La consommation d’alcool chez les femmes au Québec a augmenté au cours des dernières décennies. Elle se rapproche de plus en plus de celle des hommes. En 2017-2018, au Québec, 84 % des hommes sondés indiquaient consommer de l’alcool, ce chiffre atteignait 79 % chez les femmes, ce qui est davantage qu’au Canada anglais.

Les études portant sur la consommation d’alcool spécifiquement chez les femmes sont encore peu nombreuses. Les chiffres les plus récents sont tirés d’un rapport, L’alcool au féminin, publié il y a quelques mois par l’Association pour la santé publique du Québec (ASPQ).

« Nous ne sommes plus dans une dynamique où les femmes boivent vraiment moins que les hommes comme c’était le cas à une époque, souligne Kim Brière-Charest, directrice de projets, substances psychoactives, à l’ASPQ, en entrevue avec le Portail de l’assurance. On constate que la consommation élevée ou abusive d’alcool a tendance à augmenter de plus en plus chez les femmes. » 

Une consommation abusive est décrite par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) comme l’ingurgitation de 4 verres et plus par occasion chez la femme et de cinq verres chez les hommes.

Un impact différent sur les femmes 

Les femmes ont souvent un foie plus petit que celui des hommes, ce qui a un impact sur la façon de métaboliser l’alcool, dit Kim Brière-Charest. Les effets de l’alcool sur la physiologie féminine ne sont pas les mêmes que ceux sur le corps masculin. L’ASPQ le met dans le préambule. « Pour une même quantité d’alcool, les femmes obtiennent une alcoolémie supérieure à celle des hommes. »

« Les femmes qui consomment de l'alcool sont plus à risques au niveau de leur santé pour une quantité équivalente à celle des hommes », ajoute Kim Brière-Charest. 

Elles sont plus susceptibles de développer des lésions et des maladies hépatiques, dont la cirrhose, et ce, en consommant des quantités moindres que les hommes. 

Celles qui boivent sont exposées aux mêmes risques de cancers que ces derniers. Près d’un quart des cas de cancer du sein serait attribuable à la consommation d’alcool. 

En conduite automobile, les femmes peuvent atteindre un taux d'alcoolémie de 0.08 en consommant moins que les chauffeurs de sexe masculin. L’ASPQ prône la réduction de ce taux au Québec à 0,05, tous sexes confondus, comme c’est le cas dans les autres provinces canadiennes. 

Motifs de consommation chez la femme 

Les raisons qui poussent les femmes à boire davantage que dans le passé sont multifactorielles. Des phénomènes comme celui des  « Wine mom », ces mères de famille qui sont fatiguées et prennent un verre en fin de journée, les soirées de filles proposées dans les bars, les activités professionnelles entourant le travail ont contribué à la féminisation de la culture de l’alcool. 

Selon le rapport de l’ASPQ, les femmes seraient aussi plus enclines biologiquement à consommer de l’alcool en réaction à une émotion négative. L’anxiété et la dépression peuvent être des motifs de consommation chez certaines. 

L’exposition à des sources de stress en début de vie comme des abus émotionnels et physiques ainsi que les problèmes légaux de garde d’enfant précipitent ou prédisposent à l’émergence d’un trouble d’usage lié à l’alcool. 

Chez les femmes, la consommation d’alcool a été associée à un plus grand risque d’avoir des comportements violents, mais aussi de vivre de la violence.

Le marketing des fabricants 

Le marketing des fabricants de boissons alcoolisées qui ont ciblé les femmes avec leurs nouveaux produits aux aspects plus féminins a aussi joué un rôle majeur dans cette hausse, ainsi que le mythe, aujourd’hui démoli, voulant qu’un verre de vin rouge soit bon pour la santé et nous éloigne du médecin. Pour bénéficier du bienfait de la substance bonne pour la santé, il faudrait en boire des quantités faramineuses, mais les effets négatifs apparaîtraient beaucoup plus vite. 

« Sachant que les impacts de l’alcool peuvent être plus délétères chez les femmes pour une quantité équivalente, on peut se demander si c’est éthique de faire du marketing ciblé envers la clientèle féminine », commente Kim Brière-Charest. 

Des signes encourageants pour le futur 

Il y a toutefois des signes encourageants. De plus en plus de boissons non alcoolisées font leur apparition sur le marché, des jeunes réduisent leur consommation d’alcool et le fait de refuser de boire est mieux compris socialement.

Lors d’un sondage réalisé par l’ASPQ, 82 % des répondants ont dit souhaiter que l’on augmente la prévention et le soutien liés à la consommation d’alcool.