La technologie repose au cœur des défis qui attendent l’industrie de l’assurance de dommages au cours des prochaines années. Il ne faut toutefois pas oublier l’impact que le tout aura sur la gestion de sinistres, ont indiqué deux hautes dirigeantes de l’industrie, lors de l’assemblée générale annuelle de l’Association des femmes d’assurance de Montréal (AFAM).
Maya Raic, PDG de la Chambre d’assurance de dommages, a dénombré six enjeux auxquels l’industrie de l’assurance de dommages devra faire face. Ainsi, elle devra absolument combler son retard dans le développement technologique et dans l’utilisation des données. De plus, l’industrie devra être capable de développer une expertise de plus en plus poussée au niveau du règlement des sinistres, en s’accommodant de la multiplication des réclamations et des outils disponibles.
Nécessité d’encadrement
Autre enjeu majeur, la révision de la Loi sur la distribution des produits et services financiers, notamment concernant la distribution par Internet des produits d’assurance. « Le risque c’est de voir des sites Internet offrir le meilleur prix plutôt que le meilleur service, ce qui serait plus regrettable, prévient Mme Raic. D’où l’importance d’avoir un professionnel derrière la transaction. Il faut aussi s’assurer que l’on s’adresse au consommateur dans un langage simple et clair. Les sites de comparaisons devront aussi être inscrits, la protection des données devra être assurée, tout comme l’interdiction des publicités pendant la transaction. » Une nécessité d’encadrement qui rejoint un autre enjeu, celui concernant l’encadrement des cabinets et des personnes pour de meilleures pratiques d’affaires et un respect des règles de déontologie.
La question de l’assurance des copropriétés, de plus en plus complexe en termes de responsabilité, fait aussi figure de défi majeur pour l’industrie, notamment en matière d’information et de formation, mais aussi de réglementation. « L’industrie doit de plus en plus s’approprier ce dossier-là dans un marché qui est en train de se resserrer : certains acteurs se retirent du marché, d’autres augmentent leurs franchises en cas de dégâts des eaux », dit Mme Raic.
Enfin, la multiplication des fusions et acquisitions, que ce soit chez les assureurs ou les courtiers, représente un nouvel enjeu pour l’industrie. « Il s’agit d’un défi en termes d’intégration des personnes, mais aussi en termes de mise en conformité. Il est important d’investir du temps et de l’énergie pour ce faire », dit la PDG de la Chambre.
L’experte en sinistre Suzie Godmer, vice-présidente principale chez IndemniPro, voit un défi majeur dans le développement technologique et dans la transformation du métier d’expert. « Aujourd’hui, il existe un système informatique différent pour chaque assureur. Or, on exige de nous que l’on réalise les mêmes tâches, s’inquiète-t-elle. De plus, nous devons gérer notre boite vocale, nos courriels, nos textos, etc. Les exigences restent les mêmes, mais les moyens de communication sont multiples, d’autant plus que les assureurs nous imposent tous cette façon de faire. »
Autre préoccupation pour Mme Godmer, la surenchère salariale des experts en sinistres, notamment ces cinq dernières années. « De nos jours, un junior vaut de plus en plus cher, même si ce dernier souhaite faire le moins d’heures possible ». Aujourd’hui, la profession doit faire face à une pénurie d’experts qui ont une réelle… expertise. « Un expert en sinistre doit aujourd’hui être expert dans tout un tas de choses, mais ne peut pas aller dans la profondeur », s’inquiète-t-elle.
Enfin, l’un des grands défis pour les experts en sinistres sera le remplacement des professionnels seniors et la formation de la relève. « Le transfert de connaissance n’est pas toujours facile, prévient Mme Godmer. Parfois, l’expert senior hésite un peu à partager son expérience vu qu’il est lui-même encore dans le business. Et le junior n’est pas toujours prêt à s’investir totalement », laisse-t-elle entendre