Assureurs et courtiers IARD ne s’entendent pas sur les impacts de la crise économique sur le marché de l’assurance des véhicules récréatifs. Certains s’attendent à un légère baisse des affaires, tandis que d’autres se préparent au pire. La baisse du prix de l’essence et du coût d’acquisition des véhicules récréatifs pourraient toutefois jouer en leur faveur.
Bernard Chagnon, président d'Univesta, s'attend à ce que la crise économique ait un impact. Il affirme que certains partisans de nautisme ont laissé tomber leur bateau et se sont achetés un voilier. Il ajoute que les concessionnaires de véhicules récréatifs se préparent à la crise. « Nous avons des contrats d'assurance collective avec des concessionnaires de produits Bombardier et Polaris. Il y a une baisse importante du nombre d'employés sur les contrats. On voit déjà des mises à pied. C'est un indice que les ventes vont baisser. On pourrait vendre moins de polices », dit-il.
Guy Lacroix, de Marine Expert, croit aussi que ce marché sera touché. « À l'été 2008, nous avons peu senti les effets de la hausse du prix de l'essence, car les gens se sont servis de leur bateau comme chalet. On a vu moins de mouvement vente, revente et achat. Le taux de conservation s'est amélioré, mais nous avons eu moins de nouvelles affaires. En 2009, tout dépendra de la morosité de l'économie. Il faut s'attendre à ce qu'il y ait un ralentissement des ventes et des acquisitions. Le prix de l'essence pourrait jouer favorablement s'il reste bas. On voit que les gens font plus attention », dit-il.
Catégorique
Richard Leclerc, président de Leclerc Assurances, est catégorique. La crise économique aura un impact important. « Plusieurs institutions financières se questionnent sur la façon de financer l'achat des véhicules récréatifs. Avant, elles ne demandaient aucun acompte. Maintenant, certaines peuvent demander jusqu'à 20 ou 25 % de la valeur du véhicule. Les baby-boomers risquent de retarder de quelques années l'achat de leur joujou, le temps de se refaire une cote de crédit et une équité. On s'attend à ce que ce soit le premier investissement qu'ils retardent », dit-il.
M. Leclerc affirme aussi que les manufacturiers et concessionnaires de véhicules récréatifs ont enregistré une baisse des ventes de 20 % l'été dernier. « Ce fut pire aux États-Unis. À la plus importante foire américaine de véhicules récréatifs qui se déroule au Kentucky, l'espace occupé cette année était réduit de moitié comparativement à l'an dernier. On devra être plus intelligent dans nos façons de faire », dit-il.
Fléchissement de la prime
Le président de Leclerc Assurances dit qu'il faut tenir compte du fléchissement de la prime moyenne. « Nous ne sommes pas intéressés à laisser partir des clients. On sait quel est le point de rentabilité de l'assureur. La crise économique va ralentir les adeptes de véhicules récréatifs. On n'a qu'à regarder les sondages dans les médias sur les intentions d'achat pour s'en convaincre », ajoute-t-il.
Bob Thisdale, président de Pafco, dit s'attendre à voir un ralentissement dans le marché des véhicules récréatifs, surtout si les gens commencent à perdre leur emploi. « En me rendant au congrès du Regroupement des cabinets de courtage d'assurance du Québec, en novembre dernier, j'ai vu beaucoup de motoneiges à vendre entre Québec et Charlevoix. Je n'ai pas l'impression que les gens qui les ont mis en vente ont l'intention d'en acheter d'autres », dit-il.
Pafco dit s'attendre à une année 2009 plus difficile vu le contexte économique. « On va se consacrer au marché du sous-standard automobile, où nous sommes très forts », dit Michèle Boulé, directrice régionale de Pafco au Québec.
Yves Fortin, d'AXA Assurances, doutait de l'impact de la crise. L'annonce de Harley-Davidson de supprimer 1 100 emplois le force à se poser des questions. Il note que les fabricants de produits ont adapté leurs produits à leur clientèle, ce qui pourrait aider.
Patricia St-Jean, d'Aviva Canada, ne croit pas que la crise aura un impact sur les propriétaires de véhicules récréatifs. Elle affirme que si ces derniers peuvent s'acheter un tel véhicule, ils ont les moyens de le garder. Elle dit que la crise pourrait avoir un impact sur ceux qui ont de plus petits véhicules.
« Ceux qui pensaient faire une croisière autour du monde vont plutôt s'acheter un motorisé. Les gens seront moins portés à acheter quelque chose de neuf. Cependant, ils ont besoin de leurs vacances, de leurs loisirs et de leur retraite. Les bateaux à un million de dollars se vendent encore. Les gens pouvant se les acheter sont moins affectés. Quant au motocycliste, il va peut-être acheter un Goldwing au lieu d'un Harley. Le changement se fera sur le véhicule de rêve », dit-elle.
Baisse de participation
Pour Mme St-Jean, il est trop tôt pour parler des perspectives de 2009. « On aura nos feedbacks lors des salons. Au salon du bateau de Miami, qui est l'un des plus gros rassemblements du genre au monde, il y a eu une baisse de participation. Ça ne veut pas nécessairement dire moins de ventes. Jusqu'à maintenant, on n'a pas eu un gros montant d'annulation de polices », dit-elle.
Daniel Babineau, de J.A. Lemieux et fils, s'attend à un ralentissement des ventes de polices allant de 7 à 8 % en 2009, ce qui n'est rien de catastrophique selon lui.
« Les gens achètent beaucoup moins de petites machines. Au lieu de payer 10 000 $ ou 15 000 $ pour une moto, ils vont payer 25 000 $. De plus, aujourd'hui, pour 18 000 $, tu as un Harley-Davidson. C'est la même chose pour les bateaux : les gens s'achètent de grosses embarcations. Dans le moment, les gens qui ont des petites machines sont désavantagés, car ils s'en servent peu. Pour les adeptes qui font de 10 000 à 15 000 kilomètres par année, le contexte économique ne change rien. Même s'ils mettaient leur véhicule à vendre, ils ne trouveraient pas d'acheteur », dit-il.
Lucie Constantineau, de Jevco, s'attend à ce que la crise frappe ce marché. « C'est vu comme du luxe. Peut-être que les gens ne vendront pas leurs véhicules récréatifs, mais ne feront que les remiser. C'est quelque chose qu'on voit souvent », dit-elle.