Ramos

Cabinet d’assurance collective numérique, Viver Health Inc. (Viver) se pose en perturbateur (disruptor) en promettant aux conseillers de réinventer leur expérience. Comment ? En obtenant pour le promoteur du régime une soumission en cinq minutes, à partir de trois questions.

Fondé par Jorge Ramos en novembre 2023, Viver n’est pas une assurtech venue de l’extérieur de l’industrie. L’idée a germé de l’expérience acquise par son fondateur et des préoccupations des conseillers en assurance collective, qu’il a recueillies sur le terrain dans les dernières années.

M. Ramos a entamé sa carrière en 1998 à Patrimoine Dundee, société acquise par Banque Scotia en 2011. Il a depuis occupé des postes de direction tant chez des assureurs que des agents généraux. Depuis septembre 2020, M. Ramos agit à titre de directeur national de la planification avancée de Carte Wealth Management, agent général établi à Mississauga en Ontario et membre de l’Association canadienne des agences de courtage en vie indépendantes (CAILBA).

Avec ses collègues, il jongle brièvement avec l’idée de lancer une division d’assurance collective au sein de Carte, partenaire de distribution de Viver. Il optera finalement pour faire de Viver une entreprise indépendante, ouvrant du même coup la porte à des partenariats avec d’autres agents généraux.

C’est trop dur ! 

Nous avons entendu des choses comme : ‘nous ne faisons pas d’assurance collective parce qu’il est trop difficile d’obtenir une soumission’ – Jorge Ramos 

En entrevue exclusive avec le Portail de l’assurance, M. Ramos a dit avoir fondé Viver pour répondre aux préoccupations de nombreux conseillers qui hésitent à vendre de l’assurance collective, « parce que c’est trop dur ». Son objectif : leur faciliter le travail. 

« Nous avons demandé aux conseillers ce qu’ils aiment et n’aiment pas en assurance collective. La réponse a été incroyable ! Nous avons entendu des choses comme : ‘nous ne faisons pas d’assurance collective parce qu’il est trop difficile d’obtenir une soumission’ », a confié M. Ramos.

Cette facilité de faire affaire, Viver soutient l’offrir aux conseillers en changeant les règles du jeu. Sa brochure marketing titre : Revitaliser (reviving) l’expérience en assurance collective. Elle nomme l’approche « the Viver way ». Jorge Ramos définit ainsi l’offre de revenir au conseiller avec une soumission d’assurance collective en « cinq minutes plutôt qu’en cinq semaines ».

Viver court-circuite le cycle traditionnel en posant seulement trois questions au client : 

  1. Combien avez-vous d’employés ? 
  2. Quel est votre secteur d’activités ? 
  3. Quel est votre budget ? 

L’assurtech se définit comme un cabinet de tierce partie en administration et paiement de réclamations. Elle soustraite ces activités auprès de SEB Administrative Services (SEB Admin), une filiale de Smart Employee Benefits Inc., pour réduire les dépenses et se concentrer sur les ventes, explique M. Ramos.

Le client fixe le prix 

Narinder Kempa

Après avoir essuyé quelque refus, Viver a trouvé un partenaire exclusif d’assurance en Co-operators. « Nous avons conclu un partenariat avec Viver parce que nous croyons beaucoup au partage (de données), à l’éducation et à la personnalisation des services pour que le client puisse prendre des décisions éclairées », a souligné Narinder Kempa, directrice des produits d’assurance collective à Co-operators, en entrevue avec le Portail de l’assurance

Mme Kempa remarque que dans le modèle traditionnel, le processus est très long et chronophage. « Les conseillers doivent obtenir beaucoup d’informations de leur client, et il y a plusieurs échanges entre le client, le conseiller et la compagnie d’assurance. C’est un processus administratif intense », ajoute-t-elle. 

Nous confions la tarification aux preneurs de régime. Vous nous dites combien vous voulez dépenser et nous trouverons le régime qui vous convient – Narinder Kempa 

Le fait que le client choisisse dès le départ combien il veut payer (question 3 de Viver) est novateur, selon Narinder Kempa. Elle a révélé que c’est la première incursion dans ce type de modèle pour Co-operators, habitué au modèle traditionnel.

« Co-operators a vu l’occasion de réduire les tâches administratives, de libérer le temps des conseillers de tous les allers-retours qu’ils font et d’aider les clients », confie Mme Kempa. « Nous confions la tarification aux preneurs de régime. Vous nous dites combien vous voulez dépenser et nous trouverons le régime qui vous convient », dit-elle. 

Un groupe plutôt qu’un individu 

Pour obtenir une soumission en si peu de temps avec trois questions, Viver se fonde sur des statistiques disponibles publiquement et celles que détient Co-operators sur l’expérience de ses groupes, par exemple en demandes de remboursement (réclamations).

Cette approche fondée sur la loi des grands nombres permet à Viver de regrouper les risques. Ainsi uniformisée, la tarification repose sur le groupe plutôt que l’individu, explique le fondateur de Viver. Il peut aussi se passer de connaître l’expérience du groupe client avec son assureur actuel.

Viver a essuyé des refus avant de trouver ce partenaire. « Il a fallu trois ans pour trouver les bons partenaires et concevoir, développer et enfin lancer le programme », se remémore Jorge Ramos. « De nombreux autres assureurs nous ont dit que ce que nous essayions de créer était impossible. », ajoute-t-il. 

Co-operators a accepté. Mais au départ, il aurait voulu que la plateforme Viver pose 10 questions plutôt que trois, relate son président fondateur. Progressivement, l’assureur réalise que ses sept questions sont de trop. Viver revient à ses trois questions de départ. 

L’approche statistique de Viver lui permet en effet d’éliminer la cueillette de données devenues superflues, comme le statut marital des employés. C’était l’une des questions proposées par Co-operators. 

Jorge Ramos a fait valoir un point de vue statistique à son partenaire d’assurance : « Si j’ai une salle de mille personnes et que je connais leur secteur d’activité et leur âge moyen, les statistiques nous disent que 60 % sont mariées. Toutes les données nécessaires existent déjà », a-t-il expliqué. 

Créneau des 20 à 30 employés 

« Deux types de conseillers viennent chez Viver, affirme Jorge Ramos, les conseillers en assurance collective qui travaillent auprès de petits groupes de 30 employés et moins, et les conseillers qui sont nouveaux en assurance collective. »

Or, il révèle que ce sont les nouveaux conseillers en assurance collective qui s’avèrent un créneau « formidable ». Les ventes commencent à arriver à Viver. M. Ramos n’a pas voulu quantifier davantage. 

« Nous passons beaucoup de temps avec ce type de conseillers (créneau des groupes de 20 à 30 employés). Je leur donne des cours d’assurance collective 101 ; je leur apprends le langage. Lorsqu’ils trouvent un client, ils viennent naturellement vers moi parce que je leur ai tout expliqué. Toutes les ventes que j’ai faites au cours des deux dernières semaines sont avec de nouveaux conseillers que j’ai formés », révèle-t-il. 

De son côté, Narinder Kempa a révélé que l’assurance collective représente 25 % des affaires d’assurance vie de Co-operators. Elle ajoute qu’environ 35 % de ses affaires en assurance collective provient de groupes de moins de 30 employés. 

Garantie de deux ans 

Le conseiller doit s’inscrire au portail de Viver pour recevoir un lien personnalisé qui lui permettra d’obtenir une soumission pour son client. Le conseiller partage le lien avec son client qui peut ensuite réviser sa soumission et la modifier au besoin, pour ajuster le prix de départ à sa convenance.

Le client peut payer le premier mois de prime par carte de crédit, et le contrat d’assurance collective est instantanément émis. Viver rémunère du même coup le conseiller. La commission qui lui est offerte reflète la pratique courante de l’industrie, soutient Jorge Ramos. 

Après la vente vient l’adhésion (onboarding dans le jargon de l’industrie). L’employeur reçoit un courriel qui l’invite à fournir la liste de ses employés avec leurs coordonnées. Chaque employé reçoit ensuite un courriel l’invitant à fournir ses renseignements bancaires. La couverture débute le 1er du mois qui suit celui où la vente a eu lieu. 

Viver garantit au groupe que sa tarification ne changera pas dans les 24 mois qui suivent l’acceptation d’une soumission. Au besoin, il ajustera l’expérience du groupe par la suite. 

Jorge Ramos dit que Viver a un permis d’exercer en Ontario et en Alberta. Il s’attend à obtenir le droit d’exercer dans les autres provinces canadiennes au cours du premier trimestre de 2025. Excepté au Québec, où sa demande de permis à l’Autorité des marchés financiers au Québec pourrait selon lui aboutir d’ici la fin de l’année. 

Avec la collaboration de Serge Therrien.