Il observe que des fournisseurs de technologies d’arrière-guichet dédiés aux cabinets, tels AGEman et VieFONDS, créent leurs fichiers de façon « contemporaine ». « Ils formatent les données de la bonne manière, mais lorsqu’elles proviennent des assureurs, c’est autre chose », a observé M. Guillemette.